La construction du premier campanile de Venise (IXe – XIXe siècle)
Pietro Tribuno, dix-septième doge de la République Sérénissime de Venise, lança en 888 la construction du campanile de Saint-Marc. L’érection du bâtiment fut achevée sous le dogat de Domenico Morosini, au XIIe siècle. Mais la construction de ce « premier campanile » ne fut pas chose aisée : en effet, en 1080, alors que la tour était en pleine édification, le sol céda littéralement sous son poids, et il fallut tout reprendre du début. Silvio Domenico, alors doge de Venise, ordonna la démolition de ce qu’il restait de l’édifice, et décida de sa reconstruction quelques toises plus loin, toujours sur la place Saint-Marc.
Au fil des siècles, de multiples incendies fragilisèrent le campanile : le 13 avril 1745, un sinistre causa des fissures dans la maçonnerie, et causa d’importantes chutes de pierres qui tuèrent plusieurs vénitiens. Ce « campanile primitif » de Venise, en réalité, mit quasiment un millénaire à être mis au point et à être édifié. Les catastrophes diverses et successives fragilisèrent grandement l’édifice, qui ne fut jamais véritablement achevé.
L'effondrement de 1902
« Com’era, dov’era », « comme il était, où il était ». Tels étaient les mots du Conseil Municipal de Venise, qui décida le soir même de la catastrophe de reconstruire le campanile de Saint-Marc. Au début de l’année 1903, la première pierre de la construction fut posée ; le campanile fut reconstruit avec les matériaux du premier.
L’Europe entière s’émut de cette tragédie, et les dons affluèrent à Venise. Le 25 avril 1912 – dix jours après le naufrage du Titanic … - le nouveau campanile fut inauguré, jour de la fête de Saint-Marc. En réalité, ce n’était pas la première fois que le campanile de Saint-Marc s’effondrait. En effet, il s’est écroulé à cinq reprises durant l’histoire : en 1080, en 1388, en 1489, en 1511, et donc en 1902.
Le campanile de Saint-Marc, symbole d'immortalité
Le campanile de Saint-Marc, comme sa « version » ancienne, abrite cinq cloches. La « Marangana », sonnant matin et soir, annonce le début et la fin du travail ; il « Maleficia » annonçait les condamnations à mort ; la « Nana » sonnait la 9è heure ; la « Trattiera » appelait les magistrats à se rendre aux séances du palais des Doges ; enfin, la cloche des « Pregadi », qui appelait les sénateurs à se rendre au palais ducal. On peut donc plus aisément comprendre l’attachement qu’avaient et qu’ont les Vénitiens pour le campanile, symbole de la cité, qui a toujours véritablement rythmé leur quotidien.
Venise, cité millénaire, totalement hors du temps, semble immortelle. Il suffit de se promener dans la Sérénissime, le soir venu, pour s’en rendre compte. Les Vénitiens sont très attachés à leur campanile, puisqu’il s’agit véritablement de l’emblème de la ville. Souvent détruit, toujours reconstruit, le campanile de Saint-Marc est le symbole de l’immortalité de la Sérénissime. Ce n’est pas pour rien que les Vénitiens le surnomment depuis toujours le « maître de maison ».
Pour aller plus loin
- Venise vue de ses Campaniles de T. Sammartini. 2003.
- Venise: Le secret des Campaniles, de Paul Beccaria.