La première civilisation de l’histoire de l’humanité naquit en Mésopotamie au Ve millénaire avant notre ère, dans le croissant fertile qui s’étend entre deux fleuves, le Tigre et l’Euphrate. Les Sumériens y développent une brillante civilisation et inventent le premier système d’écriture : l’écriture cunéiforme. Cette découverte est révolutionnaire dans l’évolution de l’homme ; elle marque le passage de la préhistoire à l’histoire. Le monde mésopotamien influença de son empreinte ses voisins du Moyen-Orient, l'Egypte pharaonique et les civilisations de vallée de l’Indus, avant d’amorcer son déclin vers 500 ans avant J-C. À l’avènement de l’ère chrétienne, il avait disparu.
La Mésopotamie, une terre entre deux fleuves
Le terme Mésopotamie, qui signifie « terre entre les fleuves », désigne la plaine inondable qui s’étend entre le Tigre et l’Euphrate (Irak actuel). Lorsque ces cours d’eau débordaient de leur vie, ils submergeaient les terres, déposant des couches de limons fertiles. Mais aride et incultivable en raison du manque de précipitations, cette région dut attendre l’invention des canaux d’irrigation vers 5500 ans avant J-C pour que se développent champs et cultures. Régulièrement arrosée, ces derniers fournissaient une récolte presque suffisante chaque année. Quelque mille ans plus tard, l’invention de la charrue en bois augmenta encore le rendement agricole. La population crût en conséquence et en 1300 ans avant J-C des centaines de bourg et de villages parsemaient la région.
La Mésopotamie manquait cruellement de ressources naturelles. Pour nombre d’activités, de la construction à la joaillerie, les matières premières comme le bois, les pierres et les minéraux étaient importées des régions voisines en échange des surplus de récoltes et d’objets artisanaux.
Le commerce, en pleine expansion, était contrôlé par de riches et puissants souverains, qui développaient des projets collectifs tels que réseaux d’irrigation et autres défenses contre les inondations. Celles–ci représentaient en effet un danger considérable pour les cultures et les habitations. On pensait alors qu’elles signifiaient la colère des dieux, et l’épisode biblique du déluge puise probablement ses origines dans les premiers mythes mésopotamiens.
Sumer et les premières Cités-Etats en Mésopotamie
Des 3100 avant J-C des douzaines de cités comptant jusqu’à 10 000 habitants occupaient le pays de Sumer dans la basse Mésopotamie. Etats indépendants, elles se soumettaient à un roi. Chaque cité est gouvernée par un roi qui tiendrait son pouvoir des dieux. Les plus connues sont celles de Kish, Lagash, Uruk et Ur. L’un des souverains les plus célèbres de cette période est le légendaire Gilgamesh, roi d’Uruk au XXVIIe siècle avant J.-C.
Ces cités-états étaient peuplées en majorité des cultivateurs, qui travaillaient hors les murs la journée pour réintégrer la ville soir. L’excédent des récoltes était stocké dans les temples et distribué aux corps de métiers non-agricoles : forgerons, potiers, maçons, commerçants, soldats et prêtres. Au cœur des cités sumériennes surgirent bientôt d’immenses bâtiments accolés au temple, gigantesques entrepôts pour la communauté toute entière.
Les premières cités-états sumériennes étaient très différentes de nos villes actuelles. La monnaie n'y ayant pas cours, elles n’avaient pas de marché. Les habitants recevaient nourriture, vêtements et autres produits en paiement de leur labeur, ou avaient recours plus simplement au troc. Si quelques familles aisées se faisaient construire des palais et des villas, la majorité de la population vivaient dans des logements modestes, sans eau courante ni sanitaires. Les constructions étaient en briques crues séchée au soleil ; en raison de sa rareté, la pierre était réservée pour la sculpture.
Le berceau de civilisation et l'invention de l'écriture
Vers 3400 ans avant J-C, les sumériens inventèrent une forme d’écriture primitive pour enregistrer les transactions commerciales. L’écriture cunéiforme, obtenue par l’empreinte de roseaux sur de l’argile humide, mit plusieurs centaines d’années à évoluer vers un système plus complexe. Ses usages se diversifièrent, de la consignation des codes de lois et des chroniques historiques à la transmission des messages, en passant par la rédaction de textes religieux et littéraires. Beaucoup de tablettes étant parvenues jusqu’à nous, les historiens ont pu brosser un tableau assez complet de la vie à cette époque, bien que les textes soient difficiles à interpréter.
Durant la période des premières dynasties (de 2900 à 2334 avant J-C), des conflits opposèrent les cités-états entre elles et la plupart s’entourèrent de murailles défensives. L’art de la guerre se raffina : les sculptures de cette époque dépeignent des soldats se rendant sur les champs de bataille à bord de chars à quatre roues tirés par des ânes. Vers 2334 avant J-C, Sargon, roi de la cité d’Akkad, parvint à conquérir toutes les cités-états mésopotamiennes.
