Les livres avant Gutenberg
les Hommes ont en permanence recherché le meilleur moyen de conserver les écrits et ont utilisé tour à tour des tablettes en argile, des papyrus, ainsi que des parchemins. Les premiers livres apparaissent dans les premiers siècles de notre ère, lorsque les Romains relient de petites tablettes de bois recouvertes de cire, qu'ils remplacent ensuite par des feuilles de parchemin. Pliées plusieurs fois et cousues ensemble, ces feuilles de parchemin révolutionnent la manière d'écrire.
Au IIe siècle apr. J.-C., les Chinois ont développé et largement répandu l'art d'imprimer des textes. L'impression de dessins et d'images sur des tissus précéda l'impression de mots en Chine d'au moins un siècle. L'invention du papier en 105 et l'expansion de la religion bouddhiste favorisèrent le développement de l'imprimerie en Chine. Les matériaux d'écriture traditionnels dans le monde occidental, le papyrus et le vélin, ne convenaient pas pour l'impression. Le papyrus était trop fragile pour être utilisé comme surface d'impression, tandis que le vélin, une fine surface faite de peaux d'animaux, était un matériau trop cher. Le papier, lui, était relativement résistant et bon marché.
Dès le Xe siècle, des imprimeries sont fondées en Asie. Elles pratiquent d'abord la technique de la gravure sur bois, puis à partir du XIVe siècle celle des caractères métalliques mobiles.
Au Moyen Âge, la diffusion du savoir se fait uniquement grâce aux ateliers de moines copistes, qui « éditent » de nombreux volumes destinés à la haute aristocratie, aux églises et aux monastères. Les premiers libraires apparaissent au XIIe siècle et commencent à vendre eux-mêmes le travail des moines, après avoir reçu l'autorisation de la part des autorités universitaires. Au XVe siècle, la demande en livres augmente sensiblement et on commence alors à produire des livres xylographiques fabriqués à partir de gravures de chaque page dans du bois dur et imprimés ensuite avec une presse rudimentaire.
Vers 1423 ou 1437, le Hollandais Laurens Janszoon semble avoir eu l'idée de découper des caractères dans des morceaux de bois, mais ceux-ci se révèlent trop fragiles et se déforment trop facilement en raison des variations de l'hygrométrie, c'est-à-dire du degré d'humidité dans l'air.
Invention de l'imprimerie par Johannes Gutenberg
Il faut attendre 1440 environ pour que l'imprimerie moderne fasse son apparition. On la doit à un orfèvre allemand du nom de Johannes Gensfleisch dit Gutenberg. Né à Mayence entre 1394 et 1399, celui-ci apprend le métier d'orfèvre, puis s'installe en 1430 à Strasbourg où il monte un atelier de taille de pierres précieuses avant de se lancer dans la fabrication de miroirs. Vers 1436, Gutenberg commence à s'intéresser à la reproduction des textes et se lance dans la mise au point d'une nouvelle technique d'impression.
Il s'agit de la célèbre Biblia Sacra latina en deux colonnes, dite « bible à 42 lignes » ou Bible de Gutenberg, dont il subsiste aujourd'hui 48 exemplaires. Publiée en février 1455, elle est tirée à 300 exemplaires et comporte 1 282 pages. Son succès est immédiat.
Rapide diffusion de l'imprimerie en Europe
C'est d'ailleurs à Mayence, en 1462, qu'une guerre civile va pousser les ouvriers typographes, élèves de Johannes Gutenberg, à fuir la ville épiscopale à feu et à sang : ils essaiment en Europe. L’imprimerie connaît un essor dans le Saint-Empire romain germanique, puis en Italie, à commencer par le monastère de Subiaco, près de Rome. Des imprimeries voient le jour dans 150 villes, en Italie, en France, en Hollande - pays où Laurent Coster, à Harleem, a un temps été tenu pour l’inventeur de l’imprimerie. De 1455 à 1500, près de 40000 titres, des incunables, seront imprimés, malgré un taux d’alphabétisation infime - il faudra attendre le XIXe siècle, période d’industrialisation, et les mesures favorisant l’instruction, pour que l’alphabétisation progresse.
Le premier livre publié à Paris, grâce à l’imprimeur d’origine germanique Ulrich Gering, s’achève par ce colophon (note finale) enthousiaste, traduit du latin : « De même que le soleil répand partout la lumière, ainsi Paris, capitale du royaume et nourricière des Muses, tu verses la science sur le monde. Reçois donc en récompense cet art d'écrire presque divin qu’inventa l’Allemagne. »
L'invention de l'imprimerie révolutionne la pensée
On estime généralement qu'entre 15 et 20 millions d'exemplaires sont imprimés avant 1500, ce sont les incunables. L'invention de Johannes Gutenberg révolutionne non seulement la façon de lire (les textes sont dorénavant plus aérés), mais a également des répercussions sur la façon de penser puisqu'elle permet d'avoir un accès direct aux textes bibliques et antiques. La culture s’émancipe peu à peu du pouvoir politique et religieux, et les idées humanistes se propagent à travers toute l'Europe.
En 1971, le projet Gutenberg est lancé pour proposer une version numérique libre de droits des ouvrages tombés dans le domaine public.
Pour aller plus loin
- Gutenberg et l'invention de l'imprimerie : Une enquête, de Guy Bechtel. Fayard, 1992.
- Gutenberg et l'imprimerie à caractères mobiles: Vers une révolution du livre (Grandes Inventions t. 1), de Sébastien Afonso. 50Minutes, 2015.
- L'Europe de Gutenberg : Le livre et l'invention de la modernité occidentale (XIIIe-XVIe siècle), de Frédéric Barbier. Belin, 2006.