Naissance de l' Athènes antique
Athènes occupe seule une région de Grèce centrale qui s'appelle l'Attique. Cette région est une péninsule de la mer Egée. L'Attique n'a de frontière terrestre que du côté ouest, et cette frontière terrestre est une frontière avec une région plus à l'ouest : la Béotie, et vers le sud-ouest, elle a pour voisine la cité du Mégare. L'Attique est une région qui possède trois plaines distinctes : Eleusis (avec sanctuaire consacré à Demeter), la deuxième plaine se trouve à la pointe sud de l'attique : la Mésogée qui se termine par le cap Sounion. Enfin, la troisième plaine est la plaine d'Athènes.
Athènes est la seule cité de l'Attique. Des archéologues ont mis en avant des traces d'une occupation mycénienne. Un mur cyclopéen entourait l’Acropole; appelé par la tradition le Pélasgiskon, il était attribué au peuple légendaire des Pélasges.
Athènes et l’Attique furent épargnées par les invasions doriennes et servirent de refuge à des Éoliens chassés de Thessalie et de Béotie, à des Ioniens du Péloponnèse. Toute cette population s’affirma ionienne et ne connut jamais de discrimination ethnique. Elle se divisa politiquement en petites communautés d’abord indépendantes, qu’Athènes se subordonna vers le Xe s. av. J.-C., tout en respectant l’autonomie des cités. Athènes fut gouvernée d’abord par des rois, mais on ne sait rien de certain au sujet des dynasties (en partie légendaires) des Théséides, des Mélanthides et des Médontides. Le pouvoir de la royauté s’effaça progressivement au profit de l’aristocratie foncière des Eupatrides; réduite à une magistrature temporaire, d’abord décennale puis annuelle, la royauté disparut enfin tout à fait vers 682 avant notre ère.
La crise de la fin du VIIe siècle
Le corps civique athénien est alors divisé en quatre tribus regroupe l'ensemble des citoyens. Il se perçoit comme une collectivité et cette dernière s'intitule à Athènes « les athéniens ». Officiellement, ce corps civique est divisé en quatre groupes à Athènes, mais aussi des divisions sociales : les familles eupatrides (aristocrates), comme celle des Alcméonides ; la « classe hoplitique », paysans aisés mais qui travaillent eux-mêmes leurs terres ; les thètes, citoyens pauvres ; les hectémores : citoyens pauvres endettés et en voie d'asservissement ; les étrangers ; et les esclaves issus du commerce. Il y a une double contestation de la suprématie des aristocrates, l'une politique par la classe hoplitique, l'autre économique par les thètes.
L'ancienne monarchie n'existe plus. Cette royauté, si elle a existé, a probablement disparue au VIIIe siècle avant J.-C. A présent des institutions qui reposent sur trois éléments essentiels : des magistrats désignés pour un an comme les neuf archontes (l'archonte éponyme + l'archonte roi + l'archonte polémarque + les 6 thesmothètes) toujours pris dans l'aristocratie, le conseil de l'aréopage formé des anciens archontes sortis de charge avec des pouvoirs politiques et judiciaires, et l'assemblée du peuple, à laquelle appartenaient tous les citoyens.
Solon fait également une réforme judiciaire, c'est le passage à la loi écrite. L'interdiction de l'esclavage pour dettes, l'abolition des dettes, mais refus du partage des terres, est également mis en application. A long terme, les mesures de Solon vont apaiser les tensions sociales et moderniser la cité d'Athènes.
L'âge des Pisistratides (561 – 510)
Entre le 594 et 561, les factions aristocratiques sont en lutte. On retrouve celle des Pédiens (génos des Etéoboutades), celle des Paraliens (génos des Alcméonides) et celle des Diacriens (Pisistrate). En 561, premier coup d'État de Pisistrate (il fût chassé deux fois, avant de revenir au pouvoir). Il s'appuie à chaque fois sur la classe hoplitique et mène une politique défavorable aux familles aristocrates. En 528/7, c'est la mort de Pisistrate et le pouvoir passe à ses deux fils : Hippias et Hipparque. En 514, Hipparque est assassiné et on assiste à un durcissement du régime. Enfin en 510, la tyrannie est renversée.
