Jules Michelet, un polygraphe acharné au service de la République
Né à Paris en 1798, fils d'un imprimeur, Jules Michelet grandit dans le souvenir vivant de la Révolution. Docteur ès lettres à 21 ans, il devient professeur d'histoire. En 1831, il entre aux Archives nationales et enseigne à l'université puis, en 1838 devient professeur au Collège de France. Loin de l’image parfois oisive du romantique, il se présente comme un infatigable enseignant. Son approche de l’histoire se fait par l’enseignement. Ses premiers écrits sont de facto des manuels scolaires qui lui donneront une importante première expérience au moment de se lancer dans sa grande fresque nationale.
Michelet mettra cette fresque en pause à de nombreuses reprises, notamment lorsqu’il sentira le souffle de la République renaissante (la Seconde République) qu’il souhaite guider avec son Histoire de la Révolution (1847-1853), grand réquisitoire contre l’Ancien Régime. Son hostilité face au Second Empire le prive de toute fonction officielle, lui laissant tout loisir de terminer son Histoire de France ainsi que rédiger des textes plus poétiques sur la nature comme par exemple Les Oiseaux (1856) et Les Insectes (1857). Michelet rédigea également des essais plus moraux sur Les Femmes (1859) ou encore L’Amour (1858), des écrits plus polémiques comme Le Peuple (1846) ou La Bible de l'Humanité (1864) sans oublier La Sorcière (1862) où Michelet laisse parfois libre court à son imagination.
Jules Michelet mourut en 1874 comme il avait vécu : en travaillant alors sur une Histoire du XIXe siècle.
Un historien français au legs contesté
L’œuvre de Michelet est des plus prolifiques mais également des plus complexes. Il est difficile de porter une opinion d’ensemble sur une œuvre d’une telle étendue. L’un des mérites de l’historien fut de s’appuyer sur des documents inédits lorsqu’il était à la tête des Archives nationales. Pour autant, au fur et à mesure de sa carrière, il tomba parfois dans la facilité, mettant à contribution des sources secondaires non vérifiées et se révélant a posteriori erronées.
Il est ainsi nécessaire d’inscrire le legs de Michelet dans son courant historique, celui de l'école historique française résolument républicaine et délibérément hostile à l'Ancien Régime. Citer les écrits de Michelet, c'est citer des textes s'employant à dénoncer les dits méfaits des siècles passés, du Moyen Âge à la Révolution. L'idée dominante était en effet alors de présenter l'Histoire comme un progrès continu tant des techniques que du sens moral jusqu'à la paix et la justice républicaine. L’idéal du progrès qui doit être enseigné au peuple, voilà le credo de Michelet, un credo non sans prise de position.
L’œuvre de Jules Michelet se caractérise ainsi plus par son écriture généreuse et enthousiaste, sa passion de conteur que par sa vérité historique. C’est en effet de lui que découlent d’importantes erreurs historiques ainsi qu’un grand nombre de mythes qui ont eu et ont toujours une forte emprise sur notre histoire. Michelet nous a ainsi légué une relecture romanesque de l’histoire de France, une légende qui nous donne à rêver mais qui nous montre également les dangers de la confusion entre morale, pouvoir et l’Histoire.
Principales œuvres
- MICHELET, Jules, Histoire de France : Tome 1, La Gaule, les Invasions, Charlemagne, Editions des Equateurs, Paris, 2008.
- MICHELET, Jules, Histoire de la Révolution française, Editions Gallimard, Collection Folio Histoire, Paris, 2007.
- MICHELET, Jules, La Sorcière, Editions Flammarion, Paris, 1993.
Bibliographie
- PETITIER, Paule, Jules Michelet : L'homme histoire, Editions Grasset, 2006.
- Lucien Febvre, Michelet, créateur de l'histoire de France, Vuibert, 2014.