Selon l'Ancien Testament, l'Arche d'Alliance abritait les dix commandements que Moïse reçut de Yahvé sur le mont Sinaï. Déposée le Saint des Saints du Temple de Jérusalem, elle disparait après la destruction de l'édifice en 586 avant notre ère. Depuis le Moyen Age, sa localisation fait l'objet de nombreuses spéculations. Ainsi à Aksoum en Ethiopie se déroule la fête de Timkat où un coffre voilé symbolisant l’Arche d’Alliance est emmené en procession dans la ville. Dans tout le pays les églises détiennent un tabot, une plaque symbolisant les tables de la loi et par là l’Arche elle même. Cette ville prétend détenir la véritable Arche dans l’église Sainte Marie de Sion où un seul prêtre a le droit de pénétrer pour veiller sur la relique.
L'Arche d'Alliance, Salomon et la reine de Saba
Selon la tradition, l’Arche d’Alliance aurait servi à recueillir les Tables de la loi confiées à Moïse sur le Mont Sinaï. Symbole de la présence de Dieu parmi son peuple, elle aurait beaucoup voyagé, notamment durant le périple du peuple juif en Egypte, avant d’être conduite à Jérusalem par le roi David. Elle aurait été entreposée dans les Saint des Saints du temple de Jérusalem et plus aucune source, dont la bible, n’en fait mention par la suite. Détruite lors d’une guerre ou d’un tremblement de terre, déplacée pour être protégée ? Nul ne sait.
Quel crédit accorder à ce mythe qui prétend faire de l’Ethiopie la gardienne de la relique la plus sacrée du Judaïsme et même des trois monothéismes ? Ces prétentions sont justifiées par les autochtones par un manuscrit du XIIIeme siècle, le Kébra Nagast qui raconte que le royaume de Saba fut l’Ethiopie et que lors de sa visite à Salomon la reine tomba enceinte. A son retour en Ethiopie naquit Ménélik, « fils du sage », qui retournera chez son père d’où il ramènera l’Arche d’Alliance.
Cette légende peut paraître sans fondement mais on trouve en Ethiopie une communauté de « Juifs noirs » suivant les rites de l’ancien judaïsme, arrêtés en Israël depuis le règne de Josias. Il y aurait donc bien eu une migration ancienne depuis le pays hébreux.
L'hypothèse de Graham Hancock
Le travail de Graham Hancock ouvre une hypothèse intéressante : le Kébra Nagast est un simple récit populaire comblant un passé oublié mais la migration de l’Arche a bien eu lieu. Selon lui, vers 650, sous le règne de Mannassé, roi idolâtre de Jérusalem, des prêtres Lévites auraient voulu protéger l’Arche en l’emmenant dans un pays lointain. Ils auraient rejoint l’île d’Eléphantine où on trouve le seul autre temple Juif, peut être justement créé par ces prêtres pour servir de nouvel écrin à l’Arche.
L’archéologie prouve la destruction par les Egyptiens (en fait par des Perses mais fomenté par des prêtres de Khnoum) de ce temple au Veme siècle avant JC. Il se pourrait qu’alors les prêtres aient embarqués sur le Nil, l’aient descendu jusqu’au Takazé et se soient installés sur l’île de Tana Kirkos où l’Arche auraient séjournée 800 ans avant d’être déposée à Aksoum lors de la conversion au christianisme de la région sous le roi Ezana vers l’an 300.
Derniers indices de cette épopée: la communauté des Juifs noirs, ayant des rites très anciens (dont les sacrifices) datant d’avant les réformes du roi Josias. Ils seraient les descendants des convoyeurs de l’Arche.
Les Templiers gardiens du secret
La présence de croix pattées dans les églises éthiopiennes laissent supposer à Hancock que les Templiers auraient retrouvé l’Arche en Ethiopie en revenant avec le roi Lalibella, l’y auraient laissée et gardée. Les voyageurs portugais ont rapporté que les églises chrétiennes d’Ethiopie ont été faites par des hommes blancs. L’église de la ville de Lalibella est dédiée à la Vierge, dont le lien avec l’Arche est fort. Cette église aurait été construite par Lalibella inspiré par Jésus, le roi était adossé à un pilier qui trône encore dans l’église, entouré d’un voile pour le dissimuler. Dessus seraient gravé :
SADOR
ALADO
DANAT
ABERA
RODAS
Ce serait le « carré magique » templier, qui dans sa forme exacte est :
Mais contrairement à ce qu’affirme Hancock les carrés magiques non rien de typiquement templier, leur origine est pré-chrétienne et l’un d’entre eux fut retrouvé dans les ruines de Pompéi. Un géographe arménien, Abou Sala (/Abu Salih), écrit en 1207 sur son voyage à Axoum (Eglises et monastères d’Egypte) ; il raconte que lors de la fête du Timkat l’Arche est portée en procession par deux hommes blancs, l’un blond et l’autre roux.
