Le début du Moyen Age voit l'émergence en Europe d'un nouveau corps social : l'aristocratie nobiliaire. Cette dernière s'impose rapidement au sein de la monarchie en acquérant des titres et des privilèges qui vont progresivement devenir héréditaires. Pourtant, écrire l'histoire d'un « groupe » social, la noblesse, sur une période aussi vaste que le Moyen Age parait être impossible et chose vaine. En effet, il n'existe pas plus « d'aristocratie » médiévale que de « paysannerie » médiévale dont on pourrait prétendre livrer une définition qui résiste au temps et à l'espace. Il y a donc des « aristocraties », comme il y a des « paysanneries », éparpillées en différents lieux à des moments différents.
Les origines contestées de la noblesse
On peut même aller plus loin en se demandant même s'il est bien nécessaire et pertinent de vouloir à tout prix « encadrer » cette société ? Ainsi, il ne s'agit pas de dresser un portrait type – qui serait certes pratique mais caricatural – mais plutôt d'aborder l'aristocratie comme une structure de légitimation du pouvoir qui exerce sa domination sur le reste de la société médiévale. De fait, cet article ne prétend pas à l'exhaustivité – loin de là – mais plutôt tente de mettre en évidence les « évolutions » propres au « groupe » (hétérogène) qui domine. De même, la notion même de « noble » est complexe. Il y a d'abord celle due à sa naissance, fondée sur le prestige familial et les ancêtres puis celle davantage liée à sa réputation. Quoi qu'il en soit, le « noble » doit tenir son rang, sa naissance est essentielle mais ne suffit pas.
L'histoire des origines de la noblesse est loin de faire l'unanimité au sein des historiens même. Plusieurs théories s'affrontent. Certains défendent une continuité historique, qui fait de l'aristocratie médiévale l'héritière d'une partie des chefs germaniques et d'autre part, de l'élite romaine. Au contraire, d'autres définissent l'aristocratie médiévale comme nouvelle et propre au Moyen Age, née après une série d'élimination des grandes familles par les Mérovingiens. Cette théorie est aussi parfois alimentée par la mise en évidence du caractère « démocratique » des chefferies barbares qui, via l'élection, aurait favorisé l'émergence d'hommes nouveaux.
Bien entendu, il n'est pas question ici de trancher le débat qui fait encore aujourd'hui l'objet de nombreux désaccords. C'est pourquoi il est préférable d'analyser l'évolution des rapports de domination en privilégiant peut être une certaine continuité romaine, tout en y intégrant les phénomènes migratoires germaniques. L'ensemble ne doit bien entendu pas ignorer deux éléments majeurs : l'émergence du pouvoir royal et l'importance croissante de l'Eglise.
Déjà, l'aristocratie du Bas-Empire ne forme pas un bloc homogène. L'aristocratie provinciale tire l'essentiel de ses revenus de l'exploitation de la terre tandis que l'aristocratie sénatoriale détient les fonctions publiques qui lui confèrent le prestige, la légitimité et d'importantes rétributions. Au cours du Ve siècle, cette aristocratie sénatoriale migre au Sud de l'Empire en suivant l'empereur. Les différentes terres du Nord tombent entre les mains de l'aristocratie provinciale, qui en profite alors pour accroître ses revenus.
Peu à peu, suite au phénomène que l'on a appelé les « invasions barbares », les aristocraties franques et saxonnes se lient via des mariages avec l'aristocratie romaine. Les différents modes de domination s'influencent successivement jusqu'à provoquer une certaine fusion du groupe aristocratique. Ceci est encore visible aujourd'hui grâce à l'archéologie qui a permis de mettre en évidence une relative homogénéité du mobilier funéraire à travers l'Europe Centrale aux alentours du Vie siècle. Autre fait observable, celui de l'évolution des noms de familles qui ont tendance à se germaniser dans certaines régions, à se franciser dans d'autres. Cela s'explique par le fait que dans cette société où les femmes et les filles héritent des terres, les mariages mixtes sont l'occasion d'agrandir ses possessions. Aristocraties franques, germaniques et romaines s'unissent et se réunissent alors autour du sol.
A ce moment-là se profilent plusieurs caractéristiques qui serviront à définir – sommairement – une « nouvelle » aristocratie, dite « médiévale ». Bien entendu ceci reste schématique mais met en évidence la lente construction « sociale » qui s'est élaborée sur plusieurs siècles, excluant l'idée d'une coupure brutale d'avec les structures et les modes de fonctionnement hérités de l'Antiquité.
