Joachim Murat, maréchal d'Empire et sabre de Napoléon

Histoire de France | Révolution et Empire

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Joachim Murat (1767-1815), maréchal de France et roi de Naples de 1808 à 1815, est considéré comme l’un des plus braves et sans conteste le plus extravagant des Maréchaux de Napoléon. Né fils d’aubergiste il devient roi et beau-frère d’empereur après s’être illustré parmi les plus grands sabreurs et charmeurs de l’épopée napoléonienne. Défenseur de l’idéal des Lumières, il devient en Italie un héros du mouvement nationaliste pour l’unification de la péninsule. Son destin incroyable, son panache, sa témérité et sa fin tragique en font un personnage que même les romanciers n’auraient osé inventer pour un comte du XIXème siècle…

 

Joachim Murat, fils de la Révolution

Joachim Murat né le 25 Mars 1767 à La Bastide-Fortunière (Lot) dans une famille d’aubergiste. Son père, membre de la petite bourgeoisie, fut plusieurs fois consul de sa municipalité et s’occupa de la gestion des biens communaux et des bénéfices ecclésiastiques. Cadet d’une fratrie de onze enfants, Joachim est justement destiné à la carrière ecclésiastique et après un passage au collège de Cahors il entre au séminaire de Toulouse dont il est renvoyé en 1787 après une querelle avec un condisciple.

Plus attiré par l’uniforme militaire que le collet de curé Joachim s’engage au 12ème régiment de chasseur à cheval des Ardennes alors stationné dans la ville. Ce changement d’orientation n’est pas du goût de sa famille qui se démène pour le faire licencier, en vain. Joachim reste cavalier dans la compagnie du chevalier Henry de Carrière. Bien dans ce nouveau monde Joachim effectue son service dans ce régiment qui devient 12ème chasseur à cheval de Champagne. Quand les bruits sur les événements de 1789 arrivent dans la région, Joachim est maréchal des logis. On ne sait pourquoi, peut-être pour avoir manifesté un intérêt aux idées nouvelles, Joachim doit quitter son régiment et rentre chez lui.

De retour dans le Lot il devient commerçant à Saint-Céré où il s’impose rapidement comme une figure de la vie politique locale : il fréquente les clubs et finit par être désigné pour représenter son canton à la fête de la Fédération à Paris le 14 Juillet 1791. Il rentre de la fête en escortant le drapeau offert par la municipalité de Paris.

Fort de son nouveau prestige Joachim réintègre son ancien régiment comme simple soldat. L’année suivante, en Février 1792, il est désigné avec deux autres soldats du département pour entrer dans la garde constitutionnelle de Louis XVI ! Mais ce corps est loin de répondre à ses attentes, il se plaint ouvertement de l’antipatriotisme qui y règne et démissionne en Mars. La lettre qu’il adresse à se propos à l’Assemblé législative entraine la suppression de cette garde.

De retour au 12ème régiment de chasseur Joachim redevient maréchal des logis puis sous-lieutenant quelques mois plus tard. De 1792 à 1793 il sert en Champagne et dans l’armée du Nord, il devient capitaine aide de camp du général d’Urre puis chef d’escadron.

Le sabre de Bonaparte

Le 13 Vendémiaire An IV (5 Octobre 1795) il est à Paris au moment où les sections royalistes marchent sur la Convention. Il est alors sous le commandement d’un général de brigade du nom de Bonaparte qui lui ordonne de foncer aux Tuileries pour ramener les quarante pièces d’artillerie de la plaine des Sablons : « Faites vite, et sabrez s’il le faut ! ». Murat s’exécute avec fougue et ramène au général les outils de sa victoire, c’est le premier acte d’une longue collaboration entre les deux hommes. Fait chef de brigade en 1796 il devient aide de camp de Bonaparte et le suit lors de la campagne d’Italie.

Là, il se fait remarquer à Dego et à Mondovi et obtient avec Junot l’honneur de rapporter à Paris les drapeaux pris à l’ennemi. Nommé général de brigade il retourne en Italie où on le retrouve à Gênes, à Livourne, sur l’Adige, dans le Tyrol… Il est légèrement blessé le 15 Septembre tandis qu’il progresse vers Mantoue. Quand le général Bonaparte met fin à la campagne d’Italie par le traité de Compo-Formio, le général s’est déjà taillé une solide réputation de cavalier émérite. En 1797 il est à Rome tandis que l’on proclamait la République romaine.

