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La manœuvre est judicieuse, car les hommes de Grigsby sont en train de craquer – Leroy Stafford récoltant au passage une blessure au pied – et la brigade Gorman avance à travers la ferme A. Poffenberger. Les deux brigades marchent à la rencontre l’une de l’autre et s’engagent mutuellement, mais l’issue du combat va se décider ailleurs. Le 34ème New York, le 125ème Pennsylvanie et leurs soutiens, seules forces nordistes couvrant la gauche de Sedgwick, sont submergés par l’arrivée de Barksdale et ne tardent pas à s’enfuir. Les Confédérés lancés à leur poursuite font alors irruption sur les arrières de la division fédérale, où leur feu fauche leurs ennemis en masse et sème le désordre. Napoleon Dana est touché à la jambe gauche, et John Sedgwick reçoit pas moins de trois balles au poignet, à la jambe et à l’épaule, mais ni l’un ni l’autre ne se font évacuer immédiatement – ils survivront tous les deux. Dana tente d’organiser tant bien que mal la défense de son flanc gauche, mais les brigades nordistes sont trop proches les unes des autres et se gênent pour manœuvrer.
Gorman tente d’y remédier de sa propre initiative en décalant sa brigade vers la droite, mais dans le tumulte, un seul de ses régiments reçoit son ordre. Sumner, qui galope partout pour encourager ses soldats flanqués, donne oralement à Oliver Howard l’ordre de faire face à l’attaque ennemie en réorientant sa brigade vers la gauche. Mais là encore, le fracas des coups de feu limite la compréhension : le bruit est si fort que Howard a compris davantage les gestes que la parole. Interprétant de travers les intentions de Sumner, il emmène sa brigade vers la droite en tournant le dos aux Confédérés, en dépit de l’opinion du colonel Joshua Owen, du 69ème Pennsylvanie, qui lui suggère de faire front dans l’autre sens. Dans son rapport, Howard atténuera la portée de ce mouvement en le réduisant à un « changement de position »… Aggravée par cette fausse manœuvre, la situation des Nordistes tourne à la débâcle. Sans Howard pour couvrir ses arrières, Dana n’a plus qu’à se retirer lui aussi, sous le feu infernal des Sudistes. La brigade Gorman recule aussitôt après.
1. La division McLaws arrive enfin sur la zone des combats.
2. Alors que la division tourne à gauche pour frapper le flanc de Sedgwick, Sanders emmène par erreur une partie de sa brigade vers la droite.
3. Parallèlement, la brigade Semmes est envoyée couvrir l'artillerie de Stuart.
4. Attaqué par Gorman, Grigsby recule.
5. Semmes et Gorman se rencontrent et s'affrontent dans la ferme A. Poffenberger.
6. Submergées, les maigres forces qui couvrent la gauche de Sedgwick craquent et s'enfuient.
7. Emmenée par Barksdale, la division McLaws s'abat sur le flanc et les arrières de Sedgwick.
8. Gorman tente de se décaler vers la droite pour permettre au reste de la division Sedgwick de se déployer face à l'assaillant, mais un seul de ses régiments exécute son ordre.
9. Suite à une erreur de compréhension, Howard envoie sa brigade vers la droite, et non vers la gauche, comme le lui a ordonné Sumner.
10. Incapable de faire face à McLaws, la division Sedgwick s'écroule et s'enfuit vers le bois Nord.
Ceux de la brigade Goodrich – les 60ème et 78ème New York – ont été emportés par la déroute de la division Sedgwick, si bien que la situation demeure préoccupante pour Sumner. La fougue de l’attaque sudiste conduit ce dernier à surestimer largement l’ennemi, et il craint que toute la droite nordiste ne soit submergée. À son tour, il fait demander par sémaphore des renforts à McClellan, demande auquel le chef de l’armée du Potomac répond en faisant traverser l’Antietam à la dernière division du IIème Corps, ainsi qu’aux éléments disponibles du VIème Corps. Parallèlement, Sumner ordonne au XIIème Corps de charger l’ennemi, pour ralentir sa progression et couvrir la retraite de Sedgwick. La division Williams s’exécute à travers le champ de maïs Miller, mais les choses tournent mal. Déjà diminuée de plusieurs détachements, la brigade Crawford est rapidement entraînée par les soldats de Sedgwick en déroute, et Crawford lui-même est blessé à la cuisse droite en tentant de la rallier.
George H. Gordon, quant à lui, parvient à préserver la cohésion de ses forces, pourtant elles-mêmes déjà diminuées de deux régiments trop éprouvés et laissés en soutien de batteries. Toutefois, regrouper les trois autres prend du temps et lorsque sa brigade atteint la partie occidentale du champ de maïs, il n’y a plus rien à soutenir : la division Sedgwick s’est réfugiée dans le bois Nord et au-delà, où ses officiers tentent de regrouper leurs hommes avec l’aide de ce qui reste du Ier Corps. Son attaque n’en a pas moins le mérite de soulager la pression exercée sur les forces qui, autour de la brigade Patrick et des hommes de Sully, tiennent toujours les abords de la ferme Miller. Contraint de faire face, Barksdale laisse deux de ses régiments sur sa gauche et emmène les deux autres à la rencontre de G.H. Gordon. Avec l’aide de G.T. Anderson, il finit par le repousser et le poursuit à travers le champ de maïs, jusqu’à menacer les batteries avancées nordistes. Gordon ayant pris la tête de la division après la blessure de Crawford, il est remplacé par Thomas Ruger, qui est lui-même blessé dans l’action.
1. Le 19ème Massachusetts et le 1er Minnesota parviennent à former une ligne de défense dans le bois Ouest et stoppent la brigade Early.
2. Attaqués de nouveau par la brigade Armistead, les deux régiments se replient.
3. Ils se reforment sur la ligne tenue par la brigade Patrick.
4. La division Williams est envoyée soutenir la division Sedgwick en pleine retraite, mais la brigade Crawford est rapidement prise dans la déroute.
5. Pour faire face à la division Williams, Barksdale emmène une partie de sa brigade et celle de G.T. Anderson vers la droite.
