Aux origines de la déclaration d'indépendance américaine
Cette déclaration est l’aboutissement d’un processus révolutionnaire, opposant sujets des 13 colonies d’Amérique du Nord à la couronne britannique. Si ce processus peut être lié aux balbutiements de la conscience nationale américaine consécutifs à la guerre de sept ans, il a essentiellement trait à des questions fiscales et économiques. Les historiens soulignent le rôle de l’Angleterre dans cette rupture. Les mesures politiques de George III ont fortement contribué à l’avènement de la sécession des treize colonies. Vues de Londres, les colonies auraient faiblement participé à l’effort de guerre lors de la Guerre de Sept ans (1756-1763) et préfèreraient commercer avec l’ennemi plutôt qu’avec la métropole. Londres tente donc d’établir un contrôle plus strict et autoritaire de ces colonies. Or l’identité américaine émerge à la même époque.
Le mécontentement américain s’exprima par la création d’organisation d’opposants à Londres, dont la plus célèbre reste celle des Fils de la Liberté. Ces derniers à l’origine de la Tea Party de Boston (16 décembre 1773) provoquent une répression vigoureuse de la part des autorités Britanniques. La situation évolue alors rapidement vers l’insurrection. Imprégnés de l’esprit des Lumières, les colons américains se réclament d’un nouvel esprit de liberté face à une couronne Britannique censée les priver de leurs droits naturels et bridant leur développement (économique et territorial).
La montée des tensions et des revendications
L’opposition coloniale va s’organiser dans le cadre de Congrès continentaux, regroupant des députés des 13 colonies. Manière de gouvernement américain avant l’heure et par la force des choses, ces Congrès voient émerger l’idée d’une indépendance américaine (à l’origine minoritaire). Lorsque le second Congrès se réunit à Philadelphie le 10 mai 1775, la situation est déjà hors de contrôle pour Londres qui fait face à une véritable guérilla. Il est alors clair que le point de non retour a été franchi et les Congressistes se mettent finalement d’accord pour le faire savoir au monde par une Déclaration d’Indépendance.
4 juillet 1776 : la naissance d'une nation ?
Sanctionnant la rupture définitive avec la Grande-Bretagne « En conséquence, nous, les représentants des États-Unis d'Amérique, assemblés en Congrès général…publions et déclarons solennellement… que ces Colonies unies sont et ont le droit d'être des États libres et indépendants ; qu'elles sont dégagées de toute obéissance envers la Couronne de la Grande-Bretagne ; que tout lien politique entre elles et l'État de la Grande-Bretagne est et doit être entièrement dissous… » la déclaration voit l’émergence d’un nouvel acteur sur la scène international, un acteur que les ennemis des Britanniques vont s’empresser d’aider. Ainsi en France, elle suscite l’enthousiasme et l’admiration d’une élite libérale dont les plus illustres représentants, telles que Lafayette iront combattre auprès des insurgés américains.
Pour autant, cette déclaration crée-t-elle une nation américaine ? On peut en douter : « En conséquence, nous, les représentants des États-Unis d'Amérique, assemblés en Congrès général, prenant à témoin le Juge suprême de l'univers de la droiture de nos intentions, publions et déclarons solennellement au nom et par l'autorité du bon peuple de ces Colonies, que ces Colonies unies sont et ont le droit d'être des États libres et indépendants. » Il y a dès les origines une ambiguïté sur le devenir des colonies : chaque colonie doit-elle être indépendante ou doit-on créer une fédération et partager un destin commun ? Le texte ne tranche pas. De nombreux sujets sont absents ou passés sous silence : l’esclavage ou la place des Indiens dans le ou les futurs états sont emblématiques de ces omissions.
La déclaration d'indépendance, texte fondateur des États-Unis
En France, la prise de la Bastille et la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen sont le point de bascule entre le monde moderne et le monde contemporain. Or comme le remarquait Condorcet dans son De l’influence de la révolution de l’Amérique sur l’Europe, une partie de la Révolution française ne peut s’expliquer sans le précédent américain. Ce texte a été également une source d’inspiration pour de nombreux indépendantistes. Pour les Américains, ce texte est bien une source toujours à réinterpréter.
Le 16 octobre 1854, Lincoln dans sa lutte contre l’esclavage a déclaré dans le discours de Peoria : « Il y a près de quatre-vingts ans, nous avons commencé par déclarer que tous les hommes étaient créés égaux, mais maintenant nous avons régressé vers une autre déclaration, que pour certains hommes le droit d’en asservir d’autres est un droit sacré de l’autonomie gouvernementale ». Le président américain s’est appuyé sur ce texte à de nombreuses autres reprises et a mis en valeur son importance. Les mouvements féministes américains se sont emparés aussi de ce texte tout comme Martin Luther King dans son discours I have a dream. Enfin, la culture populaire mentionne souvent ce texte directement ou indirectement (Liberty Bell par exemple).
La déclaration d’indépendance américaine est un texte fondamental. Malgré ses lacunes (et peut-être aussi grâce à celles-ci), elle est un formidable outil de combat. Nous n’avons pas relevé la qualité et la limpidité du texte qui contribuent à son caractère percutant et virulent. Conçue comme un texte universel, elle est pourtant un texte américain influencé par les Lumières anglaises. Ce texte signe l’acte de naissance d’une nation. La révolution américaine est un thème toujours présent dans les esprits. Le Tea Party se revendique des idées qui ont conduit à la Boston Tea Party. Les médias contemporains se sont emparés de cette époque de multiples manières : les Simpsons, How I Met Your Mother, The Patriot, Benjamin Gates et le Trésor des Templiers ou même le jeu vidéo Assassin’s Creed III illustrent cet engouement.
Bibliographie
- COTTRET Bernard, La Révolution américaine : La quête du bonheur, Perrin, Paris, 2003.
- COULON Claude, L'Amérique au XVIIIe siècle, La naissance des États-Unis, Les Belles Lettres, Paris, 2010.
- KASPI André, Les Américains : Naissance et essor des États-Unis 1607-1945, Tome 1, Seuil, Paris, 2002.