Fidèle de Bonaparte, Murat est de l’expédition d’Egypte. S’il ne se fait pas remarquer pour son goût des découvertes scientifiques il peaufine sur ce territoire mythique son image de sabreur. Il est de toutes les grandes batailles : dès le débarquement à Alexandrie, à la fameuse bataille des Pyramides (où il ne joue pas de rôle majeur), à Gaza, devant la tristement renommée ville de Saint-Jean-D’acre, et surtout, surtout, il se couvre de gloire en commandant l’avant-garde de l’armée lors de la bataille d’Aboukir. Dans une charge mémorable il repousse les Turcs à la mer ! Le projet de débarquement anglo-turc échoue et Bonaparte se réjouie de pouvoir effacer le souvenir de la défaite navale d’Aboukir par celui de la victoire terrestre du même nom. En remerciement de cette victoire Murat est promu sur le champ de bataille au grade de général de division le 25 juillet 1799. 

De retour en France aux côtés de Bonaparte, il joue un rôle majeur lors du coup d’état du 18 Brumaire (9 et 10 Novembre 1799). Alors que l’affaire tourne au vinaigre au Conseil des Cinq-Cents, le président qui n’est autre que Lucien Bonaparte demande l’expulsion des députés. A la tête d’une troupe de grenadiers le général entre dans le Conseil en s’écriant « Citoyens, vous êtes dissous ! » puis, devant l’agitation des députés, il ordonne brutalement à ses hommes « Foutez-moi tout ce monde là dehors ! ». Du côté des députés c’est la débandade, ils fuient par toutes les issues, par les fenêtres… Lucien en ralliera suffisamment pour voter la fin du Directoire et l’avènement du Consulat qui voit Bonaparte prendre les rênes du pouvoir.

Lors des émeutes de Vendémiaire, en Italie, en Egypte, en Brumaire, il fut toujours aux côtés de Bonaparte et lui sauva la mise plusieurs fois. Comment ce dernier aurait-il pu lui refuser la main de sa sœur tombée éperdument amoureuse du fougueux sabreur ? Ainsi le 20 Février 1800 Murat (33 ans) épouse Caroline Bonaparte (18 ans) et devient le gendre du Premier Consul Napoléon.

Lors de la seconde campagne d’Italie le jeune époux remonte sur son cheval. Devenu lieutenant général en chef de l’armée de réserve, Napoléon lui confie également le commandement de la cavalerie. Une telle masse de cavalerie utilisée ensemble sous les ordres de Murat semblait à Napoléon Ier un outil tactique redoutable. Le général passe le col du Grand-Saint-Bernard et prend Milan. Puis il passe le Pô et rejoint son beau-frère à Marengo où il reçoit un sabre d’honneur. Il retourne ensuite sur Dijon avant de retourner en Italie, devenue son champ de bataille de prédilection, pour occuper la Toscane et chasser les Napolitains des Etats-Pontificaux. Il signe une paix avec le roi de Naples et devient commandant de l’armée d’observation du Midi dans ce royaume. Il en profite pour s’emparer de l’île d’Elbe.

De retour en France, la paix lui permet de se relancer dans ce milieu de la politique locale. Il est nommé président du collège électoral du Lot et devient député du Corps législatif en 1804. Il devient ensuite gouverneur de Paris. Il occupe ce poste lors de l’affaire du Duc d’Enghien mais, passif, il se contentera de signer l’ordre de jugement.

Murat, Maréchal d’Empire

Avec la proclamation de l’Empire Murat, présent au sacre, reçoit tous les honneurs : il devient Maréchal d’Empire, grand amiral, grand prince, grand aigle de la Légion d’Honneur et chef de la 12ème cohorte. Membre clef de la nouvelle noblesse il accumule une collection de tableaux dans son hôtel particulier de l’Elysée.

Quand la guerre reprend avec l’Autriche en 1805 le Maréchal Murat retrouve le commandement de la cavalerie. Il pénètre en Bavière et marche sur Vienne où il entre sans résistance. Par ruse il parvient à faire croire aux Autrichiens qu’un armistice est signé et s’empare des ponts sur le Danube avant qu’ils ne soient détruits. Il culbute ensuite un corps russe en Moravie avant d’aller chercher sa part de gloire sous le soleil d’Austerlitz. Par un décret impérial du 30 Mars 1806 il devient grand duc de Berg et de Clèves. Il prend très au sérieux son titre et s’empresse d’agrandir son duché en annexant des villes dévolues à la Prusse, notamment la forteresse de Wessel. Il se soucie également de négocier avec Napoléon une nouvelle tarification des exportations. Il s’attachera personnellement à avoir un œil sur l’uniforme des hommes de son duché : il fait venir du tissu de Damas, et choisit les couleurs (dolman cramoisi, pelisse couleur « ventre de biche »…).