6. Les Sudistes affrontent G.H. Gordon dans le champ de maïs et l'obligent à reculer.
7. Un ordre impromptu ramène G.T. Anderson en arrière, obligeant Barksdale à se retirer du champ de maïs.
8. Patrick et les trois régiments rescapés de la division Sedgwick repoussent deux assauts confédérés.
9. Ils sont finalement flanqués par deux batteries sudistes (non figurées sur la carte) et par la brigade Semmes.
10. Les Fédéraux se replient sur le bois Nord, tenu par les restes de la division Doubleday.
11. La brigade Semmes occupe la ferme Miller, dont elle se retirera vers 10h45.
Pendant ce temps, Patrick et Sully continuent à s’accrocher au muret qui borde la grange Miller et ses meules de foin, au milieu de rochers qui constituent autant de retranchements naturels. Les Nordistes repoussent une première attaque contre leur gauche, puis une seconde contre leur droite. Les pertes confédérées sont sévères, et Lewis Armistead est blessé à la tête de sa brigade. C’est finalement la brigade Semmes qui réussit à tourner la droite nordiste, avec l’appui de deux batteries que Stuart a audacieusement fait avancer jusque sur Nicodemus Hill. Prise en enfilade, la ligne nordiste est intenable, et les tuniques bleues doivent se replier jusqu’au bois Nord. Les Confédérés s’emparent de la ferme Miller et y font quelques dizaines de prisonniers. Il est approximativement 10 heures. La division Sedgwick a été intégralement chassée du bois Ouest et mise hors de combat, avec pertes et fracas, en une demi-heure à peine. Elle y a laissé la moitié de ses effectifs. Les Sudistes ne pousseront pas plus loin. Eux aussi étrillés, ils resteront environ trois quarts d’heure sur leur position, mais celle-ci est trop exposée à l’artillerie nordiste, et Lee les fera replier dans le bois Ouest pour les mettre à l’abri.
La manœuvre est judicieuse, car Kershaw est en train d’être renforcé par la petite division de J.G. Walker, avec les brigades de Robert Ransom à gauche et Van Manning à droite. Les rapports de ces unités sur la bataille étant fragmentaires, le déroulement précis de l’attaque demeure incertain. Il semble que Manning se soit déployé sur la droite de Kershaw et que Ransom soit demeuré en réserve derrière celui-ci. Les Sudistes chargent avec impétuosité la batterie qui coiffe la hauteur derrière laquelle s’abrite la division Greene. Les canons nordistes leur adressent une, puis deux charges de mitraille, mais ils continuent sur leur lancée et s’approchent à une trentaine de mètres, commençant à abattre les artilleurs. Ces derniers doivent s’abriter. Greene donne alors le signal de la riposte : ses deux brigades – Tyndale à droite, Stainrook à gauche – se lèvent, avancent de quelques mètres, et déchargent à bout portant une salve meurtrière.
1. Greene attaque sur l'ordre de Sumner mais se ravise aussitôt pour laisser venir les Confédérés.
2. La division J.G. Walker arrive en soutien de Kershaw.
3. Les Confédérés assaillent la hauteur tenue par Greene, mais sont repoussés par un feu nourri à bout portant.
4. La brigade Manning se désagrège : le 46ème Caroline du Nord rejoint les forces de Kershaw...
5. ... tandis que le colonel Cooke rallie le 27ème Caroline du Nord et le 3ème Arkansas...
6. ... et que le reste de la brigade s'enfuit.
Le feu nordiste est d’autant plus nourri que dans l’intervalle, les hommes de Greene ont pu être ravitaillés en munitions. Presque vides, les cartouchières – qui peuvent porter quarante coups – ont été remises à plein, ainsi que les poches, dans lesquelles les soldats ont fourré un surplus de vingt cartouches. Les Confédérés sont abattus en masse : « Si terrifiant était notre feu que l’ennemi tombait comme l’herbe sous la faux » écrira le major Orrin Crane, du 9ème régiment de l’Ohio. Dans la brigade Kershaw, le 7ème Caroline du Sud est décimé, les préposés au drapeau sont tous abattus, et le drapeau lui-même est perdu car sa hampe a été brisée par les balles. La brigade bat en retraite. Celle de Manning connaît un
Greene ne les poursuit pas dans cette direction. Dès que l’ennemi a craqué, sa division a mis baïonnette au canon et s’est mise à progresser vers l’ouest, en direction de l’église. Elle attaque bientôt la lisière du bois Ouest, où Kershaw tente de rallier ses hommes. Sa résistance sera brève, car il n’y trouve aucun soutien pour venir à son aide : il semble qu’à ce moment la brigade Ransom ait déjà été retirée pour une raison non spécifiée – peut-être envoyée vers la gauche pour venir en aide aux unités engagées autour de la ferme Miller. Greene s’empare ainsi de toute la partie orientale du bois Ouest, puis s’arrête, car sa progression l’a laissé excessivement avancé par rapport au reste des positions sudistes. Qui plus est, il a dû laisser une partie de ses forces en soutien des canons qui garnissent encore sa position précédente, et Sumner, toujours préoccupé par la situation globale de l’aile droite nordiste, n’autorise G.H. Gordon à lui envoyer des renforts qu’au compte-gouttes : le 13ème New Jersey, le 27ème Indiana, et pour finir la légion Purnell.
1. La division Greene passe à l'attaque et s'empare des abords de l'église Dunker.
2. Sumner lui envoie trois régiments en renforts.
3. Kershaw et les régiments qui l'ont rejoint se replient à l'ouest du bois.
4. Les deux brigades de la division Hood se déploient de manière à rassembler autant de fuyards que possible sur les arrières sudistes.
5. Le reste des forces sudistes engagées contre Sedgwick reculent pour se mettre sur la défensive.
Côté sudiste, on n’a plus guère de réserves à lancer en avant dans l’espoir de reprendre le terrain perdu. Les brigades qui ont combattu dans le bois Ouest et autour de la ferme Miller ont été très éprouvées et leurs effectifs ont fondu. Certaines sont à ce point éclaircies qu’elles ne permettent même pas de tenir un front continu. Seule celle de Ransom n’a, semble-t-il, pas été trop durement engagée, mais elle est insuffisante, à elle seule, pour monter une contre-attaque. Les Confédérés se contentent donc de tenir une ligne discontinue, orientée globalement vers l’est, en attendant d’hypothétiques renforts que l’arrivée future d’A.P. Hill, ou l’évolution de la situation dans les autres parties du champ de bataille, permettraient d’envoyer vers l’aile gauche de l’armée de Virginie septentrionale. En résumé, aucun des deux camps ne se sent en mesure de continuer ses attaques, de sorte qu’à partir de 10 heures 30, la situation dans ce secteur devient stable pour la première fois depuis cinq heures de temps.