« Les Abyssiniens possèdent aussi l’Arche d’Alliance dans laquelle se trouvent deux tables en pierre gravées par le doigt de Dieu avec les Dix Commandements qu’il laissa aux fils d’Israël. L’Arche d’Alliance se trouve sur l’autel, mais pas aussi haut que celui-ci, elle n’arrive qu’à la hauteur du genou d’un homme, et elle est recouverte d’or. Sur le couvercle il y a plusieurs croix en or et cinq pierres précieuses, une à chaque coin et une au centre. La liturgie de l’Arche se célèbre quatre fois par an, dans le palais du roi [Lalibella] ; et lorsqu’elle est sortie de l’église et emmenée à la chapelle du palais elle est recouverte d’un dais et portée par un grand nombre d’israélites, descendants de la famille du prophète David, qui ont la peau blanche et les cheveux rouges. »
La fête est encore célébrée et chaque église comporte un Tabotat, une plaque symbolisant l’Arche. L’Arche reposerait dans la petite chapelle St Marie de Sion où seul le « gardien de l’Arche » peut la voir, ce prêtre est désigné à vie à ce poste et ne s’éloigne jamais de l’Arche.
Lors de la fête du Timkat un coffre censé être l’Arche est emmené en procession dans les rues mais le gardien de l’Arche reste dans sa chapelle prouvant que, si l’Arche est à Axoum, elle ne sort plus même pour Timkat.
Cette tradition est également dans l’œuvre de Wolfram von Eschenbach, Parzival, écrite vers 1170/1220. Il est fait référence aux Templiers, présentés comme les gardiens du Graal (qui est dans son œuvre une pierre). Il écrit que la quête du Graal a menée les chevaliers au delà de Rohas, l’ancien nom de Lalibela. Perceval découvre son demi-frère Feirefis, d’origine africaine.
Seule cette version présente le Graal comme une pierre. Sur le porche de la cathédrale de Chartres se trouve une statue de Melchisédech, prêtre-roi d’Israel, qui tient dans sa main une coupe contenant une sphère parfois interprétée comme étant le Graal contenant une pierre.
Il semble néanmoins plus probable qu’il s’agisse du calice et du pain puisque ce dernier accueille Abraham (de retour de campagne).
Melchisédech, roi de Salem, apporta du pain et du vin ; il était prêtre du Dieu très haut. Il prononça cette bénédiction :
« Béni soit Abraham par le Dieu très haut qui créa ciel et terre, et béni soit le Dieu Très Haut qui a livré tes ennemis entre tes mains ». Genèse, chapitre 14.
Le pain et le calice semblent être ses attributs habituels dans ses représentations. Certains prétendent que l’Arche ait pu être ramenée d’Ethiopie en Israël lors de l'opération "tapis magique" qui rapatria des Juifs noirs par avion.
L'Arche d'Alliance en Ethiopie ?
En conclusion rien ne prouve réellement que l’Arche d’alliance se trouve en Ethiopie, les travaux de Hancock ne sont hélas qu’une suite de « possibilités ». La mythique relique joue un rôle majeur dans la religion éthiopienne et plus largement dans le sentiment d’identité nationale. A tel point qu’aucun dirigeant n’ose la sortir pour la faire étudier, le risque de démenti est bien trop grand. C’est peut être cette nécessité d’unir un peuple qui a entraîné la création de cette pseudo relique.
Le mystère sert la cause nationale éthiopienne, le fils de Saba est certainement un mythe et la migration des Juifs Noirs n’est pas une preuve du sauvetage de l’Arche vers l’Ethiopie. Enfin, si des chevaliers occidentaux sont venus jusque là, le culte qu’ils auraient porté à la relique ne garantit en rien son authenticité.
Sources
-
- Graham Hancock, Le mystère de l’Arche perdue, à la recherche de l’Arche d’alliance, Paris, Pygmalion, 1993