Eugénie de Montijo, une « Grande » d’Espagne
Née le 5 mai 1826 à Grenade en Espagne d'un aristocrate espagnol et d'une mère américaine, Eugenia María de Montijo de Guzmán fut élevée à Paris au couvent du Sacré-Cœur. Fréquentant la haute société de l'époque, elle fait la connaissance du Prince-président Louis-Napoléon Bonaparte lors d'une réception à l'Elysée. Ce dernier tombe sous le charme d'Eugénie et lui fait une cour assidue pendant deux ans. En 1853, elle finit par accepter d'épouser le désormais empereur Napoléon III.
A cela s’ajoute une beauté éclatante, une vertu inattaquable, et aussi une personnalité ambitieuse et rusée. Mondaine, sa mère aime à montrer sa resplendissante fille afin de lui trouver une union prometteuse. Si les soupirants ne manquent pas, la jeune fille semble attendre mieux. Coquette oui, mais légère non. Elle devient très vite une habituée des soirées de l’Elysée offerte par le Prince Président et se fait très vite remarquer dès 1851.
L'empereur Napoléon III aime les femmes et obtient sans trop de difficultés ce qu’il veut. Habitué aux courtisanes, « grandes horizontales », femmes du monde mariées, avec Eugénie de Montijo tout est différent. Déjà son nom et ses titres qui la rattachent aux Grands d’Espagne. Et enfin la jeune fille n’est pas si ingénue et naïve que ça. Elle connaît la réputation de Louis Napoléon et refuse d’être la conquête d’une nuit. De là viendra la légende du mariage de 1853 plus ou moins forcé par Eugénie. Pour Victor Hugo, si « l’Aigle épouse une Cocotte », l’ambassadeur anglais Lord Cowley donne le sentiment européen « le grand aventurier a été la proie d’une aventurière ».
L'impératrice des modes et des arts
Elle aime à se parer. Crinolines, parures et colifichets lui valent le surnom de « Falbala 1ère ». Elle est avide de distractions, des séjours et villégiatures en cure à Plombières par exemple, à Biarritz et Eugénie les Bains. Elle se passionne pour les travaux d’Haussmann et s’intéresse aux plans de ce qui sera l’Opéra Garnier. Ses réceptions sont somptueuses et elle gagne la reconnaissance de ses homologues étrangers en soignant son image. La Reine Victoria, François Joseph , Ali Pacha… tous succombent à son charme. Sa beauté rivalise avec celle légendaire d’Elisabeth d’Autriche. Visconti crée pour Bordeaux une Fontaine des 3 grâces… on y retrouve Victoria, Eugénie et Isabelle d’Espagne…
« Badinguette » entre critiques et oublis
Sa générosité n’a d’égale que sa dépense. Bonne catholique, elle se montre très généreuse et soucieuse de soulager les malheureux. Louis Napoléon Bonaparte, son fils et unique enfant, naît le 16 mars 1856, et à cette occasion elle fonde un orphelinat et une société pour aider à l’installation des petits artisans. Par décret, elle obtient le contrôle des asiles et des crèches. En 1866, elle affronte avec courage les risques de contagion du choléra en se rendant auprès des victimes.
Napoléon connaît son caractère et sa fermeté… ne va t’elle pas remettre elle-même en place ses différentes maîtresses ? Les ministres apprécient sa force et son énergie et militent pour sa présence aux conseils. Sa présence pour l’inauguration du Canal de Suez fut un succès. Le conflit franco-allemand qui s’annonce la condamnera à être comme son époux responsable de la défaite.
Le dernier combat d'Eugénie de Montijo
Le 19 juillet 1870, Napoléon III prendre la tête des opérations et se rend sur le front franco prussien. Eugénie l’y engage et lui recommande de ne revenir à Paris que victorieux et non vaincu. Elle sait Napoléon III malade et agit donc à la manière d’Anne d’Autriche, prête à tout pour sauver les intérêts du Prince Impérial. Elle quitte le Palais de Saint Cloud le 7 août 1870 pour regagner paris et les Tuileries dès l’annonce des revers successifs de l'armée française. Le 2 septembre la nouvelle de la défaite de Sedan arrive aux Tuileries. Napoléon III est prisonnier et l'éphemère régente de l'empire se retrouve seule aux commandes d’un régime prêt à exploser. Le 4 septembre on réclame la déchéance de l'empereur et la foule se presse aux grilles des Tuileries. Eugénie doit parcourir tout le Louvre afin de quitter le Palais et échapper au peuple. Elle trouve refuge en Angleterre ou elle mourra en exil en juillet 1920 à l'age de 94 ans.
Pourtant, elle fut plus fine qu’on ne le croit. Le 23 octobre 1870, elle envoie une lettre au Roi de Prusse pour lui demander de ne pas procéder à un démembrement territorial de la France. Eugénie transmet la réponse du Roi à Clémenceau en 1918. Le refus motivé du Roi constituera en 1918 l’argument ultime qui permettra à la France de recouvrer son territoire perdu.
Bibliographie non exhaustive
- L’Impératrice Eugénie, de Suez à Sedan, de Christophe Pincemaille, édition Payot, 2000.
- Eugénie, la dernière Impératrice ou les larmes de la gloire, de Jean Des Cars. Edition Perrin, 2008.