Un peu plus tôt, alors que les brigades de Colquitt, Ripley et McRae affrontent le XIIème Corps dans le champ de maïs et le bois Est, D.H. Hill envoie à leur soutien la brigade de Robert Rodes, constituée de cinq régiments de l’Alabama. Toutefois, lorsque Rodes entame sa marche vers le bois Est, les trois brigades susmentionnées sont déjà en pleine retraite, et il n’est rien qu’il puisse faire pour les secourir, excepté mettre en place une bonne position défensive sur laquelle les unités en déroute pourront se reformer. Or, Rodes a justement une telle position devant lui : il s’agit d’un modeste chemin vicinal, bordé de clôtures, qui court d’ouest en est – et fait donc face au nord – avant de s’infléchir légèrement vers l’est-sud-est, puis le sud – tout en marquant plusieurs zigzags. Ce chemin relie la route à péage de Hagerstown, qu’elle quitte au sud de l’église Dunker, à celle de Boonsboro, qu’elle rejoint à quelques encablures à l’est de Sharpsburg, face au pont médian.
Rodes s’y installe sans doute aux environs de 9 heures, envoyant ses tirailleurs en avant jusqu’à la ferme Roulette. Ses hommes commencent aussitôt à démanteler les barrières qui bordent le chemin pour en faire un talus improvisé. Alfred Colquitt parvient à rallier les restes de sa brigade sur sa gauche, prenant appui sur Bloody Lane. Avec l’arrivée en cours de la division R.H. Anderson, D.H. Hill peut même envisager de former là une ligne de défense continue. Il poste donc sa dernière brigade, commandée par George Burgwyn Anderson et qui comprend quatre régiments de Caroline du Nord, à droite de celle de Rodes. Dans le même temps, les éléments de la brigade Sanders qui ont suivi leur chef et se sont retrouvés séparés du reste de la division McLaws se sont placés sur la gauche de Colquitt, prolongeant la ligne de bataille sudiste jusqu’à la route de Hagerstown, au-delà de laquelle se regroupent les restes de la brigade Ripley. À peine quelques minutes plus tard, les combats pour Bloody Lane commencent. Ils vont durer près de quatre heures.
Vers 9 heures 30, la division French se déploie, comme celle de Sedgwick, en trois lignes de batailles successives, et commence à gravir la pente qui mène au chemin creux. En tête, la brigade Weber chasse d’abord les piquets sudistes de la ferme Roulette, puis marche sur une batterie que les Confédérés ont déployée en avant de la brigade Rodes et l’oblige à se replier. Décrire les combats qui ont lieu ensuite demeure encore aujourd’hui un exercice difficile pour l’historien, car on est confronté au manque de sources. Le nombre élevé d’officiers supérieurs tués ou blessés a sensiblement perturbé la chaîne de commandement, et beaucoup d’entre eux n’ont pas écrit de rapport après la bataille. On ne dispose ainsi que d’un seul document de ce genre pour la brigade Weber, et dans le camp adverse, un unique rapport nous est resté pour toute la division R.H. Anderson. Préciser l’action de ces unités durant le combat n’est donc possible que de manière incertaine, en s’appuyant sur les mentions qui en sont faites dans d’autres unités, et ces sources indirectes sont parfois contradictoires.
Il est ainsi très difficile de déterminer à quel moment la division R.H. Anderson est arrivée en soutien des hommes de D.H. Hill. Le fait qu’elle suivait immédiatement celle de McLaws, engagée peu après 9 heures 30 dans le bois Ouest, laisse supposer qu’elle soit parvenue à la hauteur de Bloody Lane peu de temps après, au moment où l’attaque de French commençait ou dans les minutes qui suivirent. Certains récits confédérés, cependant, laissent entendre une entrée en action beaucoup plus tardive… mais celle-ci n’expliquerait pas pourquoi les officiers de la division French décrivent bel et bien deux lignes d’infanterie sudiste le long de Bloody Lane. Les seules brigades de Rodes et G.B. Anderson n’avaient sans doute pas assez de soldats pour doubler leur ligne sur une longueur de plus de 500 mètres, sachant qu’il faut compter quatre hommes au mètre pour former une ligne de bataille – et donc huit si on la double. Il est donc raisonnable de penser qu’au moment où Weber lance son attaque, une première brigade – sans doute celle de Roger Pryor – vient d’arriver pour se placer derrière Rodes. Par la suite Carnot Posey viendra faire de même avec G.B. Anderson, et Ambrose Wright prolongera la ligne sudiste vers la droite. Les deux autres brigades de R.H. Anderson, commandées par William Parham et Alfred Cumming, se placeront probablement en réserve.
L’incertitude est également renforcée par les grandes disparités des heures données – lorsqu’elles le sont. Une fois engagé au combat, le commandant d’une unité a généralement mieux à faire que de regarder sa montre, a fortiori de noter l’heure. Cette dernière est donc le plus souvent estimée, avec une assez grande marge d’erreur. D’autant que les progrès récents de la psychologie cognitive en général, et de la psychologie du combat en particulier, tendent à montrer qu’une personne, prise ou même engagée activement dans une fusillade – situation stressante s’il en est – se voit affectée de nombreux dysfonctionnements perceptifs et mémoriels. Ces effets incluent notamment une altération de la perception du temps, majoritairement dans le sens d’une surestimation des durées écoulées. Des confusions, omissions et trous de mémoire peuvent survenir, voire même, dans certains cas, des faux souvenirs. On comprend donc d’autant mieux les divergences qui peuvent apparaître d’une source à l’autre, et la difficulté qu’il peut y avoir à tenter de tirer de ces récits un déroulement clair des événements, un siècle et demi après les faits. L’exposé qui suit ne saurait donc avoir la prétention d’être exact, surtout pas à la minute près.
1. La division French vient se placer à gauche de la division Greene (non figurée sur la carte, mais engagée dans le bois Ouest autour de l'église Dunker), et repousse les tirailleurs sudistes qui tiennt la ferme Roulette.
