Fille de Roi et première épouse de François Ier, Claude de France (1499-1524) fut une reine très charitable, très bonne, « fort douce à tout le monde ». Sa devise est symbole de pureté et d’innocence « Candida candidis » pure parmi les pures, accompagné d’un cygne « navré », transpercé d’une flèche. Duchesse de Bretagne en 1514, reine de France en 1515, elle porte les titres de Comtesse de Soissons, de Blois, de Coucy, d’Etampes, de Montfort et duchesse de Milan. Claude de France meurt prématurément à l’âge de 24 ans, non sans avoir donné sept enfants à François Ier dont le futur Henri II.
L'enfance royale de Claude de France
Claude de France est née, dans la joie, le 13 octobre 1499 à Romorantin. Elle est la fille du roi Louis XII et de la reine Anne de Bretagne. Tellement content, le roi la déclare « duchesse des deux plus beaux duchés de la chrétienté, qu’étaient Milan et Bretagne ». Choyée, elle vit aux côtés de ses parents, a sa « maison », est le centre d’intérêt des fêtes de Pâques 1505.
Dès son premier âge, ses parents songent à la marier, ce sera l’un des plus importants conflits entre ses parents. La Bretagne devant lui revenir, c’est une belle dot non négligeable. Sa mère Anne dresse une très courte liste des prétendants, se réduisant à Charles de Gand, plus jeune que Claude de quatre mois, futur Charles Quint, héritier des Pays-Bas, de l’Artois, de la Franche-Comté, de l’Autriche, de la Hongrie, de l’Aragon et de la Castille. Les dangers ne sont pas à négliger ! Louis XII promet alors la main de sa fille à l’héritier présomptif du trône François d’Angoulême, qui saura défendre les intérêts de la France. Mais Anne ne supporte pas ce petit garçon vif et plein de santé, elle ne supporte pas plus sa mère Louise de Savoie qui met en avant le garçon, chaque fois qu’il est possible.
Louis XII ne s’oppose pas à son épouse, si bien que les fiançailles seront célébrées en août et la présentation des familles en novembre… mais en secret il fait établir en avril 1501 une déclaration stipulant que tout autre accord matrimonial que celui entre sa fille et le jeune François d’Angoulême, serait nul.
Le traité de Blois concernant l’alliance de Claude et de Charles, signé en septembre 1504, dévoile que la dot comporterait Milan, Gênes, Asti, la Bretagne, le comté de Blois, le duché de Bourgogne, Auxerre et l’Auxerrois, Mâcon et Bar sur Seine ! Anne de Bretagne fait tout pour que ce mariage ait lieu, mais le roi, déjà malade, écrit ses volontés par lettres patentes en mai 1505. Devant le départ d’Anne en direction de la Bretagne et menaçant d’emmener sa fille, Louis XII fait propager dans le royaume, des rumeurs hostiles à Charles de Gand, le peuple réclamant ainsi le mariage de Claude avec son cousin François « qui est tout françois ».
Louis XII a gain de cause, les fiançailles ont lieu le 21 mai 1506, Anne de Bretagne doit y assister contre son gré. Claude a à peine six ans ; parée et engoncée dans ses habits de brocart et d’or, on la porte. Douce, pieuse, elle n’est pas très jolie ; elle tient de son père le nez ; elle hérite de la claudication de sa mère, mais est plus petite encore ; un léger strabisme à l’œil et un fort embonpoint qui avec ses grossesses successives se transforme en obésité.
Le temps passe, François a maintenant dix neuf ans, Claude bientôt quinze… ils ne sont toujours pas mariés, mais au moins ils se connaissent de longue date, Claude n’aura pas d’appréhension lors de sa première nuit de noces, en mai 1514 ! Des noces tristes, en noir, Anne de Bretagne vient de mourir. Trois mois plus tard, c’est au tour de Louis XII. Claude n’a plus de famille, uniquement son royal époux !
Une reine mise à l’écart
Espérant le soutien de sa belle-mère et de sa belle-sœur, Claude est bien seule dans sa nouvelle famille : Louise de Savoie et Marguerite font bloc autour de François. La mère espérait une autre épouse, de même beauté et surtout de même intelligence que son fils, lui faisant honneur. Claude est étrangère, juste tolérée… l’accueil n’est donc pas très chaleureux ! Tout bien réfléchi, Louise de Savoie s’en accommode : la petite ne fera ombrage à personne, elle sera inoffensive, il ne faut pas non plus négliger le fait que c’est une union de prestige : la fille ainée du roi de France ! Sa dot est somptueuse : Claude détient la Bretagne et le duché de Milan.
