Abraham Lincoln (1809-1865) est un homme d’État américain et seizième président des États-Unis de 1861 à 1865. L'élection à la présidence de ce député républicain et antiesclavagiste militant provoque la sécession des États du Sud, qui créent en février 1861 les États confédérés d’Amérique. C’est le début de la guerre de Sécession, qui oppose jusqu’en 1865 les nordistes et les sudistes. Sans attendre la fin du conflit, Abraham Lincoln entame le processus d’émancipation des esclaves et le 31 janvier 1865, un amendement antiesclavagiste est intégré à la Constitution américaine. Réélu président, Abraham Lincoln est assassiné le 14 avril 1865 par un opposant sudiste.
Premiers engagements politiques d'Abraham Lincoln
Abraham Lincoln est né le 12 février 1809 dans le Kentucky. Il est issu d’une famille modeste de cultivateurs, très religieux, qui émigre en 1816 dans l’Indiana, notamment pour se soustraire à la concurrence que représentent les exploitations agricoles utilisant des esclaves (le Kentucky autorise l’esclavage, alors que l’Indiana l’interdit). Les Lincoln déménageront à nouveau en 1830, cette fois pour s’installer plus à l’ouest, dans l’Illinois.
Lecteur avide et largement autodidacte, Il devient avocat puis se lance très tôt en politique, se présentant aux élections de 1832 pour entrer au sein de l’assemblée d’État de l’Illinois. Il n’y parvient pas, mais ses talents d'orateur s’y affirment déjà. La même année, il sert dans la milice lors de la guerre livrée au chef indien Black Hawk, mais n’aura pas l’occasion de participer directement aux combats.
Il retente sa chance aux élections de 1834, parvenant cette fois à se faire élire ; il sera reconduit encore à trois reprises, servant jusqu’en 1842. Durant cette période, il affirme son affiliation politique : le parti whig, principale force d’opposition au parti démocrate au niveau national. C’est presque tout naturellement, compte tenu de ses antécédents familiaux et de ses convictions religieuses, qu’il se dit dès 1837 opposé à l’esclavage. Toutefois, soucieux de ménager son électorat, c’est toujours avec beaucoup de précautions oratoires qu’il exprime son opinion sur un sujet déjà « délicat ».
C’est encore en autodidacte qu’il deviendra avocat en 1837, se construisant en quelques années la réputation d’être l’un des meilleurs de son État. Il attire suffisamment l’attention sur lui pour démarrer une carrière politique à l’échelle nationale : en 1846, il est élu à la Chambre des représentants. Son mandat de deux ans ne sera toutefois pas reconduit, essentiellement à cause de son opposition à la guerre contre le Mexique (1846-48).
Lincoln et la lutte contre l'esclavage
À l’issue de son mandat de représentant, Abraham Lincoln se voit offrir le poste de gouverneur de l’Oregon, qu’il préfère décliner pour se consacrer à son cabinet d’avocat. Il revient en politique en 1854, après le vote de la loi Kansas-Nebraska. Considérée par beaucoup comme une concession inacceptable à l’institution de l’esclavage, cette loi déclenchera la création du parti républicain, que Lincoln rejoindra l’année suivante.
C’est lors de l’élection sénatoriale de 1858 qu’il s’affirmera comme l’un de ses principaux leaders. Durant la campagne, il affronte le démocrate Stephen Douglas, l’auteur de la loi Kansas-Nebraska et chantre de la doctrine de « souveraineté populaire », principe voulant que les habitants d’un futur État de l’Union choisissent eux-mêmes s’ils accepteront ou non l’esclavage sur leur sol. Lincoln, pour sa part, développera une rhétorique modérée mais ferme, axée sur l’arrêt de l’extension de l’esclavage plutôt que sur son abolition pure et simple.
Il sera battu de justesse, mais son discours séduit les électeurs indécis du Nord et contribue à la montée en puissance du parti républicain. Ce dernier, après l’échec de John Frémont et de son programme radical aux présidentielles de 1856, choisit d’opter pour une ligne plus modérée, et désigne Lincoln comme candidat à la présidence pour les élections de 1860.
Durant la campagne, il répète avec son éloquence habituelle qu’il n’a nulle intention d’abolir l’esclavage durant son mandat, mais seulement d’en interdire l’extension. Il emporte ainsi l’adhésion des électeurs nordistes, d’autant plus facilement que face à lui, les démocrates sont divisés. C’est ainsi qu’il est élu président des Etats-Unis, le 6 novembre 1860.
Mais les plus virulents partisans de l’esclavage interprètent son élection comme le signe de l'émancipation des esclaves à venir. Ils parviennent à rallier autour d’eux l’opinion publique des États du Sud, et la poussent vers ce qu’ils estiment la seule solution permettant à l’esclavage de se maintenir, la sécession. La Caroline du Sud est le premier État à se séparer de l’Union, le 20 décembre 1860.