2. La division R.H. Anderson arrive et se déploie derrière les forces de D.H. Hill qui tiennt le chemin creux.
3. Weber attaque Rodes mais le 5ème Maryland s'enfuit.
4. Le 14ème Connecticut monte en ligne pour colmater la brèche et renouveler l'attaque.
5. La brigade Morris avance mais tire dans le dos des hommes de Weber.
6. La brigade Weber lance au moins deux assauts infructueux.
La brigade Weber est accueillie par le feu concentré de Rodes et de ses soutiens dès qu’elle franchit la ligne de crête, mais elle continue à avancer jusqu’à une vingtaine de mètres de l’ennemi avant d’ouvrir le feu. Elle charge aussitôt, mais l’intensité du feu sudiste sème la confusion dans ses rangs. En son centre, le 5ème régiment du Maryland panique et
Ce plan, à l’évidence, n’a pas fonctionné comme prévu. Confronté à la brèche ouverte dans sa ligne par la fuite du 5ème Maryland, Andrews appelle de sa propre initiative Morris à son secours. Ce dernier lui envoie le 14ème Connecticut, que ses officiers sont parvenus à rallier. Le reste de la brigade Morris avance également, mais les deux régiments restants s’arrêtent juste en arrière de la ligne de crête et commencent à faire feu sur les positions confédérées de loin, tirant au passage dans le dos des hommes de Weber. Ceux-ci, après un premier moment de flottement, recommencent à avancer, sans pour autant parvenir à éjecter les Confédérés de leur position. Les récits des deux camps semblent s’accorder sur le fait que les forces d’Andrews – le 14ème Connecticut et les deux régiments restants de la brigade Weber, soit les 1er Delaware et 4ème New York – ont ainsi lancé deux assauts, peut-être trois. Elles souffrent terriblement de la fusillade, le lieutenant-colonel Sanford Perkins, du 14ème Connecticut, rapportant que « Notre drapeau est criblé par les balles et les obus, et sa hampe est brisée. » Pourtant, malgré quelques fléchissements passagers, les Nordistes réussissent à chaque fois à se ressaisir, maintenant la pression sur leurs adversaires.
Face à l’acharnement d’Andrews et de ses soldats, les Sudistes ne restent pas inactifs. Rodes, en premier lieu, tente d’abord de tirer parti de la confusion que le retrait du 5ème Maryland et la blessure de Weber ont provoquée dans les rangs fédéraux. Il s’efforce d’organiser une contre-attaque pour déborder la droite des lignes nordistes, qui ne s’étendent pas jusqu’à la route à péage de Hagerstown. Rodes peine cependant à obtenir du soutien. À sa gauche, Colquitt ne s’avance pas assez, se contentant semble-t-il de couvrir le flanc de la brigade Rodes avec une ligne de tirailleurs. Sur sa droite, le 6ème régiment de l’Alabama, commandé par John Brown Gordon – que D.H. Hill surnomme « le chevalier Bayard de l’armée » en raison de sa propension à faire étalage de sa bravoure sous le feu ennemi – n’a pas reçu son ordre d’attaquer. Enfin, la brigade Pryor, derrière lui, ne l’a pas suivi.
Il y a une bonne raison à cela. Quelques minutes après avoir signifié à D.H. Hill qu’il mettait sa division à sa disposition, R.H. Anderson est atteint à la cuisse par un éclat d’obus et doit être évacué. L’officier suivant dans la chaîne de commandement étant justement Pryor, il paraît vraisemblable que ce dernier n’est pas avec sa brigade au moment de l’attaque de Rodes, étant allé prendre le commandement de la division. Le colonel John Hately, qui lui succède à la tête de la brigade, n’a probablement pas reçu de consignes autres que celles de soutenir les défenseurs de Bloody Lane. Faute de support, donc, et confronté à l’avancée du 14ème Connecticut, Rodes doit bientôt interrompre sa manœuvre et revenir sur sa position de départ, suivi de près par Andrews. Ce sont même les Alabamiens qui se retrouvent momentanément en difficulté, car leur chef a du mal à les faire rester dans le chemin creux et doit s’employer pour les empêcher de reculer davantage. Il y parviendra.
À sa droite, G.B. Anderson va lui aussi tenter de flanquer la division French, cette fois par la gauche. Mais cette tentative n’est pas coordonnée à celle de Rodes, comme si G.B. Anderson menait une bataille, et Rodes une autre. Jusque-là, la brigade de Caroline du Nord a été peu engagée, si ce n’est à distance par la gauche de Weber et, derrière lui, la brigade Morris. Son chef la lance en avant alors que, selon toute vraisemblance, Rodes a déjà été rejeté sur sa position initiale. French la contre aussitôt en envoyant à sa rencontre la brigade Kimball. Les deux unités s’affrontent de part et d’autre d’un petit ravin, quasiment perpendiculaire à Bloody Lane, dans lequel court le chemin qui mène à la ferme Roulette. Kimball coupe court à une tentative pour déborder sa gauche en étendant ses lignes dans cette direction. Là aussi, une fusillade sans merci a lieu a parfois quelques mètres de distance seulement. Après la bataille, en examinant leur drapeau, les hommes de 8ème Ohio, un des régiments de Kimball, y trouveront pas moins de dix-sept impacts de balles. Le 132ème Pennsylvanie, pour sa part, perd son colonel au bout de quelques minutes, et laissera dans l’affrontement la moitié de ses hommes. Sumner comparera plus tard la solidité de la brigade Kimball au Rocher de Gibraltar, ce qui lui vaudra le surnom de Gibraltar Brigade.
1. Rodes lance une contre-attaque contre Weber.
2. Colquitt le soutient faiblement en déployant des tirailleurs sur sa gauche.
3. Le 6ème Alabama n'attaque pas et Pryor ne soutient pas Rodes.
4. La brigade Weber se décale vers la droite pour faire face à l'attaque de Rodes.
5. Sans soutien, Rodes doit se replier.
6. Pendant ce temps, le reste de la brigade Morris a été ramenée en arrière.
7. G.B. Anderson lance à son tour une attaque, cette fois contre la gauche de French.
8. French y pare en engageant la brigade Kimball.
9. G.B. Anderson est blessé et sa brigade recule.
10. Kimball poursuit les Sudistes et attaque Bloody Lane à son tour.
11. La brigade G.B. Anderson lance une nouvelle contre-attaque mais celle-ci tourne court à l'approche de renforts nordistes.