Mais pour Murat la guerre n’est pas finie, il doit rapidement s’élancer contre les Prussiens et participe à la bataille de Iéna où la cavalerie fait 14.000 prisonniers. Puis il prend en chasse le prince de Hohenlohe qui se rend avec tout son corps d’armée (16.000 hommes, 60 canons et autant de drapeaux) pour finir par la prise de Stettin. Mais la guerre ne prend pas fin avec l’anéantissement de la Prusse, reste les Russes qui ne lâchent rien.

Le Prince entre en Pologne dans un uniforme des plus chamarré (brodé de fils d’or avec un pantalon large de couleur amarante galonné d’or, des bottes de cuir jaune, un chapeau garni de plumes blanches et un plumet de quatre plumes d’autruche tombantes avec une aigrette de héron), il traverse Varsovie où il est acclamé. Il passera tout le mois de Janvier dans cette ville où Poniatowski lui offre le sabre d’Etienne Bathori (roi polonais de la fin du XVIème siècle). Cette nation ne demande qu’à être indépendante, le Prince rêve d’en prendre la tête…

Mais la restauration de la Pologne n’est pas dans les plans de son beau-frère d’Empereur, il reprend le chemin de la guerre dans le froid et la neige pour livrer la terrible et sanglante bataille d’Eylau. Le sort de la bataille est indécis, quand Napoléon décide d’engager sa cavalerie il lance à Murat « Nous laisseras-tu dévorer par ses gens-là ? ». Il n’en faut pas plus pour que le maréchal s’élance avec fougue dans la plus grande charge de cavalerie de l’Empire (qui inspire Balzac pour Le colonel Chabert): le centre ennemi est culbuté et l’armée française sauvée.

Tout le monde s’étonne qu’il survive à toutes ses charges tant ses tenues excentriques en fond une cible facilement repérable : à Eylau il charge avec un justaucorps blanc, un pantalon rouge, un bonnet fourré rehaussé de plumes et une pelisse de fourrure. Abasourdie, l’armée russe est écrasée à Friedland et l’Empereur des Français rencontre le Tzar de Russie à Tilsit. Lors des festivités le Prince se fera remarquer par l’extravagance de ses tenues, Napoléon agacé lui ordonnera « Allez mettre votre uniforme de général, vous avez l’air de Franconi » (célèbre acteur de théâtre).

En juillet 1808 Murat reprend du service dans la péninsule ibérique, il est nommé lieutenant général de l’Empereur en Espagne. Il est chargé entre autres de tenir les places fortes espagnoles pour assurer les arrières de l’opération de Junot au Portugal. Il prend ses fonctions sans savoir ce que trame Napoléon et se retrouve à gérer sur place les conséquences du « guet apens » de Bayonne par lequel Napoléon dépose le roi d’Espagne Charles IV au profit de son fils Ferdinand VII. Les Madrilènes se soulèvent, s’attaquent aux soldats français… La ville est à feu et à sang, les Mamelouks effraient les insurgés autant qu’ils attisent leur haine. Murat ne rétablit l’ordre que dans un déchainement de violence et une répression sanglante. C’est le fameux épisode du Dos et Tres des Mayo immortalisé par Goya.

La monarchie des Bourbons d’Espagne se déchire d’elle-même, le trône est à celui qui voudra la saisir et il est fort probable qu’à ce moment là le Prince ait estimé qu’il pouvait être légitime dans cette capitale qu’il venait de soumettre. Il n’en fut rien, l’Espagne revint à Joseph Bonaparte, ex-roi de Naples. Murat est sommé de choisir entre cette couronne de Naples et celle du Portugal : il choisira l’Italie, terrain où il a déjà commandé et qu’il connait bien.

Il voit avec soulagement arriver Savary qui prend la tête de l’Espagne en attendant l’arrivée de Joseph Bonaparte. Lui n’en peut plus, il supporte mal de devoir commander contre le sentiment national d’un peuple, il sait de plus que son autorité est remise en cause depuis qu’un autre roi a été nommé. Il en était tombé malade, victime de fortes fièvres, d’insomnies, de migraines et de vomissements. Avant de prendre possession de son royaume il va flâner à Paris prendre les eaux en famille en Bourgogne où il rencontre son ami Lannes.

