Le brevet de la carte à puce
L'invention de Roland Moreno - la carte à puce- est un rectangle en plastique d'une épaisseur d'un millimètre qui porte un circuit intégré capable mémoriser de façon sécurisée une série d'informations. Il rassemble un microprocesseur, une mémoire morte (ou ROM), une mémoire de stockage et une mémoire vive d'une taille variable selon la somme la complexité des informations qu'il va contenir. Ce circuit intégré s' appelle à tort une puce, car cette dernière est en réalité située en dessous et est «cachée».
Avant d'être mise en circulation, la carte est encodée afin d'inscrire dans la puce les informations personnelles de l'utilisateur. Le premier brevet est déposé le 25 mars 1974 et décrit «un objet portable à mémoire revendiquant des moyens inhibiteurs» (assurant la protection des données) associé à «un comparateur avec un comparateur d'erreurs» (combinaison utilisée typiquement pour l'utilisation du code secret associé à la carte).
Roland Moreno, un inventeur atypique
Bref, c'est un touche-à-tout autodidacte. Il ne cesse d'inventer tout au long de sa vie de nouvelles machines plus ou moins délirantes. Parmi ses trouvailles, on peut citer le radoteur (qui permet de créer des mots nouveaux de manière algorithmique), le pianok (piano de poche) ou encore le matapof (machine à tirer à pile ou face).
En mars 1972, il crée l'association Innovatron puis, dès juillet, une entreprise du même nom «pour vendre des idées ». Celle-ci commercialise à partir de 1975 des noms de marques ou de produits. Il est également l'auteur d'un livre, La Théorie du bordel ambiant, dans lequel il partage l'ensemble de ses réflexions sur le monde.
Quarante-cinq brevets
La protection industrielle de sa carte à puce sera élargie par le dépôt de plusieurs certificats d'addition et brevets -comme le compteur d'erreurs, qui provoque l'autodestruction de la puce en cas de soumission répétée d'un code faux- qui s'appuient sur le brevet de base, et par des dépôts dans onze pays. Grâce à cette technologie, il fait fortune. Elle lui rapporte 150 millions d'euros, ce qui ne va pas sans déclencher des polémiques. En effet, s'il a déposé le brevet, d'autres inventeurs revendiquent la paternité de la carte à puce. Lun des plus véhéments fut un ingénieur du Centre national d'études des télécommunications (CNET) affirmant 'être fait voler son idée en 1973 par l'association Innovatron. Mais malgré de nombreuses plaintes, ses démarches ont systématiquement été rejetées.
La carte à puce : un marché en expansion
À la fin des années 1990, les brevets de Roland Moreno liés à la carte à puce -comme le porte-monnaie électronique- tombent dans le domaine public, mais il reste à la tête de son entreprise Innovatron. Lorsqu'il meurt à l'âge de 66 ans, le 29 avril 2012, d'une embolie pulmonaire à son domicile parisien, il ne touchait donc plus de royalties sur les cartes à puce, mais percevait encore des droits sur les cartes « sans contacts» de type Velib' ou Navigo. Depuis, le marché de la carte à puce ne cesse de progresser.
En 2011, 6,3 milliards d'unités ont été produites. Roland Moreno affirmait que sa carte à puce avait «un nombre d'applications limité» -la banque, le téléphone, les parkings, les décodeurs de télévision et la carte de santé-, et qu'au-delà, il se disait «un peu sceptique». En effet, l'essentiel de la production (75%) est destiné au marché des télécommunications (dont les cartes SIM des téléphones portables) et 16% au paiement (cartes bancaires). Le nombre de paiements par cartes à puce a dépassé celui des règlements par chèque.
Pour aller plus loin
- Théorie du bordel ambiant, de Roland Moreno. L'Archipel, janvier 2002.