La brigade Meagher comprend quatre régiments, dont trois de l’État de New York – 63ème, 69ème et 88ème – sont effectivement constitués d’immigrants irlandais, contrairement au quatrième, attaché temporairement à la brigade, le 29ème Massachusetts. Les soldats nordistes sont gênés dans leur progression par une barrière, 300 mètres en avant de Bloody Lane, où des tireurs sudistes isolés leur causent des pertes. Une fois l’obstacle passé, les Fédéraux avancent jusqu’à cinquante mètres des lignes confédérées. Malgré l’épreuve qui les attend, leur moral reste au zénith. Meagher : « En arrivant à ce contact proche et fatal avec l’ennemi, les officiers et soldats de la brigade brandirent leurs épées et leurs képis, en poussant les hourrahs les plus enthousiastes pour leur général, George B. McClellan, et pour l’armée du Potomac ». Le chef de l’Irish Brigade lui ordonne de mettre baïonnette au canon, puis de tirer deux salves avant de charger.
Vacillante pendant quelques minutes, la brigade réussit à se regrouper autour du 29ème Massachusetts et surtout du 88ème New York. Ce dernier gagnera l’admiration de Richardson qui leur lancera « Bravo, le 88ème, je ne vous oublierai jamais », déclenchant l’enthousiasme dans ses rangs pourtant dramatiquement éclaircis. Les Nordistes continuent alors à échanger salve sur salve avec leurs adversaires, subissant des pertes énormes. L’Irish Brigade perdra à Antietam 540 hommes dont 113 tués, soit près de 60% de son effectif initial. Les soldats nordistes passent ainsi près d’une heure exposés au feu ennemi. Dans de telles conditions, porter un objet aussi voyant et facile à ajuster qu’un drapeau devient l’assurance d’une réduction drastique de son espérance de vie. Le 63ème New York voit ainsi seize hommes se succéder à la garde de son étendard, tous étant abattus au bout de quelques minutes, voire de quelques secondes. Pourtant, les Fédéraux tiennent bon, ramassant – comme les autres combattants depuis le début de la bataille – les cartouches des morts et des blessés pour continuer à tirer.
1. French consolide sa droite en mélangeant des éléments des brigades Weber et Morris.
2. La division Richardson entre en action, repoussant les tirailleurs confédérés devant elle.
3. La brigade Meagher attaque la première.
4. Elle reçoit le soutien d'une partie de la brigade Kimball.
5. Le 29ème Massachusetts stoppe prématurément son avance, disloquant la brigade.
6. Resté sans soutien, le 88ème New York doit interrompre sa charge.
7. La brigade Meagher se ressaisit et maintient la pression, prenant notamment en enfilade la droite de Rodes.
En dépit de la meilleure position des Confédérés, le feu nordiste n’est pas dénué d’efficacité. Le problème est particulièrement aigu à la jonction des brigades Rodes et G.B. Anderson, car Bloody Lane y forme un virage. La brigade Meagher affrontant les hommes de G.B. Anderson sur une ligne parallèle à la leur, ce qui signifie que la position tenue
Dans les minutes qui suivent, l’officier sudiste est encore frappé plus haut sur la même jambe, puis au bras et à l’épaule gauche. Finalement, un dernier projectile lui fracasse le visage, entrant par la joue gauche et sortant par la mâchoire. Tombé face contre terre, il ne doit qu’à son képi, préalablement troué par une autre balle, de ne pas se noyer dans son propre sang, qui s’écoule par l’orifice ainsi ménagé. Le colonel sudiste survivra – et mènera une brillante carrière militaire jusqu’à la fin du conflit – mais restera défiguré. Pratiquement aucun de ses portraits photographiques ultérieurs ne montrera son profil gauche, les rares clichés pris de trois-quarts face laissant deviner une spectaculaire cicatrice sur la joue où l’avait frappé la balle nordiste. Ses soldats, pourtant, résisteront à cette fusillade, dont l’intensité finit par décroître. Même en fouillant les cadavres, les hommes de Meagher commencent à manquer de cartouches. Ils sont engagés depuis près d’une heure et n’ont reçu aucune aide de la part du reste de la division. Informé de la situation, Richardson ordonne qu’ils soient relevés par la brigade Caldwell, et que l’attaque contre la droite rebelle soit renouvelée.
Jusque-là, la brigade Caldwell est restée étrangement inactive. Déployée à gauche et légèrement en retrait de celle de Meagher, sur une ligne parallèle à la sienne, elle est pourtant idéalement placée pour menacer la droite sudiste et tenter de la tourner. Elle n’en fait rien, se contentant d’échanger des coups de feu avec des tireurs avancés ennemis pendant que l’Irish Brigade attaque seule la position confédérée. Son inaction est tellement surprenante que Richardson finit par s’impatienter. Une rumeur court sur le champ de bataille, selon laquelle Caldwell serait parti en arrière « se cacher derrière une meule de foin ». Le fait demeure encore incertain aujourd’hui. Dans son rapport sur la bataille, Caldwell décrit l’action de sa brigade comme s’il avait été présent du début à la fin, mais se fait beaucoup plus détaillé à partir d’un moment précis – alors que la brigade est déjà engagée depuis un certain temps. Du reste, l’examen minutieux des différents récits sur la brigade Caldwell montre qu’à l’évidence, ses actions ont dû bien davantage aux initiatives de certains de ses officiers plutôt qu’aux ordres de Caldwell. On peut raisonnablement penser que Caldwell a été absent au début de l’engagement, pour une cause indéterminée n’ayant pas forcément de rapport avec la rumeur ayant couru sur son compte, avant de rejoindre son unité plus tard.
Toujours est-il que, sans doute vers 11 heures 45, la brigade de Caldwell relève celle de Meagher par une manœuvre impeccable : la première se décale vers la droite en conservant son déploiement et vient se placer en arrière de la seconde, qui décroche alors, compagnie après compagnie, « comme à la parade » – pour reprendre l’expression employée par un témoin oculaire. Aussitôt après, les troupes fraîches de l’Union avancent et ouvrent le feu à leur tour. Le récit de la bataille devient alors complexe, car les événements, dans les minutes qui suivent, s’accélèrent dramatiquement – non seulement sur Bloody Lane, mais également dans le bois Ouest. La situation va évoluer de minute en minute, et situer dans le temps une action par rapport à une autre devient pratiquement impossible. Les divergences des témoignages sont parfois grandes, le général Greene situant par exemple beaucoup plus tard la reprise des combats autour de l’église Dunker, aux alentours de 13 heures 30. Néanmoins, la majorité des rapports concordent pour affirmer que les deux actions à venir ont été simultanées et livrées autour de midi. C’est, du reste, plus cohérent avec les durées indiquées par Greene, qui affirme avoir tenu les environs de l’église pendant « près de deux heures ». Or, on est à peu près certain qu’il s’en était emparé peu après 10 heures.