La mise en place du pouvoir royal/impérial et de l'Eglise
Tout ce que nous venons d'évoquer ne se passe pas en même temps aux mêmes endroits. De même, d'autres phénomènes importants sont observables. Au cours du Ve siècle, l'ancienne aristocratie sénatoriale met peu à peu la main sur une nouvelle source de pouvoir : l'épiscopat. En effet, nombre d'évêques ou même d'abbés sont d'anciens sénateurs, à l'image de ce Dynamus, évêque d'Avignon vers 625 qui « autrefois [fut] reconnaissant à Dieu pour le titre de patrice mais qui, souhaitant enfin servir le Très-Haut non plus en héros (...) décréta de suivre le vrai bien ». [a]
La fonction ecclésiastique de ces derniers se couple alors d'une fonction politique. Le sénateur devenu évêque profite d'un pouvoir local – souvent délaissé – et de l'absence d'une hiérarchie ecclésiastique forte – le pape n'est encore que « l'évêque de Rome » - pour définir lui-même ce qu'est la « noblesse ». Il n'est pas rare de voir certains évêques user du dogme pour « défiscaliser » le système social qu'ils prétendent désormais contrôler afin de prélever de nouvelles ponctions « sur mesure ». C'est par exemple le cas lors de l'instauration de la dîme au du concile de Mâcon en 585.
C'est donc dans ce contexte que l'Eglise tente de mettre la main sur le sacré et se pose en organe de légitimation du pouvoir royal. Les clercs relèguent au second plan l'aristocratie laïque au profit du roi. En institutionnalisant le pouvoir royal, l'aristocratie ecclésiastique s'affirme face au reste de l'aristocratie laïque.
Le roi va progressivement se poser en « premier des aristocrates » et redéfinir la hiérarchie des pouvoirs en fonction de sa personne et de son rang. Pour y parvenir, on assiste à des séries d'éliminations de roitelets concurrents – pas forcément de manière physique – avec l'appui de l'Eglise. De plus, dans cette optique, le baptême de Clovis est perçu chez certains historiens comme un autre signe éminemment visible de distinction d'avec le reste de l'aristocratie, faisant du roi le seul des aristocrates oint, donc au-dessus des autres. Les Codes – comme par exemple la loi salique – et l'Eglise confèrent au pouvoir royal un rôle majeur. Désormais, l'aristocratie laïque souhaitant « monter en rang » doit s'engager aux côtés du pouvoir royal qui, en retour, assure sa protection militaire. Dans ce contexte, la pratique des armes prend une importance croissante.
Sous les Carolingiens, le pouvoir royal puis impérial franchit un nouveau cap en s'affirmant et se structurant davantage. Le souverain distribue alors des honneurs à son entourage aristocratique. Le terme même de « noble » semble être réservé aux proches de l'empereur, formant ainsi une sorte « d'élite aristocratique ». Le roi/empereur fait du service royal/impérial un élément capable de convertir la puissance de fait de l'aristocratie laïque en un exercice d'un pouvoir légitime. De plus, en servant bien le roi/l'empereur et en recevant tous les honneurs, l'aristocratie localement influente favorise l'enracinement du pouvoir royal/impérial.
C'est dans ce cadre que se diffuse le système de la vassalité (cf. Le contrat vassalique durant la féodalité classique). Les premiers bénéfices dont on trouve la trace datent de 735 et sont attribués à Charles Martel. Le principe est en apparence simple, en échange d'un bénéfice garantit par un serment de fidélité, le roi/empereur s'entoure de vassaux royaux dont on attend d'eux dans un premier temps un service d'encadrement militaire puis, plus tardivement, la participation à l'ost[b]. La prééminence du roi/empereur semble alors de plus en plus évidente, les rapports de domination se structurent de manière verticale, avec au sommet le roi/empereur.
Cependant, cette « toute puissance impériale » atteignant son apogée sous Charlemagne - qui cependant sent un retournement vers 810-13 - semble connaître une sensible perte de vitesse au cours du IXe siècle. Plusieurs grands vassaux reproduisent en effet le modèle royal/impérial à leur propre niveau, ce qui a pour effet logique d'atténuer l'influence royale/impériale. Mais ceci n'explique pas tout. Au IXe siècle toujours, une lutte semble se profiler entre le pouvoir clérical et l'aristocratie.
En effet, les clercs vont tenter d'interdire les mariages entre parents jusqu'au 7e degré ! Les aristocrates laïques profitent alors de l'affaiblissement du pouvoir impérial et des tensions avec les clercs pour s'emparer de nombreux biens appartenant à l'Eglise. En 845 un concile se réunit à Meaux, la situation ne semble pas apaisée puisque les clercs menacent de jeter des anathèmes et même de condamner à mort ces aristocrates qu'ils qualifient alors « d'avides ».
Entre le IXe et le Xe, les honneurs se raréfient suite notamment au net recul des conquêtes. Et comme toutes choses rares elles sont l'objet de convoitises et sont jalousement conservées jusqu'à en devenir parfois héréditaires. Les comtes vont alors renforcer leurs pouvoirs locaux en redéfinissant par exemple leurs titulatures. De comtes « par la volonté du roi/empereur » ils deviennent comtes « par la volonté de Dieu ». Le pouvoir royal/impérial semble alors relégué au second plan. C'est donc naturellement que les comtes s'approprient de plus en plus certains pouvoirs régaliens.