Athènes est en plein essor économique, avec le développement de l'agriculture, notamment de l'olivier et de la dépendance d'Athènes pour son approvisionnement en céréales. En effet, il faut nourrir une population sans cesse en augmentation. Athènes voit l'essor de l'artisanat avec la céramique Attique qui supplante la céramique de Corinthe dans la période 550 – 500, ceci notamment en s'appuyant sur la technique des figures rouges inventée vers 525. L'économie se monétarise : vers 600 apparaissent les premières monnaies grecques en Asie Mineure. Vers 575, c'est le début du monnayage d'argent d'Egine, vers 550 le début du monnayage d'argent de Corinthe et vers 530 le début du monnayage d'argent athénien.
Athènes est en plein essor urbain. Il n'y a pas de murailles, mais une séparation des espaces : le sacré (sanctuaires), le public (places, rues) et le privé (maisons, jardins). Des travaux sont entrepris sur l'Acropole et sur l'agora à l'emplacement d'une ancienne nécropole géométrique. L'agora est le lieu de place de marché et un lieu de réunion politique : c'est là que sont gravées les lois de Solon. En 522/1, Hippias dédie aux douze dieux un autel, c'est le centre symbolique d'Athènes. Les Pisistratides s'occupent également de l'approvisionnement de la ville en eau avec la construction de canalisations.
Chute de la tyrannie et démocratie
Quel bilan donner à la tyrannie ? Un affermissement des lois de Solon, un affaiblissement des eupatrides, un essor économique, un apaisement des tensions sociales et la conscience de l'unité et de la force d'Athènes. Après la chute des Pisistratides, on assiste à une lutte pour l'archontat entre Isagoras et l'alcméonide Clisthène. La chute de la tyrannie ne s’accompagna nullement d’une réaction aristocratique : si Athènes, à l’aube du Ve siècle., se trouve socialement et politiquement très en avance sur les autres cités grecques, c’est au contraire en grande partie grâce à la sagesse de son aristocratie qui sut faire à temps les concessions nécessaires (aussi bien Pisistrate que Dracon et Solon appartenaient aux Eupatrides).
La dernière étape vers la démocratie fut réalisée par Clisthène (508) qui, par une réforme communale, établit l’égalité des citoyens, qui étaient regroupés en dèmes, en tribus et en trittyes; fit de la boulé un conseil de 500 membres tirés au sort parmi les candidats présentés par les dèmes et donna à Vecclé-sia, assemblée de tous les citoyens, l’autorité politique suprême; établit l’ostracisme (508 ?), afin de prévenir toute tentative de tyrannie; enfin procéda à une réorganisation militaire qui faisait d’Athènes une nation armée sous les ordres de dix stratèges élus annuellement.
Toutefois la démocratie athénienne, même après les nouvelles réformes d’Aristide (477) et de Périclès (460), ne dépassera jamais certaines limites qui sont celles-mêmes de la cité antique dont l’économie est entièrement fondée sur le travail servile : la démocratie ne concerne qu’une minorité des habitants d’Athènes puisque, au Ve siècle, sur une population d’environ 400000 individus, on compte 200000 esclaves et environ 70000 étrangers domiciliés (métèques), ne jouissant pas plus que les esclaves de droits politiques. Encore sur les 130000 citoyens restants, faut-il enlever les femmes et les enfants, si bien que la démocratie athénienne ne comprit jamais plus de 30 à 40000 citoyens politiquement actifs et électeurs.
L’apogée d’Athènes au Ve siècle av. J.-C.
