Khrouchtchev : une carrière exemplaire
Nikita Kroutchev est un fils de mineur né le 3 avril 1894. Il fait une « carrière » exemplaire : ouvrier, puis soldat pendant la Première Guerre mondiale, il entre au parti communiste ukrainien au début de la guerre civile, et poursuit ensuite son ascension à Moscou avant de regagner l'Ukraine où il dirige le parti pendant dix ans. La Seconde Guerre mondiale lui donne l'occasion de s’illustrer : il organise la résistance à la Wehrmacht et participe à la bataille acharnée de Stalingrad (1942). Membre du Politburo, Khrouchtchev est déjà un des principaux dirigeants de l'URSS.
La rupture avec le stalinisme
Pur produit de la période stalinienne (il a participé lui-même aux purges ordonnées par le dictateur), Khrouchtchev sent pourtant que la population soviétique éprouve un profond besoin de changement. Il promeut une politique intérieure de réformes politiques (libéralisation du régime et amnistie d'anciens opposants) et économiques. La priorité est ainsi donnée à la production de biens de consommation afin d'améliorer les conditions de vie des Russes.
Lors du XXe congrès du Parti (1956), il dénonce, dans un rapport secret, les « crimes de Staline » et son « culte de la personnalité ». Cette prise de position, d'autant plus importante qu'elle émane d’une « créature stalinienne », connaît un retentissement considérable dans le monde communiste, y compris dans les partis communistes occidentaux, qui doit alors admettre des faits qui, jusque-là, avaient toujours été niés.
Entre Guerre froide et détente
Sur le plan international, les célèbres déclarations tonitruantes et les coups de colère de Khrouchtchev dissimulent en réalité une politique prudente fondée sur l'idée d'une « coexistence pacifique » de l'URSS et des Etats-Unis. Khrouchtchev cherche à impulser un cours nouveau aux relations entre les deux blocs. Sous sa direction, la guerre froide entre dans une phase de détente. Il rejette l'idée d'un éventuel conflit avec les États-Unis et affirme la nécessité de se mesurer au monde occidental sur le plan économique plutôt que militaire. Après avoir mené la réconciliation de son pays avec la Yougoslavie de Tito, il participe à la conférence de Genève en 1955, qui réunit, pour la première fois depuis 1945, les anciens vainqueurs de l'Allemagne nazie. Les relations avec les Etats-Unis s'améliorent : Khrouchtchev rencontre Eisenhower puis Kennedy.
Paradoxalement, il fait ériger le mur de Berlin en 1961, puis apporte son soutien au régime castriste qui précipite le monde au bord d'une troisième guerre mondiale lors de la crise des fusées à Cuba en 1962. Il préfère néanmoins éviter l'affrontement avec les États-Unis, donne l'ordre de retirer les missiles installés dans l'île et signe en 1963, à Moscou, un traité interdisant les essais nucléaires dans l'atmosphère.
La chute de Khrouchtchev
Les désordres économiques liés aux réformes engagées, les crises internationales et la rupture avec la Chine (1961) affaiblissent la position soviétique et donc celle de Khrouchtchev. Qui plus est, la personnalité originale et imposante du dirigeant s'accommode mal des règles de la « direction collégiale » mise en place à la mort de Staline. Il est démis de ses fonctions par le plénum du Comité central en octobre 1964, et remplacé par Leonid Brejnev.
Khrouchtchev fut l'un des acteurs principaux de la guerre froide qui, en 1962, lors de la crise des fusées à Cuba, faillit dégénérer en guerre mondiale et nucléaire. En URSS, les « années Khrouchtchev » sont marquées par un changement politique profond, notamment une pacification de la vie politique soviétique. Signe des temps : quand Khrouchtchev se voit contraint à la démission, il n'est pas inquiété et peut mener une retraite paisible, au cœur de la capitale, jusqu’à sa mort en septembre 1971...
Pour aller plus loin
- Khrouchtchev, la reforme impossible, de Jean Jacques Marie. Biographies Payot, 2010.
- Khrouchtchev et l'Occident, de K.S Karol. Julliard, 1960.
- Histoire de l'Union soviétique de Khrouchtchev à Gorbatchev, de Nicolas Werth. PUF, 2021.