Parallèlement, une véritable société « d'alliés » se met en place dans le but de conserver le pouvoir. Les mariages, parfois même incestueux, sont une pratique courante qui vise à assurer la mainmise sur le pouvoir comtal. Des pactes d'amitiés où l'on se prête mutuellement serment essaiment un peu partout. Le système parental est alors bouleversé au profit d'une nouvelle organisation aristocratique qui doit désormais faire preuve de stratégie pour se maintenir.
L'espace et les hommes au Moyen Age
Il n'est pas question d'évoquer ici cette fameuse « mutation féodale » qui fait débat au sein des médiévistes. Cependant, on observe bien un changement à la fin du Xe et au tournant du XIe, avec le début du règne d'Hugues Capet, lorsque le pouvoir royal semble à nouveau occuper une place d'importance.
Quoi qu'il en soit, l'enjeu majeur du Moyen Âge est celui du lien au sol. Dans cette société avant tout agraire, la détention d'une ou de plusieurs terres est essentielle. A ce propos, il faut se défaire de notre perception de ce qu'est la « propriété » aujourd'hui pour mieux sentir les rapports des hommes médiévaux à la terre. La détention d'une terre à un lien très étroit avec la durée qui lie celle-ci à son détenteur. Il devient donc compliqué donc très rare de voir un seigneur détenir l'ensemble de ses terres d'un seul tenant, ce qui participe à l'essaimage spatial des parcelles. La tendance au regroupement spatial des terres sera effective à partir du XVIe siècle.
De fait, la seigneurie incarne davantage le pouvoir d'un seigneur sur l'ensemble de ses terres qu'un « bloc » territorial homogène. Ainsi sur un territoire donné, plusieurs seigneuries s'enchevêtrent sans qu'il y ait d'unité. Quand une communauté villageoise obtient une charte de franchise, comme celle de Blois de 1196 par exemple, ceci se fait à l'avantage d'un seigneur qui perçoit alors « un cens annuel pour quiconque habite Blois et sa banlieue ». Ainsi, certains villageois qui autrefois dépendaient d'une seigneurie distincte doivent désormais verser un nouveau cens à un autre seigneur.
Au cours du XIe siècle, l'aristocratie s'enracine dans ce territoire désormais mieux « quadrillé » en se faisant élever des mottes castrales. On est encore bien loin des Guillaume le Conquérant qui peuplent notre imaginaire contemporain. Il s'agit plus vraisemblablement d'un tour – le plus souvent en bois – élevée au sommet d'une motte de terre de hauteur variable - de 10 à 20 mètres - et pouvant aller de 30 à 100 mètres de diamètre. Cette même tour est entourée d'une palissade de bois. Au pied de la construction se profile assez rapidement ce que l'on désigne par « basse-cour ». Là, activités artisanales et agricoles se développent. Progressivement, le prestige ne se mesure plus uniquement en fonction de l'occupation horizontale de l'espace mais de manière plus verticale.
Les historiens du XIXe et du début de XXe siècles ont certainement trop insistés sur le caractère militaire du « château ». Certes, sur des zones de contact comme la Catalogne avec les musulmans au Sud ou en Angleterre après la conquête de Guillaume le Conquérant, la fonction militaire a pu motiver l'édification d'un château. Mais la fonction première du « castrum » est davantage celle de noyau de de production et d'activités artisanales et agricoles. De fait, les aristocrates ne sont plus « de passage » au sein de leurs domaines mais tendent à y résider afin de gérer ce noyau et de montrer qu'ils en sont au centre. Peu à peu, ces tours de bois sont reconstruites ou construites en pierre et des habitations paysannes y sont agrégées. C'est par exemple le cas de l'incastellamento en Italie du Nord ou en Catalogne.
Au sein des communautés villageoises, les seigneurs tiennent à rendre leur pouvoir visible en se faisant par exemple édifier ces fameuses tours déjà évoquées ou encore avec des maisons fortifiées entourées d'un large fossé et d'un rempart. En plus de lieux de résidence, ces constructions servent de centres de production et aussi d'endroits où les paysans, les vilains, viennent verser leurs redevances. Au XVe siècle en Bretagne par exemple, on compte près de 14 000 de ces manoirs. A côtés de ces espaces cultivés dont le contrôle seigneurial est plus facilement justifiable, on trouve nombres d'espaces incultes désignés par les termes de saltus ou encore de forêts.