La prépondérance d’Athènes dans la Grèce du v' s. sera due d’ailleurs beaucoup plus à des raisons économiques qu’au prestige de son régime politique : si Athènes, avec sa population importante, est obligée de compenser par l’expansion maritime son manque grave de ressources agricoles, elle occupe en revanche, sur le plan industriel et commercial, une position de premier plan dans le monde hellénique. Alors qu’à Sparte ou à Thèbes le travail reste méprisé et interdit aux hommes libres, tous les citoyens d’Athènes se sont engagés hardiment dans les activités matérielles (ce qui tend d’ailleurs à adoucir le sort de l’esclave, qui devient un collaborateur, un associé, et n’aura nulle part à cette époque un meilleur sort qu’à Athènes).
La participation décisive d’Athènes aux guerres médiques fait de la grande cité attique la protectrice de tous ceux, Ioniens et insulaires de l’Égée, qui se sentent directement menacés par la Perse : ainsi, vers 477, se crée la ligue de Délos, qui rassemble dans une alliance militaire défensive la plupart des Cyclades et les villes grecques d’Ionie et d’Asie Mineure; dans cette confédération, Athènes s’assure tout de suite la prépondérance, exerce le commandement militaire et, par suite, dispose des finances communes, construit les vaisseaux de la plupart de ses «alliés», recrute et entraîne les équipages.
Bientôt le Conseil des alliés, qui théoriquement devait assurer la direction de la ligue, n’aura plus qu’une existence symbolique : en 454, le trésor de la ligue est transféré à Athènes, qui se trouve à la tête d’environ 150 cités tributaires, systématiquement rançonnées, et dont la contribution annuelle considérable servira en partie à édifier les magnifiques monuments construits sous Périclès. Les satellites tentés de se rebeller contre ce joug sont durement frappés, tels Naxos (470-469), Thasos (465-463) et plus tard Potidée (432).
L’impérialisme athénien, qui s’opposait directement à la conception grecque de la liberté de la cité, fut une des grandes causes de la guerre du Péloponnèse et de l’effondrement final d’Athènes à la fin de ce conflit. Mais seul l’afflux de richesses résultant de cet impérialisme permit l’apogée brillant de la démocratie athénienne au temps de Périclès : en fait, celui-ci, à part une brève éclipse de quelques mois, régna véritablement sur Athènes pendant trente-deux ans, de 461 à sa mort, en 429. Voyant ses fonctions renouvelées d’année en année, il devint «une sorte de Premier ministre permanent» (P. Cloché), et ce fut cette ferme autorité qui permit à Athènes de soutenir victorieusement la première partie de la guerre du Péloponnèse.
La guerre du Péloponnèse
Vers 435, Athènes reste forte : si son influence a diminué en Grèce centrale à la suite des révoltes de Thèbes (447) et de Mégare (446), elle a réussi à réprimer le soulèvement de l'Eubée (445), elle exerce son hégémonie sur le monde grec égéen, entretient de lointaines relations commerciales avec la Sarmatie (importation de céréales) et, pour en garantir la sécurité, elle s’est assuré le contrôle de la Thrace, des Dardanelles et du Bosphore. Avec sa rivale, Sparte, elle a conclu une trêve de dix ans (445).
C’est l’opposition maritime et commerciale entre Athènes et Corinthe qui fera éclater la grande guerre du Péloponnèse (431-404). Athènes entrait dans ce conflit en pouvant compter sur les ressources de son empire, mais non sur la majorité de l’opinion publique grecque. Son ennemie principale, Sparte, en dépit de son régime autoritaire et militariste, représentait en effet la seule liberté qui comptait vraiment pour un Grec : la liberté, l’indépendance de la petite cité, qui était précisément menacée par l’« hellénisme » athénien. Comme le dit Thucydide, «la sympathie générale inclinait du côté des Lacédémoniens, d’autant plus qu’ils proclamaient leur intention de libérer la Grèce».