Joachim Murat, roi de Naples 

Joachim Ier roi de Naples et de Sicile est acclamé dans son royaume. Il entre dans Naples le 6 Septembre 1808 sous les arcs de triomphe d’une ville en liesse. Il faut dire que ses sujets s’attendaient à pire en apprenant la venue d’un Français. Ils voient arriver un grand brun, parfaitement dans le type méditerranéen, avec une grande réputation de sabreur et des uniformes richement ornés qui correspondent parfaitement à l’esprit italien. Les consignes de l’Empereur sont claires, si Murat est parfaitement roi devant ses sujets il n’est, devant Napoléon, qu’un vice-roi, pour ne pas dire un grand préfet…
 
Mais il ne l’entend pas ainsi et va prendre à cœur de régner sur son royaume. Continuant l’œuvre de Joseph il réforme à tour de bras dans tous les domaines : création d’un drapeau et d’une armée nationale, assouplissement de la conscription, création d’une école polytechnique, instauration de l’état civil, promulgation du Code civil, lutte contre le brigandage, création de tribunaux de première instance…Il se veut un héritier des Lumières. Il créé également une école de Marine car il sait que sans cette arme il ne pourra jamais récupérer la Sicile contrôlée par les Anglais. Il s’attache également à embellir sa capitale et lance des fouilles archéologiques à Herculanum, ville romaine détruite par l’éruption du Vésuve. La situation économique est catastrophique, l’état endetté, Murat réduit les subsides des ministères, rationalise la perception de l’impôt et diminue d’autorité l’intérêt de la dette de 5% à 3% (au grand dam de la France).
 

Ne pouvant supporter les Anglais qui le nargue à vue de sa capitale il les chasse de Capri en Octobre 1808. Le commandant anglais n’était autre qu’Hudson Lowe, le futur geôlier de Napoléon à Sainte-Hélène.

Depuis Naples le roi Joachim Ier voit d’un mauvais œil l’alliance autrichienne et le mariage de Napoléon avec Marie-Louise en 1810. Tout un chacun sait que les Autrichiens soutiennent la légitimité des Bourbons à Naples et ont eux-mêmes des vues sur l’Italie. Peu à peu Murat va donc valoriser ses propres intérêts en prenant contact avec les mouvements nationalistes italiens. Pour s’attacher à eux il ordonne même le 14 Juin 1811 que tous les étrangers bénéficiant d’un emploi civil doivent se faire naturaliser. Voilà qui n’était pas forcément pour plaire aux Français et Napoléon furieux répliqua en décrétant que le Royaume des Deux-Siciles faisant partie de l’Empire, il en résulte que tous les citoyens français sont citoyens des Deux-Siciles.

Mais la tension entre les deux hommes n’empêche pas Murat de reprendre la tête de la cavalerie lors de la campagne de Russie. L’ennemi recule jusqu’à la Moskova, terrible et indécise bataille où le roi s’illustre particulièrement. Sa bravoure et son panache en on fait une légende jusque dans les rangs des Cosaques qui l’admirent tout particulièrement. En pleine bataille il les salue de sa cravache. Après la victoire, le maréchal traverse Moscou, la dépasse, mais l’incendie de la ville contraint l’armée française à la retraite. Pour faire taire les troubles nés de l’affaire Malet et reconstituer une armée Napoléon rentre en France, confiant au maréchal le commandement de l’armée. Ce dernier tient son poste puis finit par céder à son tour le commandement à Eugène de Beauharnais pour retourner à Naples.

De retour dans son royaume Murat s’empresse d’entamer des pourparlers avec l’Autriche et l’Angleterre. Cependant il ne s’est pas encore détourné totalement de la cause de Napoléon et le rejoint en 1813 pour prendre le commandement de la cavalerie. Il combat à Dresde mais à Leipzig l’armée impériale est vaincue. Dès lors il considère qu’il doit agir non plus en Prince d’Empire mais en Roi et ne prend en compte que les intérêts de son royaume. Sa femme, Caroline, le pousse également à aller en ce sens. Le 11 Janvier 1814 il signe la paix avec l’Autriche, sauvant son royaume en trahissant Napoléon.

Mais le répit est de courte durée. A peine Napoléon déchut et envoyé sur l’île d’Elbe, Talleyrand soutient au congrès de Vienne que le royaume de Naples doit revenir aux Bourbons. Murat s’inquiète, son royaume est menacé. Il envisage de se défendre en Italie même en s’appuyant sur les mouvements nationalistes qu’il pourra aisément monter contre les Autrichiens qui veulent garder leur zone d’influence sur le Nord de la péninsule. Il est aussi au courant de ce qui se trame sur l’île d’Elbe, si Napoléon fait son grand retour ce sera le moment de le suivre pour vaincre ou périr.

