Octave, héritier de César
Le futur Auguste est né Caius Octavius le 23 septembre de l’année 63 avant Jésus-Christ (soit l’année du consulat de Cicéron), à Rome, sur le Palatin. Son père est gouverneur de la province de Macédoine jusqu’en 59 av-JC, et il meurt à son retour en 58. Octave l’a donc très peu connu, et c’est sa mère qui prend alors beaucoup d’importance dans sa vie. Or, Altia Baeba Caesonia est la nièce de Jules César. Le jeune Octave est ensuite sous la tutelle de Caius Toranius, mais aussi sous la protection de sa grand-mère maternelle, Julia. C’est grâce à elle qu’il s’instruit jusqu’à ses douze ans, avec quelques-uns des plus grands maîtres de la rhétorique, et dans ce cadre qu’il se fait ses premiers amis qui joueront un grand rôle par la suite, tel Agrippa. Si octave excelle en politique, la chose militaire n'est pas son fort. Agrippa, brillant stratège sur terre comme sur mer, sera son bras armé.
La situation politique de Rome est de plus en plus tendue, avec comme toile de fond principale la rivalité entre César et Pompée. Très tôt, Octave se rapproche de son grand-oncle et joue un rôle politique, tout comme sa sœur, dans les intrigues qui se nouent. En 48, César fait entrer Octave au collège des pontifes et dès 45, il est en campagne militaire en Espagne contre les partisans de Pompée. Déjà apparaissent ses premiers problèmes de santé, et surtout ses difficultés à se poser en vrai chef militaire, au contraire de son ami Agrippa qui l’accompagne. La même année, Jules César, sans fils, rédige son testament et fait d’Octave son héritier, auquel il lègue les trois quarts de ses biens.
La guerre civile
En tant qu’héritier légitime de César, Octavien se pose d’abord en rival de Marc-Antoine, apprécié du peuple romain, et qui se voyait bien succéder à son mentor. Pourtant, grâce à son habileté politique et l’aide militaire de ses proches (Agrippa en particulier, comme toujours), le futur Auguste parvient petit à petit à écarter son rival. Il bénéficie entre autres du soutien de Cicéron, qui doit lui permettre d’avoir l’appui décisif du Sénat. Antoine est alors battu à Modène en 43 av J.C, les deux consuls en exercice sont tués et Cicéron a planifié d’être consul avec le jeune homme…mais le Sénat refuse !
C’est l’un des points importants durant les premières années de la trajectoire politique du futur empereur, qui va voir dans le Sénat son principal adversaire. En effet, les vénérables sénateurs ne voient pas d’un bon œil la montée en puissance de celui qui pourrait devenir un nouveau César, plus jeune qui plus est ! Octavien ne se démonte cependant pas et obtient finalement le consulat, et organise la punition des assassins de César. A la fin de l’année 43, il est clair qu’Octavien a pris le dessus sur ses adversaires et, après d’âpres négociations, il obtient le ralliement de Marc-Antoine et de Lépide, pour former le second triumvirat.
L’accalmie dure toutefois peu de temps, tant la rivalité n’a cessé entre Antoine et Octavien, malgré le mariage de la sœur de celui-ci avec le premier. Le futur Auguste est de plus en plus populaire, alors que parallèlement Antoine tombe sous la coupe de Cléopâtre ; Lépide est lui rapidement écarté, et ses provinces d’Afrique tombent entre les mains d’Octavien. La guerre éclate entre les deux héritiers de César, pour aboutir à la bataille navale d’Actium (31 av-JC) : Antoine et Cléopâtre sont défaits, Octavien devient le seul maître de Rome.
Les débuts du principat d'Auguste
Dès 38, Octavien a obtenu le titre d’imperator ; mais sa victoire contre Antoine lui permet une accumulation des titres, et donc des pouvoirs : princeps senatus en 28 (cette année, il accomplit son sixième consulat, avec Agrippa pour collègue). Le sénat lui donne le titre honorifique d'Auguste en 27 av., la puissance tribunicienne en 23 av., et son imperium est renouvelé pour dix ans. Sans que cela soit vraiment officiel, c’est bien un nouveau régime qui s’installe à la place de la République : le principat. Auguste, malgré ses discours qui insistent sur l’importance du Sénat et du peuple, est bien le seul décideur. Il enchaîne alors les réformes : armée, administration, organisation des provinces, ainsi que de grands travaux à Rome : il modèle ce qui devient l'Empire romain, pour les siècles à venir.
Strict observateur des vertus romaines, Auguste s’efforce de réguler les mœurs publiques en édictant les lois somptuaires (limitant les dépenses) et des lois natalistes (en faveur du mariage). Dans le domaine économique, il encourage le développement de l’agriculture dans la péninsule italienne. Sa politique religieuse présente deux aspects : Auguste s’emploie d’une part à restaurer et à rénover la religion traditionnelle, et d’autre part, il fonde le culte impérial.