Un instant la situation semble se redresser, grâce aux victoires d’Alcibiade (Cyzique, 410), mais celui-ci se voit retirer le commandement militaire en 406. La même année, la dernière victoire navale athénienne, aux îles Arginuses, est suivie de la scandaleuse condamnation à mort des stratèges vainqueurs. Athènes, complètement démoralisée, perd sa dernière flotte à l’Ægos Potamos (405) et doit capituler en avril 404.
Le Spartiate Lysandre occupe la ville, fait détruire les Longs Murs, confisque la flotte et impose à Athènes le gouvernement oligarchique des Trente Tyrans (404-403), qui établirent un régime de police et de terreur en s’appuyant sur une garnison lacédémonienne. La démocratie fut rétablie par Thrasybule (janvier 403), mais Athènes, blessée et humiliée, en proie à une situation économique et financière désastreuse, a cessé d’être la patrie des libres esprits : Socrate, accusé d’impiété et de corruption de la jeunesse, est condamné à mort (399).
Athènes sous domination macédonienne et romaine
En Grèce, c’est Sparte qui domine, mais Athènes profite de la guerre de Corinthe (395-386) pour commencer à se relever, grâce à l’or des Perses : Conon rebâtit les Longs Murs et la flotte reprend sa place dans l’Égée. Athènes appuie la conspiration de Pélopidas, qui libère Thèbes des Spartiates (379), puis s’allie avec Thèbes contre Sparte (378) et parvient à recréer une nouvelle Confédération maritime (377) où elle se garde de tomber dans les erreurs qui avaient été fatales à la ligue de Délos : plus de tribut imposé, plus de dictature athénienne sur les alliés, mais une collaboration sincère et effective entre Athènes et le synédrion, conseil représentatif des alliés.
Une victoire navale sur les Spartiates à Naxos (376) rendit à Athènes l’hégémonie en mer Égée et attira dans sa confédération de nouveaux membres (en tout une soixantaine). Inquiète des progrès de la ligue Béotienne dirigée par Épaminondas, Athènes préféra faire la paix avec Sparte, sur la base du statu quo (371), puis n’hésita pas à s’entendre avec Sparte contre Thèbes (369). Cependant Athènes était vite revenue à ses méthodes autoritaires traditionnelles dans ses relations avec ses alliés de la Confédération maritime : en 357, elle se trouva en face d’une révolte générale, qu’elle ne put maîtriser. La tentative d’Athènes de ressaisir son ancienne suprématie aboutissait donc à un échec.
Athènes dut cette fois reconnaître la suprématie macédonienne mais fut traitée généreusement par Philippe. Elle participa cependant au soulèvement de 335, puis, dès la mort d’Alexandre, déclencha contre les Macédoniens la guerre lamiaque (323-322). Une fois de plus vaincue, elle se vit imposer une garnison macédonienne au Pirée tandis que le dernier grand patriote athénien, Démosthène, s’empoisonnait.
Après la prise d’Athènes par Cassandre (317), un sage gouvernement oligarchique s’établit sous l’autorité de Démétrios de Phalère (317307), mais les Athéniens ne se contentaient pas d’avoir sauvé leur prospérité matérielle : rêvant toujours à l’indépendance perdue, ils apportèrent leur appui aux Romains contre la Macédoine, puis, après que la Grèce eut été réduite en province romaine, au roi du Pont Mithridate contre les Romains (88 av. J.-C.); le seul résultat de cette tentative fut que Sylla vint mettre le siège devant la ville, dont il obtint la reddition par la famine, et Athènes eut ses fortifications rasées (86).
Dès lors Athènes ne fut plus qu’un centre artistique, littéraire et philosophique, où venaient se former les jeunes intellectuels du futur Empire romain...
Bibliographie
- Athènes : Histoire d'une cité entre mythe et politique, de Sonia Darthou. Passés Composés, 2020.
- Histoire d'une démocratie : Athènes, Des origines à la conquête macédonienne, de Claude Mosse. Points Histoire, 1971.
- Le monde grec antique, ouvrage collectif. Hachette Supérieur, 2018.