Pour s'approprier ces espaces, l'aristocratie a dû élaborer un discours et des pratiques légitimant leur contrôle. En effet, ces terres sont d'importantes sources de matériaux précieux comme le bois, le gibier ou encore d'arbres qui fournissent des fruits, nécessaires pour les glandées[c]. Cette mainmise sur ces forêts s'est élaborée – entre autres - autour de la chasse, qui tend à devenir une activité aristocratique de première importance. Chasser le gibier, surtout le sanglier jusqu'au XIIe puis le cerf ensuite, est une activité fortement socialisatrice. Les terrains de chasse que sont les forêts sont de fait peu à peu réservées aux seigneurs qui en contrôlent peu à peu l'accès.
Dès le Xe siècle, les campagnes connaissent une restructuration favorable à un mode de vie communautaire dans un espace doté de limites, ce que l'on désigne par finage. Les parcelles d'un même paysan peuvent être dispersées au sein de ce même finage, ce qui le pousse à travailler en symbiose avec les autres membres de la communauté. Certains paysans se distinguent du lot, ce qui contribue à la formation d'une «élite rurale ». Cette fraction dominante sert de relais entre le pouvoir seigneurial et le reste de la communauté en assurant le dialogue et les négociations. Ainsi, lors des révoltes, cette élite rurale formée par les maires, les prévôts ou les riches laboureurs, reste plutôt à l'écart, signe que l'homogénéité sociale chez les non-aristocrates est également relative.
Ces communautés prennent peu à peu en charge le mode de production, réduisant ainsi les interventions seigneuriales. La proportion des réserves seigneuriales tendent à diminuer aux alentours du XIIIe siècle, ce qui entraîne une diminution des corvées qui se chargent alors d'une forte symbolique. La corvée reste toutefois présente pour rappeler le pouvoir seigneurial. En être exempté est le signe d'une reconnaissance sociale, le plus souvent réservée à l'élite rurale. Inversement, refuser la corvée c'est refuser l'appartenance communautaire et donc nier le pouvoir seigneurial.
Toutefois, pour assurer leur maintien, les seigneurs encouragent la mise en place de deux modes de productions distincts. D'un côté, le fermage est un mode de faire-valoir indirect où le seigneur loue des terres stipulées par un bail à ferme, ce qui garantit une rente fixe. De l'autre côté, le métayage unit le propriétaire et l'exploitant. Le métayer exploite à court terme – souvent renouvelable – une terre contre le versement d'une partie des récoltes au propriétaire. Le propriétaire/seigneur fournit parfois une partie des semences et l'outillage. Ce mode d'exploitation est davantage propice à l'innovation.
A partir du XIe siècle, outre le nombre d'honneurs et la position qu'il occupe auprès de son souverain, le prestige d'un aristocrate se mesure également en fonction du nombre de domaines dont il dispose. De plus, plus les terres sont dispersées dans l'espace, plus il y a de chances qu'il s'agisse d'un aristocrate de haut rang. Le pouvoir s'exerce de manière directe au sein même des domaines. Déjà, à l'époque mérovingienne s'élabore un nouveau mode d'exploitation.
Cependant, il n'est pas rare de trouver dans les textes la mention de domaines esclavagistes exploités par des « servi ». De plus en plus, les domaines sont partagés en plusieurs lots de terres, les tenures, distribuées à des colons qui, en échange, versent une redevance en nature au maître. Dans le même temps, le système de la corvée est perfectionné. Cette nouvelle organisation est encouragée par l'Eglise qui est à la tête d'importants domaines.
Aristocratie « laïque » et aristocratie « ecclésiastique »
Les seigneurs adoptent de nouveaux comportements en se faisant – par exemple - de plus en plus appeler par le nom du château où ils résident (ex : Untel de Tel Château). Le pouvoir et les hommes sont progressivement encadrés, de manière plus ou moins efficace, dans un réseau castral hiérarchisé. Dans certaines zones, comme dans l'Empire Romain Germanique par exemple, les constructeurs de châteaux maçonnés sont majoritairement issus de la haute-aristocratie, environ les ¾. De fait, un aristocrate de haut rang peut posséder plusieurs châteaux qu'il habite alors successivement. En son absence, le château est confié à des gardiens chargés d'assurer le contrôle seigneurial local pour le compte du seigneur. Ces gardes adoptent quelquefois comme patronyme le nom même du château dont ils ont la garde. Parfois, ils s'entourent aussi d'une petite troupe d'hommes, souvent désignés par le terme de « milites castri ».
Pour nombre d'historiens, un nouveau système juridique et social prend forme autour du château basé sur les rapports féodaux-vassaliques, les cérémonies d'hommage, les serments ou encore le fief : la « féodalité ». Mais le risque de vouloir appliquer un cadre trop strict à cette société, risquerait de ne pas tenir compte de la variété des sources qui incitent à relativiser ce modèle trop fermé. D'ailleurs, en 1890, l'historien Jacques Flach écrivit, certes de manière un peu provocante, que « les historiens ont abouti à un système juridique fort complet et fort bien ordonné, qui n'a qu'un seul défaut : celui de n'avoir jamais vécu ». Cette phrase n'est pas à prendre au pied de la lettre mais doit nous inviter à relativiser ce modèle qui doit rester malléable. Ainsi, à propos du fief par exemple, il faut se défaire de l'aspect trop matériel qu'on a tendance à lui appliquer. Il faut davantage le comprendre comme une forme de pouvoir concédée à un vassal par un seigneur. Forme de pouvoir qui peut en effet être matérielle, mais aussi sous la forme de droits de justice, de péages...
