Le traîneau : un objet d'art
Plusieurs couches de peinture transparente sont apposées sur les feuilles d'or, ce qui donne une très grande brillance. L'avant peut être muni de sculptures et de créatures fantastiques comme le traîneau au léopard ressemblant véritablement à l'animal avec la gueule ouverte, les yeux en verre et prêt à bondir ; le siège du cocher est installé sur la queue dressée et une tête de loup décore la proue. Il y a une très grande ressemblance avec le léopard présent à la Ménagerie entre 1730 et 1741.
Le cheval qui tire le traîneau est ferré à crampons, porte un panache à plumes, la crinière et la queue ornées de rubans de soie et le dos recouvert d'un caparaçon réalisé dans une étoffe brodée d'argent ou dans une peau d'animaux sauvages sur les côtés duquel on coud des grelots d'or ou d'argent.
Les cochers étant les seigneurs de la Cour, ils portent des bonnets doublés d'hermine, des redingotes fourrées, leurs pieds installés dans de grands chaussons en cuir de Russie déjà fixés sur les patins. Les passagères, car les dames raffolent de ce divertissement, assises dans la caisse et emmitouflées dans des « casaquins fourrés à la Polonaise », se laissent promener ou conduisent elles-mêmes.
Un divertissement parfois à risques
Très souvent le cocher est un homme ; mais les dames goûtent réellement à ces sorties. En janvier 1685, « la comtesse de Soissons se fait emporter par son cheval, puis se casse le bras et s'est fort blessée à la tête ». Plus tard, comme le rapporte le duc de Croÿ en janvier 1739 « ce fut Mme de Montauban qui mena ; il n'y avait point d'hommes avec ce traîneau, pas même de cocher ». Parmi les filles du roi, Mme Adélaïde rivalise avec son père Louis XV qui aime conduire son traîneau à toute bride, faire la course, se « couper » sans arrêt c'est-à-dire passer à toute vitesse les uns devant les autres, faisant souvent de nombreux blessés, puisque chaque participant veut aller plus vite pour gagner !
Des courses de patins à glace ont également lieu sur le Grand Canal lors de grandes gelées, occasionnant des moments d'amusement à regarder ces figures acrobatiques, car il faut rester debout. Le duc de Croÿ tenté par l'expérience, rapporte qu'en mars 1751 « de bons patineurs faisaient deux fois la longueur du canal qui a huit cent toises en six minutes, ce qui ferait six lieues et un tiers en une heure ! »
La destinée des traîneaux
Ce fut la fin des courses de traîneaux après la Révolution. En 1794, la Convention décide « de purifier les Petites Ecuries du cy-devant tyran » : les carrosses sont brûlés en place publique, les traîneaux « représentant des lions, des tigres, des aigles qui sont à l'effigie du caractère de ceux qui s'en servaient » font l'objet d'échanges avec les étrangers.
Six traîneaux de Versailles sont retrouvés en novembre 1797, parmi les dix-sept figurants dans l'inventaire du Dépôt des Fêtes nationales de la République française. La future impératrice Joséphine fait une dernière sortie en traîneaux en février 1803. Entreposés dans le Dépôt des Menus Plaisirs, ils rejoignent le nouveau musée des Voitures de Trianon, inauguré en 1851.
D'après la Revue du Château de Versailles