L'agonie du classicisme
Le terme «romantique» provient de l'adjectif allemand romantisch. Il revêt une signification complexe et floue. Certains le rattachent au terme « roman» qui signifie tout d’abord « langue vulgaire (par opposition au latin) », puis « récit en langue vulgaire ». Mais le romantique allemand Friedrich von Schlegel l’oppose à « classique » en parlant de littérature. Il s’agit donc du refus d’une esthétique dépassée. Un mouvement préromantique se développe en Allemagne et en Angleterre dès la fin du XVIIIe siècle. Quant au romantisme, il apparaît vers 1800 dans les littératures germaniques. En France, on ne parle pas de romantisme avant 1815. Seuls Rousseau et Chateaubriand renouvellent les thèmes et la sensibilité classiques.
Le classicisme est à l’agonie. Une bonne partie du public réclame un changement radical car, suite aux bouleversements politiques et sociaux récents, les règles dramaturgiques perdent de leur sens et de leur saveur. Ce public apprécie le théâtre de Shakespeare, les romans historiques de Walter Scott et Les Souffrances du jeune Werther de Goethe (1774). Comme dans les autres pays européens, il s’intéresse de près au folklore.
Le romantisme littéraire en France
Deux ouvrages fondamentaux de Mme de Staël (1766-1817) appellent un renouveau littéraire en France : De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (vers 1800) et De l’Allemagne (1813). L’auteur souligne les exigences de sa période. Au nom de la relativité esthétique, Mme de Staël réclame un décloisonnement des genres pour libérer la sensibilité et l’individualisme.
Si Hugo reste relativement modéré au début des années 1820, il devient le chef de file du mouvement dès 1827, avec sa préface de Cromwell, véritable manifeste littéraire. Le théâtre, miroir de la vie universelle, ne doit pas respecter les règles de bienséance qui placent un voile entre le drame représenté et le spectateur. Hugo prône la juxtaposition du sublime et du grotesque au sein d’une même pièce. Il s’insurge contre la règle des trois unités.
Ses revendications, choquantes aux yeux des classiques, aboutissent à la bataille de 1830, quand il fait représenter Hernani ou l'Honneur castillan, à la Comédie-Française. Si certains arrêtent la période romantique à 1848, ils négligent le fait que l’esprit de ce mouvement ne s’efface pas en quelques années. L’opposition à la tradition marque les esprits jusqu’à nos jours et les écrivains dits symbolistes (Baudelaire, Mallarmé, Verlaine, Rimbaud, etc.) demeurent les héritiers directs du mouvement, sans pour autant le reconnaître.
Les pièces d' Alfred de Musset sont représentatives du théâtre romantique du XIXe siècle. Elles mêlent à des thèmes légers (l’intrigue amoureuse, les personnages fantaisistes) des éléments dramatiques (la mort d'un des protagonistes). Les héros de Musset connaissent un destin tragique : c’est le cas par exemple de Coelio dans les Caprices de Marianne ou de Lorenzaccio, jeune débauché qui tente de libérer son peuple et qui meurt méprisé de tous. À travers eux, l’auteur exprime ses espoirs déçus et son mal de vivre. Ces œuvres profondes figurent aujourd’hui parmi les plus célèbres du théâtre français.
Au milieu du XIXe siècle, la sensibilité romantique laisse la place au développement d’un courant « réaliste » porté par Baudelaire, Hugo ou Balzac.
Le romantisme français dans les arts
Dans le domaine pictural, David règne sur la peinture jusqu’en 1815. Il s’inspire de l’Antiquité et élabore des compositions statiques et austères. Son élève, Gros, rompt rapidement avec l’austérité de son maître. Il innove avec sa puissance chromatique et son souffle épique, visibles dans Bonaparte visitant les pestiférés de Jaffa (1804), tableau qui choque les partisans de l’esthétique classique. Deux grands peintres français reconnaissent leur filiation à Gros : Théodore Géricault et Eugène Delacroix. Le Radeau de la Méduse (1819) de Géricault répond à la tradition académique.
En 1831, Delacroix termine La Liberté guidant le peuple pour commémorer la révolution de juillet 1830. Il y manifeste son sens du drame, du mouvement et de la couleur. La femme à poitrine dénudée représente la liberté et la victoire. Delacroix manifeste également un goût pour les sujets orientaux qu l’on retrouve également chez Hugo. Dans le domaine musical, le romantisme français est représenté par Hector Berlioz et César Franck.
Bibliographie
- Le Romantisme en France et en Europe, de Gérard Gengembre. Pocket, 2003.
- Histoire du romantisme, de Théophile Gautier. Les introuvables, 1993.
- Le romantisme français, essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle, de Pierre Lasserre. Hachette, 2016.