Toujours à propos des sujets « sensibles », les médiévistes ne sont pas tous du même avis quant au rôle social et à la datation de l'apparition du miles, parfois traduit par « La noblesse en Occident Ve-XVe siècle ». Le terme même de miles recouvre plusieurs « réalités ». En effet, le qualificatif sert aussi bien à désigner la personne royale que de purs mercenaires en passant par toute la hiérarchie aristocratique. Souvent, c'est l'ensemble d'un groupe d'hommes en armes qui est regroupé sous cette appellation. Cependant, on peut discerner des traits communs, le miles s'inscrit toujours dans des rapports de domination.
De même le terme inclut la notion de service du à quelqu'un ou à une structure (miles castri ou miles christi). Il faut donc être vigilant quant à ce terme qui requiert une analyse fine à chaque fois qu'on le rencontre. La nomenclature aristocratique se modifie à nouveau au cours du XIe siècle. Au sommet on retrouve l'aristocratie de haut rang composée des grands, puis leurs vassaux à la fois nobles et chevaliers et enfin d'autres milites qui sont pour la plupart « les vassaux des vassaux ». Ce schéma simpliste est bien sûr à nuancer en fonction des endroits.
Pour un aristocrate, le passage de la « minorité » à la « majorité » semble être un enjeu essentiel dans la quête du pouvoir. Ainsi, plusieurs « rites de passages » doivent être accomplis, celui qui n'y parvient pas est considéré alors comme « jeune ». Le mariage est un de ces rites car il permet de montrer la capacité d'accéder au pouvoir via l'établissement d'un réseau. La pratique du tournoi – fermement condamnée par l'Eglise – est un autre de ces rites. Ici, c'est davantage le prestige social qui est recherché.
Mais tout ceci ne doit pas faire oublier la place majeure qu'occupe une autre aristocratie, celle des clercs. Les origines sociales de l'aristocratie ecclésiastiques sont difficiles à bien déterminer. Il ne faut pas se laisser aveugler par Erasme qui, à la fin du XVe siècle, déclare à propos du chapitre [i]de Strasbourg que le Christ lui-même n'aurait pu y être admis sans dispense spéciale. Toutefois, il semble attesté qu'une large part du clergé provient directement de l'aristocratie laïque, parfois même de haut rang.
Là aussi, il faut se garder de vouloir tirer des conclusions hâtives et bien mettre en évidence les parfois fortes nuances qui existent. Ainsi, aux XIIe et XIIIe siècles, sur les 610 évêques répertoriés dans l'Empire, 240 – soit 40% - ont une origine sociale inconnue tandis que 192 – soit 25% - proviennent de la haute aristocratie. Le reste vient aussi de l'aristocratie. On voit bien que l'aristocratie laïque domine. Inversement, aux alentours de 1275 dans l'Albigeois, les Mendiants ne seraient composés « seulement » que de 30% d'aristocrates.
Les origines sociales des évêques évoluent avec le temps. En effet, comme nous l'avons vu plus haut, à l'échelle locale le pouvoir de l'évêque est grand ce qui pousse différents seigneurs à tenter de mettre la main sur l'épiscopat. C'est pour cela que l'empereur, les souverains ou les seigneurs sont amenés à nommer directement les évêques, parfois parmi leurs propres proches. Le pape est dans la même situation jusqu'à l'intervention impériale à Rome au XIe qui débouchera sur ce que les historiens appellent la « querelle des investitures ».
Dès lors, l'élection papale devra être validée par les cardinaux, eux-mêmes nommés par le pape. Ainsi, un des effets premiers de ces troubles autour des investitures est celui d'enlever nombres d'évêchés à la haute aristocratie afin d'en privilégier une autre, de « moindre » importance. Les chapitres cathédraux deviennent ainsi des lieux de « formation » dirigés vers le haut clergé. Ceci participe à l'institutionnalisation de l'Eglise qui attire de plus en plus les regards de l'aristocratie laïque. Les aristocrates qui entrent alors dans un chapitre ou dans une abbaye peuvent espérer renforcer leur domination locale et celle de leur topolignée [ii]en devenant par exemple évêque dans le meilleur des cas.