1. J.G. Walker attaque Greene avec le soutien de Barksdale et Early.
2. Pris en enfilade, le 111ème Pennsylvanie craque le premier.
3. La brèche ainsi créée provoque la retraite de toute la division Greene.
4. Ayant épuisé leurs munitions, les batteries avancées nordistes se replient également avec leurs soutiens.
5. Les Nordistes se retirent vers le bois Est, tandis que leurs ennemis menacent la droite de French.
En cette fin de matinée, James Longstreet est très inquiet de la situation générale des lignes confédérées. Celles-ci sont très étirées en raison de la présence de Greene autour de l’église Dunker, et le général sudiste craint que la position avancée des Fédéraux dans ce secteur ne leur permette d’ouvrir une brèche au cas où ils recevraient des renforts. N’ayant aucune profondeur, le dispositif confédéré serait à coup sûr irrémédiablement enfoncé. Longstreet décide donc de prendre les devants, bien qu’il n’ait aucune troupe fraîche à laquelle confier cette mission. À défaut, il charge la division J.G. Walker, à présent suffisamment réorganisée, de déloger Greene du bois Ouest. La brigade Ransom, qui a été assez peu
Leur tâche va être facilitée par le déploiement même de la division Greene. Très avancées et privées de soutien d’infanterie comme d’artillerie, ses deux brigades forment toujours un chevron pour éviter d’être flanquées, et forment pratiquement un angle droit. Celle de Stainrook fait face au sud et se trouve en partie à découvert, celle de Tyndale à l’ouest, en plein milieu du bois. Cet angle constitue un point vulnérable s’il est convenablement assailli, car les deux unités ne peuvent correctement se soutenir l’une l’autre. Constamment harcelés par les tireurs confédérés qui s’abritent derrière les rochers du bois Ouest ou les ajustent depuis les hauteurs au sud, les soldats nordistes sont à présent assaillis en force. Pendant que Ransom frappe Tyndale de front, les régiments combinés de Hall et Cooke attaquent à la jonction des deux brigades nordistes. Dans le même temps, Barksdale déborde la droite de la division fédérale. Très rapidement, les deux ailes de la brigade Tyndale craquent : la droite recule et sur la gauche, le 28ème Pennsylvanie se débande, entraînant dans sa fuite le 111ème régiment du même État qui forme la droite de Stainrook. Tyndale est grièvement blessé à la tête et à l’abdomen, et la division Greene doit abandonner complètement sa position.
Le « cri des rebelles » retentit une fois de plus alors que les soldats fédéraux refluent du bois Ouest, au-delà de l’église Dunker. Les Confédérés assaillent alors la hauteur située à l’est de cette dernière, où les canons du capitaine John Tompkins et le 102ème New York tentent de les ralentir en les accablant de plomb. Mais les caissons à munitions sont vides. La batterie Tompkins a tiré ses 1.050 projectiles de tous types en trois heures seulement, ce qui implique un feu quasiment continu durant ce laps de temps – 175 coups par pièce en 180 minutes. Après la bataille, ses canons Parrott de 10 livres seront à ce point ruinés par cet usage intensif qu’ils devront être mis au rebut, la batterie recevant des pièces neuves – des canons de 3 pouces. Toujours est-il que faute de munitions pour continuer à se battre, les artilleurs nordistes doivent évacuer la place, laissant sur le terrain dix-neuf hommes et dix chevaux tués ou blessés. Naturellement, le 102ème New York, qui les soutenait, ne s’attarde pas non plus, seul face à la marée grise.
Bien que n’ayant pas démérité – elle a été une des unités nordistes les plus longuement engagées au cours de la bataille – compte tenu de l’inexpérience de la majorité de ses soldats, la division Greene est cette fois hors de combat pour de bon. Elle se réfugie, plus ou moins en bon ordre, sous la protection d’autres batteries situées au-delà de la ferme Mumma et en lisière du bois Est. Le résultat de l’attaque sudiste dépasse toutes les espérances de Longstreet. Non seulement la menace Greene est éliminée, mais ce sont à présent les lignes nordistes qui présentent une brèche conséquente. Emportés par leur élan, les hommes de J.G. Walker et leurs soutiens, auxquels se joint la brigade Sanders, s’y engouffrent avec enthousiasme, menaçant de déboucher sur les arrières de la division French déjà engagée sur Bloody Lane. Alors que les éléments de pointe des Confédérés approchent dangereusement de la ferme Roulette, c’est tout le centre nordiste qui voit sa situation compromise.
1. Continuant sur sa lancée, J.G. Walker menace de prendre à revers la division French.
2. French envoie l'aile droite de la brigade Kimball pour protéger sa droite.
3. Le colonel Frank emmène deux régiments, auxquels Richardson en ajoute un troisième, pour contrer la progression sudiste vers la ferme Roulette.
4. La brigade Sanders soutient J.G. Walker sur sa droite.
5. French envoie également des éléments de la brigade Morris vers la ferme Roulette.
6. Les Nordistes réussissent à refouler les assaillants.
7. Parallèlement, la brigade Irwin flanque Barksdale et Early et les oblige à reculer.
8. La brigade Brooks est envoyée complètement sur la droite, empêchant W.F. Smith d'exploiter le succès d'Irwin.
9. Irwin doit stopper sa progression au niveau de la hauteur qui domine l'église Dunker.
Malheureusement, Carter manque d’hommes pour servir toutes ses pièces, tant et si bien que Longstreet doit lui envoyer ses aides de camp pour l’aider dans cette tâche pendant que lui-même tient leurs chevaux par la bride. Connaissant la propension de Longstreet à se mettre en avant, l’anecdote, qu’il rapporte dans ses mémoires, aurait pu être apocryphe, mais elle est corroborée par d’autres récits, de surcroît contemporains des événements. Cela ne l’empêchera pas d’attribuer à cette action – et à celle du 27ème Caroline du Nord, dont les dernières salves font vaciller momentanément les Nordistes – tout le mérite d’avoir stoppé la progression d’Irwin, ce qui n’est au mieux, comme on l’a vu, qu’une vision partielle – et, dans ce cas précis, partiale – de la réalité. C’est, du reste, une constante dans les rapports d’officiers, ces derniers justifiant plus volontiers le repli de leur unité par le manque de munitions ou l’absence de soutien que par l’action directe de l’ennemi. Dans un camp comme dans l’autre, ce genre d’euphémisme est, dira-t-on sans mauvais jeu de mots, de bonne guerre.
