L'invention de la machine à vapeur, c'est l'histoire d'un long processus de découvertes entamé dès l'antiquité. En 1679, le Français Denis Papin conçoit une sorte de Cocotte-Minute à vapeur pour étudier la pression des gaz. En 1712, Thomas Newcomen met au point la première machine à vapeur, qui sert à pomper l'eau de la mine de charbon de Dudley, en Angleterre. L'anglais James Watt sera à l'origine d'une autre grande innovation : l'utilisation de vapeur sous pression, qui améliorera considérablement le fonctionnement de la machine. Les brevets de Watt tombé dans le domaine public, de nombreux constructeurs améliorent le rendement et la fabrication. Bien qu'elle n'en soit pas à l'origine, la machine à vapeur a largement contribué à la révolution industrielle du XIXe siècle.
Utiliser de la vapeur pour produire de l'énergie mécanique
Le principe de la machine à vapeur est la transformation de l'énergie calorifique de la vapeur en énergie mécanique, par détente et refroidissement de la vapeur dans un cylindre équipé d'un piston mobile. La vapeur nécessaire à la production d'énergie ou de chaleur est en général fournie par une chaudière. Les chaudières les plus simples sont constituées d'un récipient contenant de l'eau, qu'on chauffe de manière à obtenir de la vapeur saturante.
Les systèmes usuels de chauffage domestique ont, généralement, une chaudière de ce type, mais les centrales à vapeur, utilisées pour la production industrielle d'énergie, ont une conception et des équipements auxiliaires plus complexes. Le rendement d'une machine à vapeur est souvent bas, et, pour cette raison, les machines à vapeur ont souvent été remplacées par des turbines à vapeur.
La mise au point de la machine à vapeur
Les premières recherches sur la vapeur date de l'antiquité. Jusqu’alors, la production mécanique n’avait pu faire de progrès importants, car les seules forces motrices disponibles étaient l’énergie physique, toujours limitée, de l’homme ou de l’animal. et des forces naturelles telles que le vent et l’eau, trop dépendantes de facteurs géographiques et climatiques. Dès l’Antiquité, on avait reconnu que la force élastique de la vapeur croît sous l’effet de la température. Dans ses Pneumatiques, Héron d’Alexandrie (vers le Ier siècle de notre ère) avait décrit l'éolipyle, sorte de sphère métallique creuse dont le mouvement de rotation était provoqué par l’échappement de la vapeur dans des tubes.
À partir des premières années du XVIIe siècle, on songea à utiliser la vapeur d’eau comme source d’énergie industrielle (travaux de Giovanni Battista Délia Porta, 1601; de Salomon de Caus, vers 1615; d’Edward Somerset, 1663). Les travaux de Torricelli et Guericke au XVIIe siècle se concentrent eux sur la possibilité de condenser de la vapeur.
Le physicien français Denis Papin expose, dans Description et usage de la nouvelle machine à élever l’eau, son idée d’une machine fonctionnant avec un piston se déplaçant selon un mouvement alternatif dans un cylindre, sous la poussée de la vapeur obtenue par chauffage d’une masse d’eau. Le premier moteur à piston fut mis au point en 1690, et fut utilisé pour le pompage de l'eau. La machine de Papin, plus qu'une curiosité, est une machine sommaire fonctionnant sous pression atmosphérique, la vapeur n'étant donc pas comprimée.
Les premières applications pratiques de ces recherches concernaient des pompes à vapeur destinées à évacuer l’eau des mines de charbon et de cuivre. En 1698, Thomas Savery inventa la première machine de pompage utilisant la vapeur. Beaucoup plus ingénieuse, la machine de Thomas Newcomen (1705) mettait en mouvement un piston qui faisait osciller un balancier relié par des tringles à une pompe placée au fond du puits.
Introduite dans les mines anglaises vers 1711-1712 cette machine connut de nombreux usages pendant plus d’un demi-siècle (on en comptait environ cent soixante exemplaires vers 1760). Mais le principe sur lequel elle reposait consistait à créer, à l'intérieur du cylindre, un vide dans lequel le piston était poussé par la pression de l’air extérieur; il fallait, pour cela, chauffer et refroidir alternativement le cylindre, ce qui entraînait une perte énorme de combustible.
Les améliorations de James Watt
La principale contrainte de la machine à vapeur réside dans les techniques métallurgiques nécessaires pour sa réalisation pratique et parvenir à un résultat fiable et économiquement viable. Le progrès décisif fut accompli par le mécanicien écossais James Watt. Appelé en 1763 à réparer un modèle de la machine de Newcomen utilisée pour des expériences par l’université de Glasgow, il constata que, «pour éviter toute condensation inutile, il fallait que le cylindre où la vapeur venait agir sur le piston restât toujours aussi chaud que la vapeur elle-même... Pour obtenir le vide voulu, il fallait que la condensation eût lieu dans un récipient séparé, où la température pût être abaissée autant qu’il serait nécessaire, sans que celle du cylindre se trouva modifiée».