Dans ce contexte, les clercs développent la notion de conversion opposant le clerc au chevalier. Cette construction ecclésiastique ne doit pas seulement être vue comme une « entrée en spiritualité » mais plutôt comme le signe d'un changement social. Dès lors, le clerc se pose comme dominant et fait du chevalier celui qui s'abandonne au profit d'un ordre nouveau définit par l'Eglise.
Pour terminer, on peut évoquer l'invention de la quête du Graal, d'abord par Chrétien de Troyes au XIIe siècle puis par Robert de Boron en suite. Ces récits portent en eux cette « spiritualisation » de l'aristocratie laïque. Derrière les lignes on ressent le triomphe des valeurs chrétiennes qui pré-dessinent le moule dans lequel va s'insérer la chevalerie. Bien que les clercs soient absents dans la plupart de ces œuvres, le modèle social qu'ils ont mis au point est bien présent. D'ailleurs, l'Eglise ne s'offusque pas de ces récits.
L'émergence de l'aristocratie urbaine
Avec l'essor des villes, une aristocratie que l'on qualifie « d'urbaine » se dresse peu à peu face à l'aristocratie seigneuriale déjà en place et au reste de la société. La plupart du temps, la ville médiévale se développe autour d'un ou plusieurs noyaux seigneuriaux, souvent autour d'un évêque. La « continuité urbaine » d'avec les cités antiques est rarement observable sauf peut-être dans des villes comme Paris gardent ce « point de départ » antique. Les villes ex nihilo se développent quant à elles la plupart du temps autour d'un château – 80% des villes au XIIIe en Allemagne – ou sont le fruit d'initiatives seigneuriales avec les villeneuves ou les bastides ou encore lors de la concession d'une charte de franchise.
Au sein des villes, l'aristocratie reste diverse. A côté des évêques, des comtes et des vicomtes, on retrouve ici aussi des milites qui gardent les forteresses en l'absence des seigneurs. Dans le Midi par exemple, ces milites peuvent représenter jusqu'à 10% environ de la population urbaine. A Nîmes, ils occupent l'arène romaine alors transformée en « Château des Arènes » et sont près d'une centaine vers 1225. Dans d'autres villes ils investissent tours fortifiées ou murs d'enceintes.
On peut difficilement dresser un portrait type du rapport aux villes sur l'ensemble de l'Occident médiéval. Ainsi, en Italie du Nord par exemple, la plus grande partie de l'aristocratie laïque réside à la campagne tandis que l'aristocratie ecclésiastique occupe les villes ou elle exerce son pouvoir via sa curia vassalum jusqu'à la fin du XIIe. Cette curia tend à fixer les petits vassaux en ville, c'est le phénomène d'inurbamento. Ces petits vassaux conservent leurs biens dans les campagnes périphériques, ce que l'on désigne par contado. La ville devient donc un pôle d'attraction du pouvoir autour des grands seigneurs, princes ou rois. A partir du XIIIe, les grands féodaux se dotent d'hôtels à Paris ce qui a pour effet de les rapprocher du roi. Ce dernier en profite alors pour mieux surveiller et encadrer ses fidèles tout en affirmant de manière symbolique sa domination.
A partir du XIIe siècle, les seigneurs encouragent l'installation en ville de serviteurs spécialisés qui jouent souvent le rôle d'agents seigneuriaux, les ministériaux. Avec le temps, ces serviteurs intègrent la familia du prince et obtiennent progressivement le droit de transmettre héréditairement leurs charges. En ville ils possèdent des maisons, des moulins, des boutiques mais aussi des tonlieux [iii]ou d'autres rentes. Cette petite aristocratie de service s'unit parfois avec des marchands, les deux activités étant souvent génératrices de pouvoirs car le contrôle de la marchandise permet – entre autres – de faire pression sur la population.
Dans ce contexte, on observe à partir du XIIIe siècle quelques cas d'anoblissement de l'élite marchande « en récompense des services rendus ». Peu à peu donc, la formation de l'aristocratie urbaine passe en premier lieu par l'appropriation du pouvoir en ville qui peut être acquis de différentes façons : le service seigneurial, son propre pouvoir alimenté par ses biens dans le contado, l'exercice de la marchandise...
Dans de nombreuses villes s'opère une « fusion » entre les différents types aristocratiques. Le terme de milites sert parfois de référent commun et les membres de l'aristocratie se retrouvent au sein de « sociétés » ou de « communes de chevaliers » comme en Italie du Nord. D'autres puissants citadins se réunissent dans des « sociétés de chevalerie » au XIIIe siècle. Les codes du cycle arthurien y sont repris, notamment lors de l'organisation de tournois à haute valeur symbolique.
Ces sociétés et confréries visent à mettre en évidence le rang social de chacun de leurs membres et servent aussi de lieux de recrutements pour les hauts magistrats. L'activité de la chasse au vol est aussi porteuse d'un fort marqueur de différenciation sociale qui sert à montrer qui on est. En 1318 à Padoue, pour les citadins de la ville, la chevalerie se résume en quelques phrases : « Aller avec des chevaliers et damoiseaux, des chevaux, armes et oiseaux, et participer à des courses, tournois et adoubements [...] aller avec des gens de valeur et à cheval, se délecter des chevaux, chiens et oiseaux, et aller à cheval et à la chasse et par le pays ».