Son domaine s’étendit vers le nord, jusqu’à la côte méditerranéenne. Unifiant des peuples et des cultures différents, il fonda le premier empire de l’humanité, qui ne survécut guère à son roi, les rivalités entre les cités-états reprenant de plus belle. L’une d’elles, Our, parvint à un moment à dominer la région mais le déclin sumérien fut inexorable. C’est la haute Mésopotamie qui domina ensuite la région avec les cités d’Àssour puis de Babylone.
Hammurabi et son code
Babylone fut à son apogée sous le règne d’Hammurabi (1792- 1750 avant J-C)., sixième roi de la dynastie amorrite de Babylone. Alliant la diplomatie à la force militaire, il acheve la conquête de Sumer et d’Akkad, s’empara de Larsa (1763), puis détruisit le royaume de Mari (1760) et étendit l’Empire babylonien à l’Assyrie et à l’Amourrou. Vers 1760 av. J.-C., le Babylonien est devenu le souverain d’un royaume unifié s’étendant du golfe Persique aux vallées du Tigre et de l’Euphrate (au nord) et à la côte méditerranéenne (à l’ouest).
Hammurabi opéra une synthèse entre la conception akkadienne de l’État centralisé et la conception sumérienne du roi investi par le dieu suprême, faisant de Mardouk, dieu de Babylone, le centre d’une sorte de «monothéisme politique» auquel étaient subordonnés les autres dieux suméro-akkadiens.
Ce roi s’employa à centraliser l’administration et fut un grand législateur, comme l’a confirmé la découverte à Suse, en 1901, du code d’Hammourabi, code de lois connu principalement par les inscriptions d’une grande stèle de basalte noire découverte par la mission française de J. V. Scheil et aujourd’hui conservée au Louvre. Cette stèle, sur laquelle se trouve l’un des textes juridiques les plus anciens au monde, révèle que femmes et enfants étaient considérés comme la propriété de l’époux, du père. Les peines étaient sévères : les délits mineurs étaient punis par la mutilation ou la mort.
La période néo assyrienne en Mésopotamie
En 1595 avant J-C, les hittites, originaires des montagnes d’Anatolie centrale, ou ils furent les premiers à utiliser le fer, envahirent et saccagèrent Babylone. La Mésopotamie entra alors dans un âge sombre qui dura 600 ans. Elle renaît vers l’an mille avant notre ère avec l’impulsion des villes assyriennes d’Assour et de Ninive. Une nouvelle dynastie gouverne alors le royaume d’Assyrie : on la définit comme la dynastie néo-assyrienne. Sargon II, dont le règne s’étend de 721 à 705 avant J.-C., permet à l’Empire néo-assyrien sa plus grande expansion. L’empire est alors très vaste, comprenant notamment l’Égypte, placée sous protectorat. Sargon II gouverne depuis la cité de Dur Sharrukin (aujourd’hui Khorsabad, en Irak). Ses successeurs, Sennachérib puis Assurbanipal, choisissent Ninive comme capitale. Au VIIe siècle, l’empire assyrien dominait l’ensemble du Moyen-Orient.
La société assyrienne semble avoir été organisée de façon très militaire. Même les arts se tournent vers des thèmes guerriers. Les palais royaux étaient ornés de bas-reliefs dépeignant des scènes de batailles et des ennemis vaincus soumis à la torture, réduits en esclavage ou exécutés. Toutefois en étendant son influence jusqu’à l’Égypte, conquise une première fois au VIIe siècle, l’Assyrie avait dangereusement dispersé ses ressources et ses armées. Des révoltes éclatèrent, et à la mort du roi Assurbanipal (669-627 avant J-C), l’empire tomba aux mains des babyloniens.
La période néo babylonienne
Nabuchodonosor II (604-562 avant j-c) fut le plus célèbre et dernier roi de Babylone. Il mit fin aux rébellions qui déchiraient son empire et fut intraitable envers ses ennemis. Il n’hésita pas notamment à déporter les Juifs vers Babylone. Ne reculant devant aucune dépense pour financer ses guerres et transformer la cité en capitale impériale (on lui doit les fameux jardins suspendus) il laissa un empire divisé et exsangue.
En 539 avant J-C, Babylone opposa une faible résistance aux armées du roi perse Cyrus le grand (559 -530 avant J-C). De son royaume sur le golfe persique, Cyrus avait conquis les Mèdes, au nord et envahit l’Anatolie. Il était à la tête d’un empire allant de la méditerranée alors hisse à l’Asie centrale, le plus vaste jamais connu. Après des siècles de culture à outrance le sol de la Mésopotamie s’épuisa. Ses voisins la surpassèrent en richesse et en population, et sous le joug étranger, cette civilisation, l’un des berceaux de l’humanité, sombra dans l’oubli.
Bibliographie
- La Mésopotamie: De Gilgamesh à Artaban (3300 av.-120 av. J.-C.). Belin, 2017.
- Histoire de la Mésopotamie. Dieux, héros et cités légendaires, de Pascal Butterlin; Ellipses, 2019.
- La Mésopotamie, de Jean-Claude Glassner. Les Belles Lettres, 2002.