Cette dernière vision des événements est basée principalement sur le rapport de D.H. Hill, lui-même reposant en substance sur celui de Robert Rodes. Alors que la division J.G. Walker est engagée autour de la ferme Roulette, Rodes est atteint par des éclats d’obus. Craignant d’être sérieusement touché, il se retire pour se faire soigner, mais l’examen de ses blessures révèle qu’elles sont en réalité superficielles. Dans l’intervalle, le lieutenant-colonel James Lightfoot, qui a succédé à John B. Gordon à la tête du 6ème Alabama, est confronté de nouveau à un tir d’enfilade meurtrier qui vient de sa droite. En l’absence de son supérieur direct, ce jeune officier d’à peine 23 ans sollicite de D.H. Hill l’autorisation de faire manœuvrer son régiment de manière ce qu’il fasse front dans la direction d’où proviennent les tirs, et l’obtient. Toutefois, l’ordre transmis aux soldats par les officiers a été compris par erreur « face about » – « demi-tour » – et le régiment commence à reculer au lieu de simplement se replacer. Interpellé par ce mouvement inattendu, un officier d’un régiment voisin demande alors à Lightfoot si l’ordre est valable pour toute la brigade, et ce dernier – peut-être occupé à donner des contrordres pour rectifier le placement de ses troupes – répond par l’affirmative, si bien que toute la brigade se met à décrocher. Lorsque Rodes revient auprès de ses hommes, le retrait s’est transformé en déroute et il n’y a plus rien qui puisse être fait pour ramener la brigade sur sa position initiale.
1. La division Hood, envoyée se positionner autour de l'église Dunker, prend la brigade Irwin en enfilade.
2. Servie par l'état-major de Longstreet, la batterie Carter concentre son feu sur Irwin.
3. Le 27ème Caroline du Nord contre-attaque avec ses dernières cartouches. Accablée et sans soutien, la brigade Irwin se met sur la défensive.
4. Pendant ce temps, la brigade Caldwell attaque Bloody Lane.
5. La brigade Wright, la plus exposée, craque la première.
6. Son repli entraîne celui d'une partie de la brigade G.B. Anderson, qui craint d'être débordée.
7. Ce recul permet à Barlow de positionner ses deux régiments de manière à prendre le reste de la ligne confédérée en enfilade.
8. Pour y faire face, le 6ème Alabama manoeuvre, mais l'ordre est mal compris et toute la brigade Rodes recule.
9. La deuxième ligne sudistes tente d'enrayer la retraite, mais elle est emportée à son tour dans la débâcle.
10. Des unités éparses de la division French appuient l'attaque de Caldwell.
11. La position confédérée sur Bloody Lane s'effondre, entraînant avec elles les réserves sudistes. Les éléments confédérés qui n'ont pas fui se rendent aux Nordistes.
Dès lors, il devient possible de déterminer un enchaînement plausible aux événements. Sa droite moins protégée martelée par le feu nordiste, Wright est blessé et ses hommes commencent à reculer. Leur repli découvre la droite de G.B. Anderson ce qui affecte autant leur position que leur moral. En effet, le capitaine Andrew Griffith, du 14ème Caroline du Nord, rapporte avoir dû battre en retraite sur l’information que l’ennemi était passé dans le dos des Confédérés. La brigade G.B. Anderson commence alors à s’effondrer, de manière inégale car certains détachements – notamment sur la droite de la brigade – continuent à résister. La brigade Caldwell est prompte à exploiter cette situation, profitant des brèches ainsi ouvertes. Le colonel Francis Barlow, qui exerce le commandement combiné de deux régiments de l’État de New York – le 61ème et le 64ème – et dirige de ce fait l’aile droite de la brigade nordiste, fait manœuvrer ses hommes de sa propre initiative, de manière à prendre en enfilade la position ennemie. L’effet de son feu concentré est quasi immédiat, transformant Bloody Lane en piège mortel. Frappant latéralement, les balles qui manquent leur cible ricochent sur les talus du chemin creux et font mouche en deuxième intention, fracassant qui une jambe, qui une cheville, qui un pied sudistes. C’est sans doute en voulant faire face à cette tempête de plomb que Lightfoot a commis sa bévue.
Des éléments des brigades Pryor et Posey sont lancés en avant pour colmater les brèches dans la ligne sudiste, mais ils ne tiennent pas plus de quelques minutes face aux Nordistes qui les fusillent à bout portant, et à la peur plus ou moins déraisonnable d’être tournés – rien n’indique en effet qu’à ce moment, les hommes de Caldwell soient déjà en train de poursuivre la brigade Wright en fuite. La panique et la confusion s’installent, le retrait inopiné de la brigade Rodes ne faisant qu’aggraver la situation. Les groupes de soldats sudistes qui tentent de résister se font massacrer, à tel point que Barlow finit par ordonner à ses deux régiments de cesser le feu pendant que son second, le lieutenant-colonel Nelson Miles – sans parenté avec le vaincu d’Harper’s Ferry – somme les Confédérés de se rendre. Ces derniers obtempèrent, laissant Barlow maître de Bloody Lane. Les Nordistes feront à cette occasion 400 prisonniers et s’empareront de deux drapeaux – maigres consolations symboliques aux lourdes pertes qu’ils subissent. Leur prestation d’Antietam vaudra à Barlow et à Miles de poursuivre tous les deux une brillante carrière d’officiers, mais pour eux, la journée n’est pas encore terminée.
