Pourquoi l'opération Barbarossa ?
A l’origine de la décision allemande de déclencher l'opération Barbarossa se trouve un pari stratégique de la part d’Adolf Hitler. Confronté à la résistance inattendue de l’Empire Britannique après la chute de la France, le dictateur redoute l’attitude de Moscou qui a profité du pacte germano-soviétique pour avancer ses pions en Europe orientale. D’autre part Hitler sait qu’économiquement l’Allemagne est à la merci du bon vouloir de Staline. Il décide donc de mettre sur pied une campagne décisive pour s’emparer de l’essentiel de la partie européenne de l’URSS. Cela permettra au IIIe Reich d’assurer sa survie économique à long terme (par l’exploitation tant des ressources que des hommes) et de conjurer le spectre d’une guerre sur deux fronts en privant Londres de son dernier allié potentiel sur le continent.
La planification de cette guerre de conquête, qui doit fournir à l’Allemagne l’espace vital évoqué dans Mein Kampf, débute à la fin de l’été 1940. Si le travail fourni par les états-majors est méticuleux, il se base sur des informations erronées. Constante de la seconde guerre mondiale, les services de renseignements allemands sous-estiment gravement les effectifs de l’armée rouge tant en hommes qu’en matériel. Imprégnés d’idéologie nazie les officiers allemands, négligent les capacités de mobilisation politique et industrielle de l’URSS. Pariant sur une campagne courte, ils font l’impasse sur la préparation de matériels hivernaux…une erreur qu’ils paieront au prix fort en décembre 1941.
Dans sa directive n°21 du 3 mars 1941 le führer expose sa conception de la guerre qui s’annonce à l’est. Il s’agit « d’un affrontement entre deux idéologies…L’intelligentsia judéo-bolchévique…doit être éliminée ». A cet effet il est prévu de recourir à des groupes d’intervention (« Einsatzgruppen ») qui agiront à l’arrière du front. Ces unités aux ordres de la SS, seront les responsable de la tristement célèbre « Shoah par balles. »
Un rapport de force initial favorable aux allemands
Le Groupe d’armées centre (49 divisions, 2 Groupes Blindés, Maréchal Von Bock) est le plus puissant. Il doit anéantir par des encerclements le gros des forces soviétiques en Russie blanche, puis pousser jusqu’à Moscou. Enfin le groupe d’armées Sud (41 divisions dont plusieurs roumaines, slovaques et hongrois, Maréchal Von Rundstedt) doit s’emparer des richesses Ukrainiennes avant de progresser dans la direction du Caucase. Ces 3 groupes d’armées peuvent compter sur l’appui de la Luftwaffe, qui aligne près de 4000 appareils à l’est.
D’autre part Staline estime, malgré de nombreux rapports et indices, qu’Hitler n’attaquera pas et que les préparatifs allemands ne sont que du chantage. Ainsi le 22 juin les formations soviétiques seront prises au dépourvu, recevant même des ordres leur interdisant de provoquer les forces allemandes.
Les premières semaines de Barbarossa sont un désastre pour l’URSS. En juillet 1941, Staline qui semble avoir un temps chancelé moralement à l’annonce de l’attaque allemande, intime à ses généraux une résistance à outrance qui va favoriser les plans allemands misant sur la mobilité. Les formations soviétiques, malgré une résistance parfois acharnée, seront bien souvent encerclées par les Panzerdivisionen et les troupes allemandes avant d’être écrasées par l’infanterie. Néanmoins le triomphe nazi ne peut être complet en raison des insuffisances de la Wehrmacht.
L'impossible succès de l'opération Barbarossa
En effet dans les immensités russes aux réseaux d’infrastructures sommaires la logistique allemande montre vite ses limites. La grande partie de l’armée allemande avance alors encore au rythme des chevaux, ce qui va vite ralentir le rythme des opérations. Les blindés conçus pour évoluer en Europe de l’ouest, supportent mal les efforts qu’on leur impose et le taux de disponibilité des matériels atteint des niveaux alarmants. La Luftwaffe elle peine à dénicher des bases convenables et ses chasseurs manquent de rayon d’action.
Enfin les effectifs engagés par Berlin sont encore insuffisants pour nettoyer totalement les zones conquises. De nombreux soldats soviétiques échappent ainsi à la captivité (sort très peu enviable) et forment des groupes de partisans. Enfin contrairement aux estimations optimistes du Haut Commandement allemand, l'armée rouge parvient à renaitre constamment de ses cendres en alignant toujours plus d’hommes et de matériels.
Sans souci des pertes, Staline jette sans cesse de nouvelles forces dans la bataille. Au jeu de la guerre d’attrition, le Reich mal préparé à une guerre longue, ne peut que perdre…
Le spectre de la guerre sur deux fronts
Tous ces éléments, combinés au sursaut patriotique des soviétiques et à la rigueur du climat russe vont valoir une gravissime déconvenue à Hitler. En décembre 41 ses forces épuisées parvenues aux portes de Moscou, vont devoir reculer pour la première fois de la guerre. Malgré des débuts éclatants Barbarossa n’aura pas tenu ses promesses. Malgré des millions de soldats morts, blessés ou prisonniers, l’Union Soviétique ne s’est pas effondrée pas et avec le soutien des Etats-Unis (en guerre contre l’Allemagne le 11 décembre 1941) elle peut même envisager de poursuivre la guerre de nombreux mois. Hitler a perdu son pari et va devoir gérer la guerre sur deux fronts, ce qu'il s’était juré d’éviter.
A partir du 28 juin, une nouvelle offensive est engagée, qui permet aux allemands de prendre Kharkov, un grand centre métallurgique, et de s'avancer en Crimée, mais s'enlisera dans le Caucase. Ce revers sera le prélude de la défaite de Stalingrad début 1943, qui enterrera définitivement les objectifs de Barbarossa.
Bibliographie
- Barbarossa - 1941. la Guerre Absolue. Passé composé, août 2019.
- Opération Barbarossa : L'invasion de la Russie du 22 juin 1941 à Stalingrad. Traduit de l'allemand par Raymond C. Albeck, de Paul Carell, 1964.
- Grand jeu de dupes : Staline et invasion allemande, de Gabriel Gorodetsky. Les belles lettres, 2000.