Dès 1765, Watt joignit donc à la machine un condensateur distinct du cylindre. En 1769, il fait breveter ses premiers perfectionnements. Mais il lui fallut encore treize ans d’expériences avant de mettre au point, en 1782, la machine à double effet, dans laquelle la vapeur était admise alternativement sur chaque face du piston; cette machine était en outre pourvue d’un dispositif qui, en transformant le mouvement d’oscillation du piston en un mouvement circulaire, la rendait capable de toutes sortes d’applications. Cette invention ne put connaître une grande diffusion que grâce à l’équipe de mécaniciens spécialisés créée à Soho, près de Birmingham, par l’associé de Watt, Matthew Boulton, dont la manufacture sortit quelque cinq cents machines de Watt avant la fin du XVIIIe siècle.
La lente diffusion de la machine à vapeur
Constater la précocité de l’application de la machine à vapeur dans les mines ou les filatures de coton en Angleterre et dans d’autres pays européens - une machine de Newcomen est installée à Schemnitz, en Slovaquie, dès 1722; à Passy, en France, dès 1726 - n’implique pas sa généralisation au tissu industriel moyen, même en Grande-Bretagne. Dans l’industrie britannique, la machine à vapeur est utilisée dans la première moitié du XIXe siècle, uniquement dans les secteurs les plus modernes : l’industrie cotonnière, la métallurgie, la construction mécanique et les mines.
Les formes traditionnelles de moteurs - le moulin à eau ou à vent, et les manèges à chevaux - l’emportent encore. Des locomobiles servent au battage agricole, mais ne sont pas la règle. Paradoxalement, le moteur à vapeur va se généraliser durant la « grande dépression » des années 1873 à 1896, alors que l’économie britannique ralentit et perd son avance en productivité.
En France, en Allemagne, en Suisse et aux États-Unis, l’introduction de la machine à vapeur est lente et tardive. Le moulin à eau reste le moteur industriel dominant jusqu’à la fin du XIXe siècle dans les régions où le relief donne assez de vitesse aux cours d’eau et où leur débit est régulier, ne souffrant ni de la sécheresse, ni du gel. Les industriels ont fait ce choix parce qu’il était plus économique. Le moulin à eau revient très cher à installer car il nécessite le creusement d’un bief pour amener l’eau, mais ensuite son fonctionnement coûte peu. Le prix d’achat d’une machine à vapeur est plus faible, mais celui de son fonctionnement et de son entretien est élevé : outre le prix du combustible, il faut payer un mécanicien à plein temps et la faire fonctionner en continu, car le temps de mise en pression est long.
Dans les pays où le coût du charbon est élevé, les machines à vapeur sont peu répandues, si ce n’est dans de grandes entreprises. Néanmoins, comme au faubourg Saint-Antoine, à Paris, des loueurs en force motrice peuvent distribuer l’énergie à des ateliers artisanaux qui branchent leurs courroies sur un axe tournant dans la rue. En France, c’est surtout dans les années 1920 que les machines à vapeur deviennent le moteur industriel le plus répandu. Dans les années 1930, leur puissance totale plafonne et leur nombre diminue, car se maintiennent surtout des machines de grande puissance unitaire, comme celles des centrales thermiques de production d'électricité.
Une force motrice toujours utilisée
Le principe et les techniques de réalisation d ’un moteur à mouvement alternatif converti en mouvement rotatif se retrouvent à la fin du XIXe siècle dans des moteurs où la combustion externe est remplacée par une combustion interne, à gaz ou à pétrole. Nombre de procédés viennent des machines à vapeur, comme le carter, où l’embiellage tourne dans l’huile, ou bien les systèmes de plusieurs cylindres en étoile pour les moteurs d’avion.
La machine à vapeur est en même temps peu à peu associée aux techniques du mouvement continu que des ingénieurs, comme Benoît Fourneyron (1802-1867), avaient fait progresser au cours du XIXe siècle dans l’hydraulique. Les turbines à vapeur apparaissent dans l’industrie et la marine au début du XXe siècle, lorsqu’on est capable de fabriquer des rotors tournant à très grande vitesse. Enfin, les centrales nucléaires sont des moteurs à combustion externe utilisant le fluide vapeur pour mouvoir des turbines.
Bibliographie
- Histoire de la machine à vapeur, de Robert Henry Thurston. Decoopman, 2014.
- La Machine à Vapeur, de Louis Figuier. CIPP, 2015.