Comme Lincoln l’avait prophétisé dans un célèbre discours de 1858, la nation est à présent divisée. Quatre mois de tractations politiques resteront sans effet, et l'entrée de Lincoln à la maison blanche, le 4 mars 1861, n’y changera rien. Les Etats du Sud se groupèrent pour former leur propre nation, les États Confédérés d’Amérique, et entreprirent d’affirmer leur souveraineté sur leur territoire.
La crise autour du fort Sumter, installation de Caroline du Sud occupée par des soldats nordistes, allait faire plonger le pays dans la guerre civile après le bombardement du fort par les Sudistes (12 avril 1861).
Un président dans la tourmente de la guerre de Sécession
La présidence Lincoln dut alors se résigner à diriger l’effort de guerre nordiste pour rétablir l’intégrité de l’Union. La corruption et les défaites militaires rendirent les premiers mois difficiles, mais l’Union acquit un avantage stratégique en s’assurant le contrôle des « États-frontière » entre le Nord et le Sud, et le président sut peu à peu s’entourer d’administrateurs efficaces et zélés.
Malgré cela, l’année 1862 fut difficile et si le général Grant remporta des victoires importantes dans l’Ouest du pays, il n’en fut pas de même sur la côte Est et Washington fut même menacée, jusqu’à la bataille d’Antietam (17 septembre 1862).
Cette victoire défensive des armées de l’Union, remportée sur le sol nordiste, fut un jalon politique décisif pour Abraham Lincoln. Elle lui permit de montrer à ses concitoyens que le Nord, loin d’être l’agresseur dans ce conflit, devait au contraire se défendre vigoureusement pour éviter de se voir imposer l’esclavage, et qu’il était de son devoir de détruire cette institution.
Les abolitionnistes demandaient depuis longtemps à Lincoln d'affranchir tous les esclaves et l'opinion publique semblait soutenir cette idée. Néanmoins, Lincoln agit lentement et avec beaucoup de précautions. Le 13 mars 1862, le gouvernement fédéral interdit à tous les officiers de l'armée de l'Union de renvoyer les esclaves fugitifs, ce qui rendit, de fait, caduques les lois sur les esclaves fugitifs.
Le 10 avril, à l'initiative de Lincoln, le Congrès déclara que le gouvernement fédéral indemniserait tous les propriétaires d'esclaves qui affranchiraient de leur plein gré leurs esclaves. Tous les esclaves du District de Columbia furent libérés de cette manière, dès le 16 avril 1862. Le 19 juin de cette même année, le Congrès promulgua une mesure qui interdisait l'esclavage sur le territoire des États-Unis.
Le 22 septembre 1862, le président fit publier une proclamation d’émancipation, déclarant tous les esclaves du pays libres à compter du 1er janvier 1863. En transformant les buts de guerre de l’Union en une lutte à mort contre l’esclavage, Lincoln ressouda derrière son administration une partie de l’opinion publique jusque-là vacillante.
À partir de 1863, la mobilisation industrielle et humaine du Nord commença à lui donner l’avantage sur le champ de bataille. Les succès militaires, toutefois, n’empêchèrent pas la lassitude de s’installer dans le Nord, face à l’ampleur des sacrifices à consentir. En plus de la conduite de la guerre, Lincoln dut disputer la campagne présidentielle de 1864.
Face à lui, George McClellan promettait la paix à ses concitoyens, quitte à négocier avec les Confédérés. Le président pressa donc ses généraux de sortir de l’enlisement et d’obtenir des victoires décisives, ce qu’ils firent non sans mal, et au prix de beaucoup de vies humaines.
L'assassinat d'Abraham Lincoln
Finalement réélu le 8 novembre 1864, Lincoln n’avait plus qu’à mener à son terme une guerre qui touchait de toute manière à sa fin, tant les armées sudistes étaient parvenues à bout de leurs forces. De fait, Richmond, la capitale confédérée, fut prise le 3 avril 1865. L’heure serait bientôt à la reconstruction… Mais Abraham Lincoln, sauveur des états-unis, ne put qu’entrevoir la victoire finale, laissant son œuvre inachevée. Il fut mortellement blessé d’une balle dans la tête dans sa loge du théâtre Ford, le 14 avril 1865, par John Wilkes Booth, acteur et sympathisant sudiste. Le président des États Unis s'éteint le lendemain matin, 15 avril 1865.
Il est encore aujourd’hui une figure majeure de la mémoire collective états-unienne, tant par ses opinions éclairées autant qu’inflexibles sur l'abolition de l'esclavage, que par son gouvernement en temps de guerre. C’est sans doute le président américain sur lequel on a le plus écrit, sur tous les aspects de sa vie, y compris les plus privés. Une statue en la mémoire d'abraham lincoln est d'ailleurs exposée à New York sur Union Square et l'on trouve également un magnifique mémorial à Washington, dans le West Potomac Park.
Bibliographie
- Abraham Lincoln : biographie, de Liliane Kerjan. Folio biographies, 2016.
- Abraham Lincoln : L'homme qui sauva les Etats-Unis, de Bernard Vincent, L'Archipel, 2009.
- Abraham Lincoln, à l'origine de la guerre de Sécession: Un combat contre l’esclavage, de Mélanie Mettra. 50Minutes, 2014.