Discrète, Claude le sera toujours : elle accompagne son époux au sacre à Reims, elle est aperçue sur une tribune lors de l’entrée officielle à Paris, alors qu’elle ne sera couronnée qu’en mai 1517 ! Elle est déjà enceinte et accouche le 15 août d’une petite Louise…pendant ce temps, François attaque l’Italie, Louise de Savoie est régente, Marguerite est ambassadrice…Claude s’efface. Elle n’est pas de force, n’a pas l’éclat ni l’esprit de ces deux femmes, elle n’a pas de courtisans, ni de clientèle, elle ne sert « que de réceptacle pour assurer la dynastie » ! Même ses enfants, elle ne peut s’en occuper, Louise de Savoie organise tout : la nursery, les soins, les morts et les futures alliances !
Une chose est au moins positive : le roi fait volontiers son devoir conjugal. Il ne la repousse pas et admire ses enfants nés. Il aura toujours des égards envers elle et la traite avec bonté ; bien qu’il ait des maîtresses, il reste discret, aucune maitresse royale n’est « intronisée » à la cour !
Les enfants de Claude de France
Pendant les dix années de vie commune, elle donnera au roi sept enfants. Avec ces grossesses successives, sa santé va décliner, elle deviendra faible, s’alourdira, s’affaiblira, elle n’arrivera même plus à bouger toute seule ! Malgré cela, elle suit le roi dans ses déplacements, car la reine doit être vue, c’est un gage de paix pour le peuple. Surtout que François Ier aime voyager et participer à des fêtes. A peine la première enfant née Louise en août 1515, elle descend dans le Sud rejoindre le héros de Marignan.
Début 1516, ils font halte près de Marseille à la Sainte Baume, puis le cortège royal remonte doucement et déjà Charlotte arrive en octobre 1516. François Ier reprend la route au printemps 1517 pour un an et demi ! Compiègne, Amiens, Dieppe, Rouen, Lisieux, Blois, une petite halte à Amboise, le temps que naisse le dauphin François en février 1518 (il deviendra duc de Bretagne sous le nom de François III). On repart pour la Bretagne, puis Nantes. Claude apprend la mort de sa première fille…mais c’est sa belle-mère qui retourne à Amboise pour s’occuper des funérailles.
Continuant le tour du royaume par Vendôme et Chartres, Henri (futur roi de France) nait en mars 1519 à Saint Germain. La cour se rend à Châtellerault à l’hiver 1519-1520, puis à Cognac pour trois semaines de festivités en février 1520. Débutent ensuite les tractations pour l’accession au Saint Empire contre Charles Quint, avec le fameux Camp du Drap d’Or en juin 1520. Claude, toujours présente, est encore une fois enceinte de sept mois (les ambassadeurs sont d’ailleurs stupéfaits de sa corpulence), elle supporte tant bien que mal les habits, les messes, les joutes, les banquets…Madeleine nait le 10 août 1520 (elle épousera Jacques V et deviendra Reine d’Ecosse en 1537).
Les voyages vont cesser par manque d’argent et pour cause de mauvaise santé du roi. Celui-ci une fois rétabli, la reine part en pèlerinage à Notre Dame de Cléry afin de remercier la vierge pour la guérison de son époux. On aurait pu croire que les naissances s’arrêteraient, mais Charles arrive en janvier 1522, et Marguerite en juin 1523 (future duchesse de Savoie par son mariage en 1559 avec Emmanuel-Philibert de Savoie).
Les hommages à la reine de France
Claude est épuisée, ne quitte plus son lit, son visage n’est que dartre, elle se meurt, non pas de syphilis qui aurait été transmise par le roi, mais bien d’épuisement. François l’embrasse une dernière fois le 12 juillet avant de partir en campagne en Provence. Louise de Savoie et Marguerite, prévenues d’urgence, ne seront qu’à Bourges lorsque Claude de France meurt le 20 juillet 1524 à Blois. Elles arrivent trop tard.
La reine est pleurée : Louise l’avait finalement appréciée pour sa discrétion ; elle se dévouera pour ses six petits enfants qu’elle élèvera avec beaucoup de tendresse. Marguerite rend justice à ses mérites, ses vertus, ses grâces. François se rend compte qu’il l’avait aimé avec beaucoup de tendresse « je n’eusse jamais pensé que le lien de mariage conjoint de Dieu fût si dur et difficile à rompre ».
Claude fut une reine populaire, simple, bonne, mais ne laissant rien derrière elle, si ce ne sont des enfants et un fruit délicat et charnu : la Reine Claude, la Reine des Prunes. Les oraisons funèbres sont nombreuses « c’était l’une des plus honnêtes princesses que la terre portît oncques et la plus aimée de tout le monde, des grands et petits, créant que si celle-là n’est en Paradis, que peu de gens iront ».
Bibliographie
- Claude de France : Première épouse de François 1er, d' Henri Pigaillem. Pygmalion, 2006.
- Simone Bertière – «Les Reines de France au temps des Valois, tome 1 : Le beau XVIe siècle » . Livre de poche, 1996.