Protecteurs des arts, Auguste est l’ami des poètes Ovide, Horace et Virgile, ainsi que de l’historien Tite-Live auquel il accorde ses encouragements et ses libéralités. Avec l’aide de son ami et conseiller, Marcus Vipsanius Agrippa, Auguste s’emploie à embellir Rome en faisant notamment construire le forum d’Auguste, le théâtre de Marcellus, le temple d’Apollon Palatin, le Panthéon et les thermes d’Agrippa ; selon Suétone, « il a laissé une Rome de marbre, là où il avait trouvé une ville de briques ».
Auguste en Gaule
L’ancienne colonie romaine de Lugdunum, fondée en 43 av. J.-C., devient la capitale de la province romaine sous l’empereur Auguste et le point de départ des cinq grandes routes impériales vers l’Aquitaine, l’Italie, le Rhin, Arles et l’Océan. L'empereur y fait construire l'Amphithéâtre des Trois Gaules, dédié à son culte et à Rome, ainsi qu'un atelier de monnaie. Auguste se rendit au moins à quatre reprises dans la Province, à la pacification de laquelle il accorda un soin particulier, et son ami et gendre Agrippa veilla personnellement à l’organisation administrative du pays en procédant au cadastrage complet des terres gauloises et en faisant construire un important réseau routier.
Malgré la pacification déjà bien engagée dès les dernières années de la dictature de Jules César, des foyers de tension subsistèrent localement et plusieurs flambées de violence témoignèrent des derniers soubresauts de révolte de certains peuples gaulois contre la domination romaine. Les Aquitains (en 39 av. J.-C.), les Morins (en 30 av. J.-C.), les Trévires (en 29 av. J.-C.) et de nouveau les Aquitains (en 28 av. J.-C.) se soulevèrent et provoquèrent l’intervention des légions romaines. En 25 et en 14 av. J.-C., Auguste soumit les peuples des hautes vallées des Alpes et un trophée fut élevé en 6 av. J-C à la Turbie commémora sa victoire sur ces derniers.
Une fin de règne difficile
La paix intérieure ne signifie pas évidemment la paix avec les voisins. Auguste doit s’employer, et surtout envoyer le talentueux Agrippa mater les différentes menaces qui entourent l’Empire. Il s’agit avant tout de consolider les frontières, plutôt que d’agrandir le territoire de Rome : il fixe les limites de l’Empire sur l’Euphrate, face aux Parthes ; au Nord, il repousse les frontières jusqu’au Danube. Toutefois, il connaît un revers traumatisant en 9 apr-JC, quand le légat Varus est massacré avec trois légions contre les Germains. C’est alors Tibère qui prend le relais, mais l’empereur doit se résoudre à reporter la frontière à la gauche du Rhin.
Son règne est de plus en plus douloureux : à ses problèmes de santé s’ajoutent des conspirations (comme celle de Cinna, en 16-13 av-JC), et surtout des problèmes de succession. En effet, l'empereur Auguste, malgré plusieurs mariages (dont le dernier avec Livie), n’a toujours pas de fils. Il a adopté les fils d'Agrippa Caius et Lucius en 17 av-JC, mais les princeps juventutis meurent avant lui…Il finit par adopter son beau-fils Tibère, fils de Livie, en 4 apr-JC.
De plus, Auguste voit ses amis et compagnons mourir tous aussi avant lui : Agrippa, Mécène, ou Drusus. C’est donc presque seul qu’il s’éteint à son tour le 19 août 14 apr-JC ; il est divinisé la même année, comme il avait auparavant divinisé César. A la mort d'Auguste, Tibère, qui a épousé sa fille Julie, lui succède.
L'héritage de l'empereur Auguste
Les historiens, aussi bien anciens que modernes, ont porté des jugements variés sur Auguste. Certains ont condamné son impitoyable quête du pouvoir, en particulier son rôle dans la proscription à l’époque du triumvirat. D’autres, comme Tacite qui fait le procès du régime impérial, ont reconnu ses actions comme souverain.
Les historiens actuels critiquent parfois ses méthodes peu scrupuleuses et son style de gouvernement autoritaire, mais ils mettent en général à son crédit le fait d’avoir établi une administration efficiente, un gouvernement stable, et d’avoir ramené la sécurité et la prospérité dans ce qui va devenir l’Empire romain. Son autorité sur les provinces et son pouvoir militaire vont assurer la pax Romana, ou « paix romaine », dans un empire étendu sur toute la Méditerranée, l'Asie Mineure, et la quasi-totalité de l'Europe occidentale.
C'est durant le "siècle d'Auguste" que l'annaliste Tite-Live publiera son Histoire de Rome depuis sa fondation.
Bibliographie non exhaustive
- Auguste, biographie de Pierre Cosme. Perrin, 2005 (réédité chez Tempus en 2009).
- Auguste - Les ambiguïtés du pouvoir, de Frédéric Hurlet. Colin, 2015.
- Suétone, Vies des douze Césars. Folio, 2009.