Une confusion s'opère cependant autour de la pratique de la guerre à cheval. En effet, dans les villes se développe un service militaire à cheval avec par exemple les caballeros vilanos en Espagne ou les servientes ailleurs. Or, comme nous l'avons vu, la pratique équestre était l'apanage des aristocrates. De nouveaux discours tentent alors de faire la distinction entre la chevalerie noble d'un côté et les cavaliers urbains de l'autre afin de lier la dignité chevaleresque à la naissance.
La pratique de l'adoubement n'est désormais plus un simple rituel qui marque l'entrée en chevalerie, mais devient un signe idéologique fort d'appartenance sociale et révèle le désir d'être noble. Néanmoins, cette aristocratie urbaine demeure guerrière et n'hésite pas à s'engager dans des conflits. Ainsi, les tensions au sein des groupes dominants sont parfois vives, à l'image du long conflit qui oppose les guelfes ]aux gibelins à partir de 1230 à Florence. L'édification de tours est aussi là pour rappeler symboliquement le monde castral et l'autorité seigneuriale.
En ville – comme ailleurs- être à la tête d'une vaste familia est assurément le gage de détenir une puissance sociale importante. Ces familia ou « maisons » fonctionnent davantage comme des structures de pouvoir que comme des groupes privés et fermés. Ainsi, en Castille par exemple, ces « lignages » sont composés par plusieurs « casas » qui peuvent n'avoir aucun lien de parenté entre elles. Différents procédés permettent d'y être admis comme celui du mariage ou encore après avoir juré un serment de fidélité. Il s'agit alors de constructions artificielles basées sur des codes précis dans le but de maintenir sa domination sociale via l'accès au pouvoir.
Pour terminer avec la ville, on doit évoquer l'émergence d'un « nouveau » groupe social proprement urbain, celui composé par les universitaires. Un nouveau discours est élaboré dans le but de reconnaitre à ces derniers l'appartenance à une certaine noblesse. Les mérites personnels sont alors valorisés et, en s'appuyant notamment sur le droit romain, la noblesse est alors redéfinie sur la militia à la fois céleste et militaire. Le code d'Alphonse X de Castille reconnaît même à la fin du XIIIe siècle que ceux qui atteignent le degré de maîtres ès lois « ont le nom de maître et chevalier ». Certains en profitent pour développer cette idée comme le juriste bolonais Bartolomeo de Saliceto à la fin du XIVe siècle pour qui « la science ennoblit l'homme de l'extérieur et l'intellect de l'intérieur ».
L'aristocratie en marche vers l'Etat Monarchique « moderne »
A la fin du Moyen Âge, plusieurs transformations s'opèrent au niveau de la structuration du pouvoir, ce qui fait dire à certains historiens qu'une « crise » se profile. En effet, on assiste à la mise en place d'un pouvoir monarchique et non plus simplement royal. La domination aristocratique est alors institutionnalisée et se mute en catégorie sociale, la « noblesse ». D'ailleurs la conception de la « noblesse » dans son ensemble apparaît tardivement, au XVe siècle dans la Haute Allemagne, sous le terme Adel. Ce terme même apparait dans un climat de tensions et vient bipôlariser la société entre Adel d'un côté et villes de l'autre. Ceci ne se fait pas sans paradoxes puisque cette même noblesse semble au même moment solidement implantée dans les villes.
Les prémices de « l'Etat Moderne » semblent se dessiner autour du XIVe siècle. Par Etat Moderne ou Monarchique, il ne faut pas automatiquement se référer à la personne royale mais plutôt le concevoir comme un pouvoir légitimement concentré entre les mains d'une seule personne, physique ou morale. Ce modèle qui fait souvent du monarque un « Prince » n'est pas non plus le fruit d'un plan consciemment mûri. Il soit tenir compte de la longue durée. Il ne s'agit pas ici d'expliquer la mise en place de l'Etat Monarchique, chose qui fait encore débat chez les spécialistes. Néanmoins, on peut évoquer quelques grandes lignes.
On peut déjà dire que les différents conflits entre les souverains et la papauté ont contribué à la redéfinition de la place du souverain et à la mise en place de l'idée que les rois sont « empereurs en leurs royaumes ». Le roi a donc tendance à affirmer sa souveraineté en se préoccupant de plus en plus des pouvoirs régaliens. On assiste à la reprise des pratiques de codification générale qui visent à compiler le droit romain et le droit canon sans pour autant rendre le recours obligatoire, mais plutôt dans le but d'établir un ensemble de principes où puiser. On observe ainsi le désir de rétablir une certaine harmonie sociale.