De son côté, D.H. Hill a bien tenté de renverser la vapeur en jetant dans la bataille ses dernières réserves – les brigades de William Parham et Alfred Cumming – mais elles ont vite été noyées dans le flot des soldats déconfits qui refluent à travers les terres de la ferme Piper et sont incapables d’opposer une résistance sérieuse. Pour ne rien arranger, ses officiers tombent les uns après les autres. Cumming est blessé, de même que John Hately qui avait remplacé Roger Pryor à la tête de sa brigade, et Robert H. Jones qui avait pris la succession de Wright. Il est approximativement 12 heures 30 et l’évidence s’impose : le centre confédéré est en passe d’être complètement enfoncé. Le seul espoir de D.H. Hill réside dans la capacité de ses officiers et serre-files à rallier au moins une partie de leurs forces le long du chemin qui mène de la route à péage de Hagerstown à la ferme Piper, où un petit mur de pierres offre une bonne protection. Le général sudiste peut toutefois compter sur la brigade Sanders, qui s’accroche à sa position le long de la route de Hagerstown, et sur la batterie Miller, que le bataillon de la Washington Artillery vient de lui envoyer en soutien rapproché.
1. Les régiments de la division French qui accompagnent Caldwell s'arrêtent, laissant vulnérable la droite des Nordistes.
2. La brigade Sanders réussit à maintenir sa cohésion, tenant à distance les régiments de la brigade Brooke que commande le colonel Frank.
3. Alors que la résistance sudiste se ressaisit, le 7ème New York panique momentanément avant d'être rallié par Caldwell.
4. D.H. Hill tente d'exploiter la situation en flanquant les Nordistes avec les restes de la brigade Rodes.
5. Le colonel Barlow déjoue son attaque, l'obligeant à se retirer.
6. Richardson engage le reste de la brigade Brooke pour colmater la brèche que la manoeuvre de Barlow a ouverte dans la ligne nordiste.
7. Une tentative sudiste pour flanquer la gauche nordiste est prise de vitesse par le colonel Cross avec deux régiments.
8. D.H. Hill rassemble ses dernières forces dans une attaque frontale dans le verger Piper, mais Barlow fait face avec le soutien de Brooke.
9. Peut-être échaudé par les multiples contre-attaques ennemies, Richardson ordonne à ses forces de reculer sur une position plus sûre. Il est mortellement blessé peu après.
L’action de Barlow ayant ouvert une brèche dans la ligne nordiste, Richardson, qui suit toujours de près la progression de sa division, s’empresse d’y envoyer ses dernières réserves, en l’occurrence les 57ème et 66ème New York, de la brigade Brooke. Alors que les Nordistes sont en passe de sortir du champ de maïs, leurs ennemis déclenchent une nouvelle contre-attaque destinée à les flanquer, cette fois par la gauche. Les forces sudistes, qui comprennent notamment des survivants des brigades G.B. Anderson et McRae, progressent au pas de course vers une élévation située au coin sud-est du champ de maïs Piper. Là encore, c’est l’initiative d’un officier nordiste qui va les prendre de court. Le colonel Edward Cross, qui commande le 5ème New Hampshire et tient la gauche de la brigade Caldwell, détecte le mouvement ennemi et réagit aussitôt. Entraînant avec eux le 81ème Pennsylvanie, Cross et ses hommes prennent les Confédérés de vitesse et atteignent le mamelon avant eux. Les Sudistes sont contraints de se replier, mais pas avant d’avoir vainement tenté par deux fois de prendre d’assaut la position tant convoitée. La brigade G.B. Anderson perd à cette occasion un nouveau commandant, Risden Bennett étant sonné par le souffle d’un obus nordiste.
Les contre-attaques énergiques mais désespérées développées par D.H. Hill sur les flancs de Caldwell ne sont pourtant pas vaines. Elles permettent au général confédéré de gagner le temps nécessaire pour organiser un nouveau contre, cette fois en plein centre. La brigade de G.T. Anderson, que Longstreet est parvenu à lui envoyer, la mènera avec l’aide des hommes de Sanders et les restes de la brigade Pryor. Les Sudistes chargent à travers le verger Piper où s’est déployée la batterie Miller, dont les pièces de bronze vomissent des doubles charges de mitraille. Malgré la fatigue et le danger, les soldats en gris continuent à se battre avec férocité. Ils n’en sont pas moins soumis à un besoin physiologique impérieux, compte tenu de l’heure et des combats épuisants qu’ils livrent : manger. D.H. Hill s’en fera le témoin : « En chargeant les Yankees à travers un verger de pommiers, même face à la perspective immédiate de la mort devant eux, je remarquai des hommes dévorant avidement des pommes. »
Face à cette nouvelle menace, Barlow et ses hommes changent à nouveau d’orientation. Accablés de mitraille, ils s’abritent comme ils le peuvent derrière les arbres fruitiers. Barlow lui-même est atteint par un petit éclat au visage et une balle de mitraille au bas-ventre. Alors que Miles le remplace, ses hommes tiennent bon. Richardson, qui n’a reçu jusque-là aucun soutien rapproché d’artillerie et en réclame frénétiquement depuis un long moment, finit par en obtenir avec la batterie du capitaine William Graham. Cette dernière se met en place sur une position exposée, mais parvient à concentrer son feu, avec celui d’autres unités nordistes, sur la batterie confédérée. Celle-ci finit par être réduite au silence, le feu nordiste faisant même exploser un de ses caissons à munitions – un événement suffisamment spectaculaire pour être remarqué sur une bonne partie du champ de bataille, à tel point que sa destruction sera revendiquée par plusieurs batteries nordistes. Ainsi privée de soutien, l’attaque sudiste finit par être repoussée. Rien ne semble empêcher les Fédéraux de s’emparer des bâtiments de la ferme Piper, dont ils s’approchent déjà, et où s’accrochent les restes durement étrillés du centre confédéré.
1. La division Richardson assume une nouvelle position près de Bloody Lane. L'Irish Brigade relève les hommes de Caldwell tandis que W.S. Hancock reprend la division en main.
2. Pour dissuader les Nordistes de lancer une nouvelle attaque, D.H. Hill, qui possède un avantage local en artillerie, maintient la pression à distance.
3. Pour contrebattre les batteries sudistes, McClellan ordonne à Pleasonton de faire traverser le pont médian à son artillerie à cheval, sous la protection de ses cavaliers.
4. Les batteries nordistes sont menacées par l'avancée des tirailleurs sudistes.
5. Pour contrer la menace, Porter envoie à Pleasonton des détachements de fantassins réguliers de la division Sykes, qui prennent l'avantage.