Quand Napoléon débarque à Golfe Juan le 1er Mars 1815, Murat saisit l’occasion pour réaliser son rêve : soulever et unifier toute l’Italie avec le soutien des nationalistes. Le 18 Mars, il déclare la guerre à l’Autriche lance la célèbre proclamation de Rimini : « Un cri se fait entendre depuis les Alpes jusqu’au détroit de Scylla et ce cri est : l’indépendance de l’Italie ! ». Dès lors il n’est plus un simple roi placé par les Français, il devient pour l’historiographie italienne un héros national, un héraut du Risorgimento. Cela explique entre autres la réhabilitation du personnage dans la péninsule à la fin du XIXème siècle, quand l’unification devient effective, et la présence encore de nos jours de sa statue à Naples.

La campagne menée par le roi commence sous de bonnes augures et les Autrichiens sont repoussés jusqu’au Pô, il libère Bologne sous les acclamations d’une foule en liesse. Mais la contre offensive lui est fatale : vaincu à Tolentino il est contraint de battre en retraite et de fuir. Il s’embarque et cherche à rejoindre Gaëte, mais la présence de la flotte anglaise l’oblige à accoster en France tandis que les Bourbons réinvestissent leur royaume de Naples. Sa femme Caroline, réfugiée dans un navire anglais, entend la foule acclamer le nouveau souverain Ferdinand IV.

Murat, prince déchu

De retour dans sa patrie natale Murat attend l’appel de Napoléon. Ce dernier s’apprête à faire la guerre et qui dit guerre dit armée, qui dit armée dit cavalerie, qui dit cavalerie dit Murat ! Mais l’attente est vaine, Napoléon ne l'appelle pas et c’est Ney qui mènera les charges de cavalerie à Waterloo. Beaucoup dirent que le sort pût être différent si un cavalier émérite comme lui avait eut le commandement face aux carrés anglais… Affirmation vouée à rester du domaine de l’uchronie. La France en proie aux coalisés, Murat s’embarque pour la Corse où il reçoit un accueil chaleureux, des soldats se rallient à lui.
 
Pourchassé à Vescavio par le général Verdier, il se rend à Ajaccio où les Gardes Nationaux lui rendent les honneurs. Mais son but n’est pas de mener la résistance en Corse, il veut avant tout reprendre son royaume, même avec une poignée d’hommes : l’audace est une constante chez Murat. Le soir du 28 Septembre1815 il embarque avec 250 hommes sur la flottille de Barbara, un ancien corsaire qu’il avait fait baron napolitain et capitaine de frégate. Ce dernier a-t-il comploté la perte de son ancien souverain ?
 
Alors que Murat voulait débarquer à Trieste, Barbara prétexte le besoin de se ravitailler en vivre pour accoster à Pizzo où, dit-il, il a encore des partisans. Par malheur un coup de vent disperse la flottille et seulement deux navires, soit une trentaine d’hommes, accostent avec lui. En lieu et place de partisans ils trouvent à Pizzo une population hostile par le souvenir de l’impitoyable rigueur avec laquelle Murat avait réprimé le brigandage dans la région. Après quelques altercations il est fait prisonnier et transféré au fort de Pizzo : nous sommes le 8 Octobre 1815.
 
Sachant le sort qui lui est réservé Murat écrit une dernière lettre à sa femme. Il refuse de se présenter devant une Cour Martiale pour la mascarade de procès qu’on lui propose. Sur ce point il n’avait pas tort puisque quand la Cour Martiale commence le procès l’ordre d’exécution est déjà arrivé de Naples… Dans l’après midi du 13 octobre 1815 il apprit sa sentence, il eut une demie heure pour recommander son âme à Dieu avant qu’on le dirige vers la place du château où attendait le peloton d’exécution.
 
Avec une simplicité stupéfiante Joachim Murat leur demanda sans détours « où je dois me poser ? ». Il refusa la chaise et le ruban qu’on lui proposait. Il déboutonna sa veste pour montrer son torse et ordonna à ses bourreaux « Soldats, respectez le visage et visez le cœur… Tirez ! ». A cet instant il s’écroule, frappé au thorax et à la main. Comme il semblait encore vivre l’officier ordonna de tirer deux autres coups de fusils. Son corps est ensuite jeté dans une fosse commune. Mais en se débarrassant du corps les Bourbons n’ont pu se débarrasser de la légende de celui qu’on appelait « le Roi des Braves et le plus brave des Rois ».

Bibliographie

- Le Sabre de l'Empire: Joachim Murat, roi de Naples, de Michel Peyramaure. Robert laffont, 2015.

- Jean Tulard, Murat, Editions Fayard, 2009.

Maréchaux d'Empire: La gloire pour destin, de François Houdecek. Passés Composés, 2023.

 

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