Avec Saint-Louis, la mise en place de la procédure d'appel au roi en cas de conflit ne doit pas être vue comme une privation du droit de justice locale car elle intègre parfaitement ce système judiciaire. D'ailleurs, au XIVe siècle, plusieurs aristocrates demanderont le retour « au bon temps de Monseigneur Louis ».
Le roi veut ainsi, selon le mot de Max Weber, « obtenir le monopole de la violence légitime ». Dans un premier temps, il condamne ainsi les faides [vi] privées puis derrière vient se greffer un discours sur la « guerre juste » autour de la défense du territoire. Ainsi, les membres d'un même territoire qui aident les ennemis sont vus comme des traîtres qu'il faut éliminer. La vieille notion de guerre entre intérieur et extérieur de la Chrétienté semble alors laisser place à celle entre intérieur et extérieur du territoire, contribuant ainsi à l'élaboration des « frontières ». Dans ce contexte, la royauté et les pouvoirs seigneuriaux tentent d'encadrer également la pratique du commerce, habituellement réservée aux non-nobles. Cette tentative d'institutionnalisation du commerce par le pouvoir monarchique vise dans un premier temps à empêcher l'accès des nobles au commerce afin de limiter – entre autres – le trop grand enrichissement de ces derniers qui, de fait, restent sous la « tutelle » royale.
Certains historiens ont certainement quelque peu forcé le trait à propos des conflits entre le pouvoir royal et l'aristocratie. Pour eux, la constitution de ligues aristocratiques est le signe d'une opposition au pouvoir monarchique et du reste de l'aristocratie. En réalité, on peut observer une organisation plus complexe. Une sorte de binarité se crée bien, mais elle oppose davantage une aristocratie partisane du pouvoir monarchique à une aristocratie plus réfractaire. L'ensemble est « encadré » par un ensemble de ligues, souvent hétérogènes. Au XVIe siècle par exemple, la « Chevalerie d'Empire » joue de ces oppositions pour maintenir ses privilèges en favorisant successivement les camps opposés.
La noblesse, un corps social homogène ?
Au cours du XVe siècle, le discours à propos du rôle de l'aristocratie laïque semble se modifier. Auparavant, celle-ci se disait au service « de la veuve et de l'orphelin ». Mais peu à peu, avec l'importance croissante du roi, le discours semble s'articuler autour de ce dernier. Jean Juvénal des Uroins déclare même : « à vous, nobles ducs, comtes, princes, chevaliers et écuyers, aimez et honorez en personne le roi [...] c'est votre profession, vous n'êtes nobles pour aucune autre raison que pour accomplir ceci ».
A tous les niveaux de l'aristocratie, on a affaire au même mode de construction d'une fiction sociale destinée à encadrer et réguler la transmission et la reproduction du pouvoir. Ainsi, les « arbres généalogiques » sont plus ou moins fictifs et rassemblent davantage des topolignées que de véritables familles liées par le sang. Ces groupes sociaux s'organisent et se hiérarchisent au sein des « Couronnes » pour les groupes royaux, des « Maisons » pour la haute-aristocratie et des « Heaumes » pour le rang équestre.
Enfin, les conflits entre l'aristocratie et la royauté ne sont en réalité que des « querelles d'amants » comme l'écrivit Victor Hugo, car elles se déroulent au sein de l'aristocratie sans trop en sortir. Le phénomène que l'on doit davantage percevoir et retenir réside dans l'homogénéisation de la noblesse en tant que couche sociale dans l'Occident à partir du XVe siècle. Dans ce contexte « d'uniformisation aristocratique » le discours sur la noblesse de sang peut alors se développer, chose impensable quelques siècles auparavant...
Cette brève histoire de l'aristocratie médiévale n'est qu'une esquisse de ce qui a pu se dérouler au fil des siècles et fait donc des impasses sur beaucoup d'éléments, notamment l'histoire plus évènementielle qui pourtant y a toute sa place. Cependant, c'est bien ce que des historiens comme Jacques Le Goff ont tenté d'apporter qu'il faut retenir, à savoir la notion de longue durée.
Bibliographie
- AURELL Martin, La noblesse en Occident Ve-XVe siècle, Armand Colin, 1996.
- BARTHELEMY Dominique, L'ordre seigneurial, Points, 1990.
- MORSEL Joseph, L'aristocratie médiévale Ve-XVe siècle, Armand Colin, 2004.
[a] Epitaphe de Dynamus, évêque d'Avignon au VIIe siècle
[b] A la fois armée et service dans cette armée. Ce service est progressivement restreint aux vassaux envers leur seigneur, pour une campagne importante ou une chevauchée. Réduit à 40 jours au XIIe, l'ost peut faire l'objet d'un rachat ou d'une contribution monnayée (l'écuage)
[c] Pacage des porcs en forêt